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Billet de blog 4 juin 2024

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L’écologie n’est pas l’ennemie : pour un vote sanction de la majorité aux européennes

Sur l’environnement, le masque est définitivement tombé. Emmanuel Macron reprend certaines postures de la droite voire de l’extrême droite, permettant une normalisation d’antiennes anti-environnementales ; comme si le maintien des conditions de vie humaine sur terre était une mode politique à ressortir uniquement en temps favorables et que les lobbies dictaient leur loi.

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Par Margot Holvoet, responsable des questions « environnement » au sein de Chronik.

En 2019, autour des précédentes élections européennes, plusieurs catastrophes naturelles imputables au changement climatique ont été largement médiatisées, dont les mégafeux en Amazonie puis en Californie et les inondations monstres en Asie du Sud. Les mégafeux en Australie en 2020, dans lesquels plus d’un milliard d’animaux ont péri, ont ensuite contribué à installer le changement climatique et la protection de l’environnement dans les priorités des populations occidentales, notamment françaises, et la transformation des grilles d’information pour intégrer davantage les sujets environnementaux[1].

La forte présence médiatique de ces catastrophes a largement contribué à une prise de conscience qui déboucha notamment sur un score important des écologistes aux européennes, et sur une majorité volontariste pour la lutte contre le changement climatique au Parlement européen. Le pacte vert européen et la stratégie « From Farm to Fork » ont été mis sur les rails, malgré l’opposition de plusieurs Etats membres, dont la France.

L’Union européenne a donc, ces dernières années, été une force motrice pour la promotion de l’environnement et d’un cadre de vie sain pour les populations européennes : réduction des pesticides, lutte contre la pollution de l’air, et dernièrement restauration de la nature promettaient quelques progrès une fois les textes mis en œuvre. La pandémie de covid 19 elle-même n’a pas fait disparaître cette préoccupation, le lien entre enjeux environnementaux et sanitaires étant régulièrement souligné.

L’impact de la montée de l’extrême-droite sur le traitement de la question environnementale.

Les élections européennes de 2024 se présentent sous un tout autre jour. Les impacts du changement climatiques continuent de se faire sentir (en témoignent les sècheresses puis inondations de 2023 en France), mais le traitement médiatique et politique du sujet a évolué. Le paysage médiatique, marqué par la domination de l’extrême-droite sur de plus en plus de chaînes, assume désormais le retrait d’émissions phares sur l’environnement même hors de ces chaînes[2].

La récente crise agricole, déclenchée par les conditions de vie de plus en plus dégradées d’une partie du monde paysan, a été l’occasion d’un écologie-bashing totalement déconnecté des causes du problème soulevé par les agriculteurs, avec la bénédiction du gouvernement[3].

Le coup d’envoi de ce recul semble avoir été sifflé en France par le président Macron, qui appelait de ses vœux une « pause » dans la protection de l’environnement en juin 2023, comme Sarkozy, après le Grenelle de l’environnement, assumait que « l’écologie, ça commence à bien faire ».

Sur ce sujet comme sur d’autres, Emmanuel Macron a ainsi repris certaines postures de la droite voire de l’extrême-droite, permettant du même coup la normalisation d’antiennes anti-environnementales ; comme si le maintien des conditions de vie humaine sur terre était une mode politique à ressortir uniquement en temps favorables.

Que s’est-il passé pour que le paysage politique et médiatique passe ainsi d’une reprise massive des thèmes de l’écologie – souvent cependant au prix d’un greenwashing politique[4] – à un anti-environnementalisme décomplexé ?

Néolibéralisme et néofascisme alliés objectifs contre l’environnement?

Alors que le niveau de vie d’une grande partie de la population française continue de se dégrader, que le nombre de personnes émargeant à l’aide alimentaire explose[5] et que le nombre de sans abri n’a jamais été aussi élevé[6], la poursuite de politiques néolibérales (réforme des retraites, de l’assurance chômage…) se fait au prix d’un durcissement de la parole et de l’action politique non seulement à l’encontre des parties les plus défavorisées de la population (les immigrés et le prétendu ensauvagement pointé par Darmanin, les plus pauvres et les prétendus assistés), mais aussi des partis de gauche et écologistes.

Depuis l’élection présidentielle de 2022, l’ennemi désigné auquel s’applique le barrage républicain est parfois devenue la gauche qui propose des mesures réellement transformatrices en faveur de la justice sociale et environnementale. Car pour que les nécessaires transformations en faveur de l’environnement deviennent réalité, elles doivent être accompagnées de mesures sociales fortes – ce à quoi ne peut se résoudre le logiciel néolibéral d’Emmanuel Macron.

Du barrage à l’extrême-droite, fonds de commerce de Macron depuis 2017, nous passons à un front anti-environnement : le gouvernement n’hésite pas à grimer les militants environnementaux en terroristes ou à réprimer violemment des manifestations pacifistes, comme le week-end dernier la manifestation contre le méga-entrepôt Greendock à Gennevilliers. Il n’a pas hésité à adopter, avec le soutien de la droite, une « Loi d’orientation agricole » qui consacre les pires régressions en matière d’environnement depuis vingt ans[7].

Dans cette nouvelle décomposition politique, le Rassemblement national se retrouve un allié objectif de la politique conduite par Emmanuel Macron, comme dans le vote de la loi immigration. Des lors, dans la campagne des européennes où la majorité présidentielle met de nouveau en scène son opposition au RN, la recette ne fonctionne plus, du fait de ce brouillage des frontières.

Les élections européennes pourraient être l’occasion d’un vote sanction pour la majorité présidentielle, qui perd, au profit de certaines listes de gauche et du centre, les électeurs choqués par la désignation de la gauche et de l’écologie comme ennemi à battre, laissant un boulevard à l’extrême droite.

L’abstention, elle, donnerait raison aux calculateurs courtisant seulement la partie la plus âgée et donc mobilisée du corps électoral. Seule une mobilisation massive du peuple de gauche dans les urnes, au profit d’une des nombreuses listes portant la sauvegarde de l’environnement et la justice sociale[8], pourrait constituer une sanction a la politique néolibérale et autoritaire d’Emmanuel Macron.

[1] https://www.liberation.fr/debats/2019/12/01/l-ecologie-conviction-versus-action_1816037/

[2] https://vert.eco/articles/pourquoi-radio-france-et-france-tv-suppriment-ils-des-emissions-sur-lecologie

[3] https://blogs.mediapart.fr/collectif-chronik/blog/150224/la-fnsea-ou-l-impossible-sortie-de-crise-du-monde-agricole

[4] https://blogs.mediapart.fr/collectif-chronik/blog/070422/greenwashing-et-politique-le-bilan-environnemental-demmanuel-macron

[5] https://www.20minutes.fr/societe/4077964-20240226-don-alimentaire-cumule-crises-banque-alimentaire-vu-nombre-beneficiaires-exploser

[6] https://fr.statista.com/statistiques/1008917/nombre-sdf-france/

[7] https://fne.asso.fr/actualites/loa-la-porte-ouverte-aux-destructions-environnementales

[8] https://fne.asso.fr/actualites/le-9-juin-choisissez-l-europe-que-vous-voulez#widget

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