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Billet de blog 19 février 2021

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Les Morts Pays - Tu ne souriais pas (Poésie)

Ange tu m’as suivi et personne n’a dit ton nom vois comme ils sont morts et parmi ceux qui sont morts encore vivants ceux-là qui veulent et tentent de tout leurs squelettes de se hisser à la hauteur d’un enfant

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Tu ne souriais pas

Ange tu m’as suivi

et personne n’a dit ton nom

vois comme ils sont morts et parmi ceux qui sont morts encore vivants ceux-là qui veulent et tentent de tout leurs squelettes de se hisser à la hauteur d’un enfant, vois, les derniers poètes de l’Attente et si tu vas là-bas au creux de la désolation alors tu contempleras et leurs mains tendues posées-là en guise de présentation et ce rien qu’elles détiennent te saisir pour qu’en toi puisse germer - irréalisable comme une idée - l’image d’un sourire

Ange tu m’as suivi

et personne n’a dit ton nom

entre tes mains tu tiens toujours ce rien ou la révélation déjà malade déjà mourante car tu savais ton esprit un oeil de fourmi brillant sur une feuille emportée par le vent qui toujours s’en va te cueillir mais tu savais soumise en principe à toi, la représentation, être chose aussi fébrile qu’oiseau tombé du nid et ton message déjà plus léger que plume auparavant envolée très loin de la pitié tu savais tout cela

Ange tu m’as suivi

et personne n’a dit ton nom

Ces mains - elles ont perdu leur chemin vers le Père - tu les trouveras ainsi dorénavant seules c’est à peine si elles ont pâli et elles voudraient trembler et ne peuvent ni trembler ni vouloir et ton regard se fane à mes côtés murmure un appel comme - l’esquisse inespérée quoiqu’invisible ou l’ébauche imperceptiblement ratée sur ta joue plutôt que rien - une impossible consolation puisque, puisque tu as déposé ton épieu puisque sur mes habits le sang de ton ennemi n’a pas attiré ton attention puisque déjà un piège très doucement a été refermé

Ange tu m’as suivi

et personne n’a dit ton nom

des chiens aux portes de l’autre monde ont mordu tes chairs heureux laissé ton corps un amas de lambeaux à peine présentable pourtant - n’est-ce pas ceci le pieux ensauvagement des hommes et des bêtes? - ce visage ensanglanté miséricorde c’est encore le tien qui arbore indésirable inattendu enfin le sourire impossible, Ange, ton sourire conquis sur ta création je veux dire sur ta destruction, Ange, un sourire dément un sourire tel qu’aucun marbre - rebelle ou non importe peu ici - n’en accueillera jamais dans son église

Ange tu m’as suivi

et personne n’a dit ton nom

demain je porterai ton cadavre offert jusqu’en bordure de la ville et le jetterai comme ça sans crainte que des corbeaux n’abîment ta conquête les hommes qui passeront tout près ne remarqueront d’abord assurément qu’une forme blanche puis on approchera un peu pour la comprendre l’inimaginable qu’est ta charogne de joie et de douleur incarnées mais les anges ne sourient pas ainsi comme des bêtes diront les curieux avec raison, nous, nous ne pouvions autrefois vouloir imaginer cela ainsi et voilà que nous, les hommes, désormais imagineront - peut-être grâce à toi - le Vouloir.

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