A l’échelle collective
Dans le prolongement d’un billet précédent : Travail et argent : le couple infernal[1], je m’appuie sur les compétences économiques et sociales de Bernard Friot, pointées par un complément (en commentaire) de mes propositions. Je n’ai pas le niveau d’expertise de cet économiste. Je m’appuie volontiers sur ses propositions, qui m’apparaissent compatibles avec mes valeurs humaines[2].
Proposer des perspectives est un impératif permettant de faire advenir un nouveau consensus collectif, digne de l’humanité d’aujourd’hui. A défaut, nous laisserions la direction de la destinée collective à des idéologies et des décideurs, manifestement inopérants, cyniques et suicidaires.
De l'interview de Bernard Friot chez Thinkerview, je retiens particulièrement les points suivants :
- la prise de conscience trop souvent esquivée que le système économique construit par le capitalisme, nous maintient dans l'indignité intériorisée depuis l'école,
- que le changement de paradigme passe par le renversement de cette emprise, en considérant, enfin, que c'est nous toutes et tous qui créons la dynamique sociale et économique et donc en avant le mérite.
- que la reconnaissance et le salaire sont attachés à la personne, pas au poste ou à la position qu'elle occupe (Bernard Friot défend le salaire à la qualification, et non le salaire universel, qui ne change pas le statut d'esclave du marché du travail, ou dit plus vulgairement de "chair à patrons")
- la propriété d'usage des moyens de travail et de production par celles et ceux qui œuvrent ; et donc la capacité de participer, de nourrir les décisions de stratégie économique (Donc la possibilité de les orienter dans un sens humain, de réorienter l’économie vers un respect des personnes et du vivant.)
- la propriété patrimoniale des biens communs, moyens de travail et de production, aux collectivités aux échelles où s'exercent les activités, communales, régionales, etc... (Il est contre une étatisation, mais pour une localisation, régionalisation ou nationalisation, en laissant les décisions aux acteurs économiques eux-mêmes.)
- cette évolution, déjà amorcée notamment en France par le statut des services publiques, dont celui de la santé (et qui l'on cherche à déconstruire, à dilapider...) est source d'une nouvelle évolution. Le libéralisme économique, ayant constitué en son temps une évolution, mais contenant une idéologie absurde et destructrice (emprise sociale, mépris des impacts écologiques, exploitation de la misère...), il doit être aujourd'hui dépassé.
- la démographie n'est pas un problème en soi. La décroissance peut être largement amorcée sans restriction ; la moitié des biens et services actuellement produits étant parfaitement inutiles et même trop souvent nuisibles.
- l’école ne doit pas être celle de la mise au pas sociale (par les notes, l'orientation...), mais de la construction de la co-responsabilisation.
...
J'invite chacune et chacun se faire une opinion : https://www.youtube.com/watch?v=zrS-OkFTLkc
A l’échelle individuelle
En anticipation de mon prochain billet (qui s’intitulera : Besoins humains : une telle confusion), je me sens fondé à faire les propositions suivantes :
- Chacun(e) de nous crée et bénéficie réellement des services et biens par nos liens avec nos semblables et l’ensemble du vivant. Ces biens et services sont créés et mis à disposition pas seulement de manière marchande (ce que voudrait l’imposer le dogme économique actuel « capitaliste, libéral et matérialiste »). Des ressources et services communs comme celui de la santé en France, ont un coût et un accès mutualisé. Des ressources et services universels sont bel et bien fournis (encore) gratuitement par la nature.
- Nous avons donc une action directe. Il n’est pas nécessaire de se prétendre engagé(e), et encore moins radicalisé(e) pour agir concrètement de manière physique, psychologique et sociale.
- Nos actions ont un champ, certes, limité à notre rôle social présent, mais nos liens profonds, y compris en pensées, dépendent de nos valeurs de nos aspirations.
- Nous pouvons décider de prendre soin de nous-même. Qui peut le faire à notre place ? Cela sera suivi d’effet, forcément positifs, avec l’aide des autres, suffisamment de discernement et un peu de persévérance. Nous pouvons sortir, dans la bienveillance, de la victimisation…
- Nos besoins sont physiques bien sûr. Mais aussi, dans une large mesure, ils sont psychologiques et sociaux. Ces derniers étant satisfait, nous bénéficierions de la sécurité matérielle de base totalement indispensable pour se comporter humainement.
- Exiger le respect de notre nature humaine est à la fois un droit (vis-à- vis de soi) et un devoir (vis-à-vis des autres), comme toute exigence sociale légitimée, à un moment de l’évolution de l’humanité.
- Tous les jours, nous pouvons réfléchir et agir dans un sens positif, améliorer -certes patiemment mais objectivement notre sort - et contribuer – même modestement - à l’avènement d’évolutions collectives aujourd’hui reconnues par (presque) toutes et tous, comme impératives.
- Nous pouvons être inspirants, coopératifs et bienfaisants les uns des autres. C’est en tout cas le sens de ces propositions…
Yves Robert, écologue et auteur
https://www.editions-maia.com/livre/prendre-pleinement-part-a-la-vie/
[1] https://blogs.mediapart.fr/culturenature71/blog/080723/travail-et-argent-le-couple-fatal
[2] https://blogs.mediapart.fr/culturenature71/blog/050723/la-pollution-un-homicide-volontaire-avec-premeditation