Il est difficile d’écrire sur la Russie en ce moment, sinon pour répéter l’évidence d’une dictature engagée dans une guerre de conquête, une guerre impérialiste d’une autre âge, imbécile, inhumaine, coupable et espérons-le vaine. Ou cette autre évidence d’une population pour partie abusée par la propagande et la désinformation, pour partie victime de la répression, pour partie passive ou même complice de ceux qui ont décidé de la guerre et de la mort. Il est difficile aussi de le faire en restant dans la thématique de ce blog, le social, parce que les informations me manquent, et que celles que je trouve me semblent obscures.
Je voudrais continuer cependant, je le fais avec un billet plus facile à écrire, le commentaire d’un sondage. Ce sondage n’a pas été publié, mais Meduza, un média internet respectant les règles et la déontologie du journalisme, indique avoir eu connaissance des résultats, et y a consacré cet article il y a trois jours. L’information n’a pas été reprise, à ma connaissance, dans la presse française, sinon ici, par LCI, avec un commentaire de Galia Ackerman.
Il a été réalisé par l’institut d'État VTsIOM pour le compte de l’administration présidentielle russe. La question posée était la suivante : « Certains disent que les combats en Ukraine devraient être arrêtés dès que possible. D'autres pensent qu'il ne faut pas arrêter les combats maintenant. De quel point de vue êtes vous le plus proche ? ».
30 % des répondants souhaiterait l’arrêt des combats en Ukraine, 57 % indiquent qu’ils doivent se poursuivre. Ces ordres de grandeur sont connus, peut-être à relativiser : on sait le risque que l’on peut penser avoir dans un pays totalitaire à répondre à une telle question autre chose que ce qui est attendu par le pouvoir.
Mais le plus important de ce que publie Meduza n’est pas dans ce résultat global, mais dans la distribution des réponses en fonction de l’âge. Dans la tranche d’âge des 18-24 ans, 56% sont favorables à la fin de la guerre, et seulement 19% sont favorables à sa poursuite. Dans celles des 25-34 ans 43 % souhaitent l’arrêt des hostilités, 41 % leur poursuite. Plus les répondants sont âgés, plus ils pensent qu’il n’y a pas à arrêter les combats, cette proportion atteignant 70 % pour les plus de 60 ans.
L’autre enseignement du sondage est la relation entre la principale source d’information des répondants et leurs réponses. Parmi ceux qui s’informent sur internet, 47 % des personnes interrogées sont favorables à la fin des hostilités, et 35 % sont favorables à leur poursuite. Ces taux sont respectivement de 22 % et de 68 %.
Enfin, à Moscou et à Saint-Pétersbourg, environ 40% des personnes interrogées souhaitent la cessation des combats et 48% leur continuation. Dans les autres villes de plus d'un million d'habitant, ce dernier chiffre est de 62 %, Meduza ne donne pas les résultats pour les villes moyennes et les zones rurales, c'est sans doute parce qu'il va de soi que l'adhésion à la guerre y est supérieure. Cela reste à vérifier.
Ces lignes de partage sont celles qui traversent la société russe, on les a rencontrées à plusieurs reprises dans ce blog. De la façon dont elles vont se déplacer dépend maintenant la vie et la mort, la guerre et la paix.