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Billet de blog 23 août 2025

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Croissance démographique, plus usage considérable des plastiques : péril planétaire !

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Le piège des océans

Une bouteille jetée, un sac abandonné, une fibre arrachée : les déchets plastiques, livrés à la mer, entament une errance interminable. Les courants de la Terre les happent, les rassemblent, les enferment dans des gyres colossaux.
Ainsi se forment des continents artificiels : dans le Pacifique Nord, une nappe de déchets de 3,6 millions de km² ; dans l’Atlantique Nord, une masse équivalente à deux ou trois fois la France. L’humanité, sans le vouloir, a inventé de nouveaux territoires, faits de ses rebuts.

Une matière devenue tyrannie

Le plastique est partout. Dans nos habits, nos cuisines, nos voitures, nos jeux, nos écrans, nos bouteilles et nos emballages jetables. Nous en avons fait la matière de la commodité et de l’oubli. Mais chaque objet de plastique à usage unique est une dette contractée avec l’avenir. Une dette que ni la nature ni les générations futures ne pourront solder.

Les invisibles, ultimes fragments

Quand le plastique se brise, il ne disparaît pas. Il se fait poussière : des microplastiques, si légers qu’ils circulent avec les vents, si tenaces qu’ils traversent les océans, si insidieux qu’on les retrouve dans les neiges de l’Arctique, sur les cimes de l’Himalaya, jusque dans nos corps. Nous respirons, nous buvons, nous mangeons du plastique. Il est déjà en nous.

L’heure du sursaut

Il ne s’agit plus seulement de nettoyer des plages, ni même de réduire des déchets. Il s’agit de rompre avec une dépendance, de changer nos modes de production, de consommation, d’imaginer un monde libéré de ce fardeau artificiel. Chaque bouteille évitée, chaque sac refusé, chaque emballage remplacé est un acte de résistance.
Nous savons. Nous voyons. Nous ne pouvons plus dire que nous ignorons.

Le plastique est devenu le miroir de notre époque : un monde de facilités immédiates et de conséquences différées. Il est temps de briser ce miroir avant qu’il ne nous engloutisse.

L’étude de la Commission européenne montre que la moitié des déchets retrouvés sur les plages européennes (et donc potentiellement en mer), sont des plastiques à usage unique. Le tableau suivant indique le nombre d’échantillons retrouvés de chaque article, pour les 10 premiers déchets retrouvés sur les plages européennes (Source : Eunomia, based on JRC data, 2016)

Les microplastiques. Ce mot dit déjà l’infiniment petit, l’invisible, le fragment insidieux. Ces particules minuscules, échappées de nos déchets, ne connaissent ni frontières ni limites : elles flottent dans les airs, se glissent dans les nuages, retombent sur les neiges immaculées de l’Arctique ou se déposent, invisibles, sur les cimes de l’Himalaya. Elles voyagent au gré des vents, circulent entre mers et atmosphère, participent aux échanges planétaires comme des passagers clandestins d’un cycle infernal.

Or, les chercheurs l’affirment : ces poussières de plastique, à l’instar du noir de carbone, absorbent la lumière du soleil. Elles emprisonnent la chaleur et alimentent l’effet de serre, aggravant le réchauffement climatique. Une contribution sournoise, silencieuse, mais qui s’ajoute à l’immense mécanique du dérèglement en cours.

Et pourtant, malgré les alertes, malgré les chiffres qui s’accumulent comme des preuves irréfutables dans un procès sans juge, nous continuons à fermer les yeux. Dans les trente prochaines années, la masse des déchets plastiques devrait doubler, portée par l’expansion démographique et la logique consumériste. Les scientifiques préviennent : si rien n’est fait, les microplastiques deviendront l’un des acteurs majeurs du bouleversement climatique. Mais que valent leurs mises en garde face à l’inertie des États, face à la toute-puissance des lobbys ? L’échec retentissant de la dernière conférence internationale sur la pollution plastique n’a fait que confirmer le scénario : encore une fois, les pays producteurs d’hydrocarbures et les géants de la pétrochimie ont dicté leur loi, sacrifiant l’avenir de l’humanité sur l’autel de leurs rentes.

Comme pour les COP climat, l’histoire semblait écrite d’avance. Depuis le début de la civilisation thermo-industrielle, les négociations internationales ressemblent à des mascarades. Les puissants, qui détiennent les matières premières et les moyens de transformation, possèdent aussi l’arme ultime : l’argent, et donc l’influence. Ils transforment chaque table de discussion en théâtre d’ombres où les régulations se négocient à coup de compromissions, afin de prolonger un système qui nous entraîne vers l’abîme.

Quelques vérités crues, qu’il faut dire sans détour :

Le plastique est fils du pétrole. Chaque sac, chaque bouteille, chaque emballage est un concentré de combustibles fossiles. Déjà 6 % de la consommation mondiale de pétrole ; demain, 20 %. Produire du plastique, c’est donc d’abord extraire, distiller, transformer, brûler. Et relâcher toujours plus de gaz à effet de serre.

Le recyclage ? Une illusion confortable. Moins de 10 % des plastiques sont réellement recyclés dans le monde. Le reste, près de 91 %, finit sa course dans les décharges, les sols, les rivières, les océans. En Asie du Sud, ce sont 26 millions de tonnes jetées chaque jour, dont une immense partie échappe à tout contrôle. Le polyéthylène, polymère roi de notre modernité jetable, relâche méthane et éthylène lorsqu’il se fragmente sous le soleil.

Les mers, poubelles planétaires. Chaque minute, l’équivalent d’une benne à ordures de plastique y est déversé. Ces fragments étouffent le plancton, affaiblissent son rôle vital : absorber le carbone de nos excès. Moins de plancton, c’est plus de CO₂ dans l’atmosphère. C’est la chaîne du vivant tout entière qui chancelle.

L’incinération sauvage, fléau invisible. En Inde, au Népal, ailleurs encore, des millions de tonnes de déchets sont brûlés à ciel ouvert. Le noir de carbone ainsi libéré a un pouvoir de réchauffement jusqu’à 5000 fois supérieur à celui du CO₂. Voilà l’air que respirent des villes entières, voilà le brouillard qui recouvre Delhi.

Le poids de la démographie

À cela s’ajoute le poids de la démographie. Avec ses 450,4 millions d’habitants en 2025, l’Union européenne (à 27) regroupe environ un humain sur quinze (7 %). En 2050, ce sera un sur vingt (5 %). La France, avec ses 68 millions d’habitants, en compte un peu moins d’1 % aujourd’hui, et cette proportion devrait encore diminuer (0,8 %) d’ici 2050.
En 2022, chaque habitant de l’UE a produit en moyenne 36,1 kilos de déchets plastiques d’emballage, soit près de 8 kilos de plus par personne qu’en 2012. Au total, 16 millions de tonnes de déchets plastiques ont été produites cette année-là dans l’Union.

Si l’Europe vieillit et stagne, ailleurs la population explose. L’Afrique pourrait quadrupler d’ici 2100 : un habitant sur trois de la planète y vivra. Or, chaque humain consomme déjà en moyenne 63 kilos de plastique par an. Additionnez : un milliard d’habitants supplémentaires en une décennie (7 milliards en 2012, 8 milliards en 2022), ce sont autant de milliards de kilos de plastique produits chaque année. Voilà le calcul implacable. Voilà la pente sur laquelle nous glissons. Même si l’Europe vieillit et que son taux de fécondité baisse, sa démographie continuera de croître, et la population mondiale avec elle, entraînant des besoins toujours plus importants, car le désir d’appropriation demeure l’un des plus puissants moteurs de l’être humain.

Alors, comment s’étonner que les océans se saturent, que les glaciers fondent, que les tempêtes se déchaînent ? Comment croire que nous pourrons continuer à produire, consommer et jeter sans fin, sans conséquences ? Les signes sont là, évidents, criants. Les ouragans comme Sandy ou Katrina ne sont plus des anomalies, mais les avant-coureurs d’une ère nouvelle. Les canicules répétées, les littoraux rongés, les catastrophes en chaîne ne sont que le prélude au monde qui vient. Un monde où l’humanité paiera le prix de sa démesure.

Alors, que faire ?
Comme l'écrit Heather Koldewey, chercheuse à la Société zoologique de Londres :
« La véritable question n’est pas de déterminer laquelle de la crise climatique ou de celle de la pollution plastique est la plus critique. Il s’agit de reconnaître que les deux sont interconnectées et nécessitent donc des solutions communes. »

Tout est là. Nous n’avons pas besoin d’un énième sommet, ni de promesses creuses. Nous avons besoin d’un sursaut, d’une révolution des consciences et des actes. Il ne s’agit plus d’atténuer à la marge, mais de couper à la racine : réduire radicalement, interdire certains usages, briser l’emprise des lobbys, sortir enfin de la dépendance aux hydrocarbures, dont les plastiques avec leurs déchets sont issus.

En conclusion

Nous n’avons plus le luxe du temps. Chaque année perdue est un siècle de conséquences. La planète nous parle dans le langage des tempêtes et des incendies. Nous faisons semblant de ne pas comprendre. Mais bientôt, il sera trop tard pour feindre la surdité.

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