Un article de RFI nous informe de la scission des FDLR au Kivu (voir ici).
Cet article se trouve confirmé, et précisé, par celui d'un journaliste indépendant, écrivant sous le pseudonyme de Apprenti Pasteur, dont les articles sur Facebook témoignent régulièrement d'une capacité d'information bien sourcée et fiable (sa page facebook).
Celui-ci affirme qu'un pays européen soutiendrait cette scission, et en corollaire la création d'un parti moins militaire et plus politique : le CNRD, Conseil National pour le Renouveau et la Démocratie.
Précision à l'usage des non-initiés : le FDLR est le mouvement né de la fuite des Interahamwe du Rwanda (la milice génocidaire du gouvernement) lorsque le pays fut libéré par le FPR dirigé par Paul Kagame.
C'est un mouvement basé sur des principes clairement ethnistes et revanchards, dont l'objectif (plus ou moins exprimé) depuis 21 ans est de reconquérir Kigali, et de terminer le travail (i.e. le génocide).
Ce nouveau parti, issu d'une scission désirée par une jeune génération en quête de reconnaissance et de légitimité, n'est sans doute pas moins ethniste et plongé dans la haine des tutsi. Mais il saura le cacher avec un sens de la diplomatie mieux adapté aux temps présent et à venir (où l'on se doit de mettre les formes, y compris sur le continent africain...).
La question qui ne manque de se poser, c'est : quel est le pays européen qu'Apprenti Pasteur déclare ne pas vouloir nommer ? Ma crainte, toute personnelle et ne se basant que sur un mauvais pressentiment (et le sens de l'histoire, malheureusement), c'est que ce soit la France. Entendons-nous : la France, quelle France ? Pas tout le peuple français. Mais quelques nostalgiques du gouvernement génocidaire, très largement aidé entre 1990 et 1994, au point que l'armée française sous couvert d'une mission onusienne s'est fait fort d'aider à la fuite des génocidaires au Kivu, en RDC, lorsqu'il fut avéré que le FPR allait remporter la victoire au printemps 1994 (fuite qui se trouve être à l'origine du désastre militaire, social et humanitaire de cette région). Ces nostalgiques existent. Ils détestent Kagame, en partie parce que celui-ci est anglophone (toujours l'ombre de Fachoda, mais aussi en raison des intérêts mêlés, linguistique, politique et économique), en partie parce que son armée les a humiliés à plusieurs reprises, en partie parce qu'ils ne supportent pas qu'un africain leur tienne tête – et sans doute pour d'autres raisons plus ou moins avouables.
J'avance sans plus de précaution cette conviction, car par surcroît j'ai du mal à imaginer quel autre pays européen s'amuserait à venir en aide aux génocidaires rwandais… Pour les raisons énumérées ci-dessus, il semble que ce soit le seul à s'y intéresser au point de s'y compromettre.
(Au sujet de ce qu'il convient de nommer sans exagération une particularité française, il reste à se poser - une fois encore - la question de son impensé post-colonial… Sans même remonter jusqu'à l'antisémitisme anti-dreyfusard dont d'aucuns font l'origine des droites extrêmes européennes, il convient de s'interroger sur le refus de certains groupes de tourner la page de l'Empire colonial. En témoignent si besoin était les révélations par Anne Guérin-Castell de l'apologie des crimes de l'OAS dans son dernier article ).
Dans l'attente d'être confirmé dans ma crainte, ou bien – je l'espère par affection pour ma patrie – de la voir démentie, ce qui semble avéré, en tous les cas, et très dangereux pour la région en général et le Rwanda en particulier, c'est la naissance de ce parti, un peu à l'image du CNDD-FDD burundais, c'est-à-dire masquant derrière une façade toute rassurante une haine implacable, un désir de revanche et de sang…