Daniel Salvatore Schiffer (avatar)

Daniel Salvatore Schiffer

Philosophe, Ecrivain, Professeur de Philosophie de l'Art

Abonné·e de Mediapart

333 Billets

0 Édition

Billet de blog 29 mai 2015

Daniel Salvatore Schiffer (avatar)

Daniel Salvatore Schiffer

Philosophe, Ecrivain, Professeur de Philosophie de l'Art

Abonné·e de Mediapart

François Hollande au Panthéon: un discours qui entrera dans l'Histoire

Pierre Brossolette, Geneviève De Gaulle-Anthonioz, Germaine Tillion, Jean Zay : quatre humbles mais magnifiques héros de la Résistance, deux hommes et deux femmes (parité oblige!), auxquels François Hollande a rendu, ce mercredi 27 mai 2015, un émouvant et vibrant hommage lors de leur entrée, aussi justifiée que méritée, au Panthéon.

Daniel Salvatore Schiffer (avatar)

Daniel Salvatore Schiffer

Philosophe, Ecrivain, Professeur de Philosophie de l'Art

Abonné·e de Mediapart

Ce blog est personnel, la rédaction n’est pas à l’origine de ses contenus.

Pierre Brossolette, Geneviève De Gaulle-Anthonioz, Germaine Tillion, Jean Zay : quatre humbles mais magnifiques héros de la Résistance, deux hommes et deux femmes (parité oblige!), auxquels François Hollande a rendu, ce mercredi 27 mai 2015, un émouvant et vibrant hommage lors de leur entrée, aussi justifiée que méritée, au Panthéon.

Le Panthéon : monumentale mémoire historique et collective de la France dans ce qu'elle a de meilleur, ainsi que l'a rappelé très justement le Président de la République.

Comment, du reste, ne pas s'incliner avec un immense respect, auquel vient se mêler un non moins intense sentiment de gratitude, devant ces êtres qui auront ainsi sacrifié leur vie, sans rien attendre en retour, ni gloire ni pouvoir, pour cette valeur suprême qu'est celle, imprescriptible, de la liberté ?

CONSCIENCE HISTORIQUE ET EXIGENCE INTELLECTUELLE

François Hollande, lui-même ému, l'a clamé haut et fort lors de ce discours solennel, ciselé et précis, où le lyrisme des quelques envolées verbales n'avait d'égale que la rigueur des mots comme la justesse du ton : ces quatre héros de la Résistance sont admirables sans avoir cherché à être admirés ; ils sont aujourd'hui reconnus sans pourtant avoir jamais voulu être connus ; ils sont enfin célébrés sans avoir cependant imaginé qu'ils auraient pu être un jour célèbres. Superbe de vérité, de profondeur et de modestie tout à la fois, ces formules frappées au coin de la conscience historique la plus claire et limpide, la plus authentique ! Bon nombre de nos pseudo-intellectuels, trop souvent avides de plateaux médiatiques tout autant que de notoriété publique, de seuls effets de mauvaise manche, devraient en tirer, tel un précieux enseignement, l'exigeante mais féconde leçon de vie !

Oui : cet historique discours de François Hollande, contrairement à ce que prétendent certains esprits chagrins, outrageusement partiaux, n'avait parfois rien à envier, dans son élégante simplicité, dans le choix des termes employés, à celui, gravé dans les mémoires, d'André Malraux, en 1964, lorsqu'il accueillit, avant que les portes de bronze de ce même Panthéon ne s'ouvrirent devant lui, Jean Moulin et son terrible cortège.

Davantage : ce discours de François Hollande - discours de haute tenue intellectuelle et de grande rigueur morale face à la Nation recueillie, concentrée et unie - ne résonnait pas là moins bien, sur les pavés de cette place des Grands Hommes, que celui, prononcé il y a quelques semaines à peine (et que je saluai alors d'une manière tout aussi chaleureuse http://leplus.nouvelobs.com/contribution/1305865-video-charlie-hebdo-le-discours-de-valls-a-l-assemblee-nationale-fut-emouvant-et-beau.html), de Manuel Valls sur les bancs de l'Assemblée Nationale, lorsqu'il y fit, au lendemain de la tragique tuerie de Charlie Hebdo, l'éloge de ce mémorable, inextinguible pour toute conscience humaine digne de ce nom, esprit du 11 janvier.

COMMENT TOLERER L'INTOLERABLE ?

Le Président comme le Premier-Ministre, du reste, ont tous deux raison : le grand ennemi de l'époque contemporaine, le grand malheur de nos temps prétendument modernes, c'est l'indifférence : l'indifférence face à la détresse des populations les plus pauvres, tels les migrants de la Mer Méditerranée ; l'indifférence face au martyre des peuples dont la foi religieuse, à l'instar des chrétiens d'Orient, se voit massacrée par les hordes sauvages, barbares et fanatiques, de l’État islamique ; l'indifférence face, en général, à l'incommensurable, inacceptable, misère du monde.

Oui : il est certain que ces quatre héros de la Résistance à laquelle la France tout entière vient de rendre un magnifique et juste hommage réagiraient aussi aujourd'hui, avec un même courage et une identique lucidité, mus par une même éthique de responsabilité et portés par une même force de conviction, afin de soulager un tant soit peu la souffrance des hommes et des femmes. C'est cela l'humanisme correctement entendu, compris en sa véritable dimension !

Car, comme l'a encore dit Hollande lors de cette belle et poignante cérémonie, comment expliquer l'inexplicable ? Comment comprendre l'incompréhensible ? Comment nommer l'innommable ? Et, me permettrais-je d'ajouter pour ma modeste part, comment tolérer l'intolérable ?

"LES REPUBLICAINS" DE SARKOZY: HOLD-UP IDEOLOGIQUE, ARNAQUE SEMANTIQUE ET IMPOSTURE POLITIQUE

Certes, pourront toujours répliquer ses détracteurs, le Président de la République n'avait pas à s'emparer là, lors de ce discours solennel, qui se voulait rassembleur et prônant des principes universels, de la conduite exemplaire de ces quatre hérauts de la Résistance, patrimoine culturel et idéologique français dans son ensemble, pour justifier ainsi, déviant alors indûment de sa transcendantale trajectoire vers les bas chemins de sa propre et seule actualité politique, quelques-uns des aspects, telle la réforme scolaire (Najat Vallaud-Belkacem, Ministre de l’Éducation Nationale, grande admiratrice de Jean Zay, devait être aux anges), de son programme gouvernemental. A quoi il ne me sera guère malaisé de répondre, avec une même assurance intellectuelle, que ceux qui, tel Nicolas Sarkozy, osent baptiser un simple parti du nom de « Républicains », patrimoine non moins national et appartenant à tous les Français, théoriquement sans exclusive partisane ou politicienne, insultent là tous ceux qui, préconisant pourtant eux aussi très sincèrement les mêmes valeurs démocratiques et républicaines, ne voteront pas nécessairement, lors du prochain suffrage présidentiel, pour eux.

Pis, et plus dramatiquement encore : ce hold-up idéologique qui ne dit pas son nom, cette indue et abusive appropriation d'ordre philosophique, cette arnaque sémantique, véritable imposture politique et pour de médiocres raisons d'opportunisme électoraliste de surcroît, est une insulte, aussi injustifiable historiquement que condamnable moralement, sinon tout bonnement insupportable sur un plan plus strictement humain, à la République elle-même, en principe une et indivisible !

DANIEL SALVATORE SCHIFFER*

* Philosophe, auteur de « Critique de la déraison pure – La faillite intellectuelle des 'nouveaux philosophes' et de leurs épigones » (François Bourin Éditeur), «  Oscar Wilde – Splendeur et misère d'un dandy » (Éditions de La Martinière), « Lord Byron » (Gallimard-Folio Biographies).    

Ce blog est personnel, la rédaction n’est pas à l’origine de ses contenus.