Le pot - de confiture, ou de pourriture, selon l’expérience de chacun - de 2014 n’est pas encore fini, sa date de péremption même pas atteinte, que certains se ruent déjà sur celui de 2015. Alors qu’il ne figure pas en rayon, ils tentent de se le procurer coûte que coûte, sous le manteau en échangeant des branches de houx, ou en avant première lors de ventes privées.
Bande de consommateurs ! Enfants gâtés, enfants gâcheurs !
Une fois leur forfait commis, ils ne s’arrêtent pas là. Ils veulent découvrir son contenu. Mais le pot 2015 résiste. A l’instar de ses prédécesseurs il n’a aucune envie de se faire violer. Il dévoilera ses saveurs et sa composition au compte-gouttes, à partir du 1er janvier à 0h, point. Têtus, jouant sur les possibles variations du calendrier et les décalages horaires, les accros du futur tentent de forcer son ouverture, d’exploser son couvercle. A coups de mails, de cartes fleuries, de « Meilleurs voeux ! » par anticipation. Histoire d'attraper la saveur avant l’heure, de peur qu’elle ne se sauve. Ou qu’elle déçoive. A moins que ce ne soit pour prendre de l'avance sur le pot de temps qu’il leur reste, de moins en moins garni, rempli.
Depuis Noël déjà la mixture de 2014, gélatineuse et quasi transparente à force de flirter avec l'oubli, leur paraît moche et sans attrait. Plus envie. Ecœurés, ils sont, par les effluves moisis qui leur sautent à la gorge comme des diables farceurs à chaque nouvelle ouverture du vieux pot. Pourtant, 2014, comme d’autres avant elle, a fait de son mieux. Elle a séduit les uns, dégoûté les autres, elle a provoqué son lot d’allergies, de naissances et de morts. La plus belle conserve du monde ne conserve que ce qu’elle peut.
Par pitié, comportons-nous en adultes. Vidons notre pot de 2014 ! Pensons à tous ceux qui n’en ont pas, ou qui n’en ont plus. S’il était bon, raclons ses restes, couchons-les avec amour sur une brioche moelleuse, jouissons-en jusqu’à la dernière bouchée. S’il était décevant, voire franchement dégueulasse, laissons-le bien en vue sur une étagère et regardons-le, sans ciller. Oublions les résolutions que ce salaud là nous a empêchés de tenir, car évidemment TOUT est sa faute. Et attendons patiemment sa désintégration. Programmée.
Plus que quelques jours... et nous pourrons goûter le pot de 2015 qui s’ouvrira, ô miracle, comme une fleur.