Deux articles du Monde du 4 mai m'ont inspiré une réflexion sur un aspect peu souligné de l'engouement pour le "partenariat public-privé".
Le premier, dans la rubrique « Télévision », revient sur une révélation de l’émission « Complément d’enquête » du même jour. Selon ses auteurs, la firme pharmaceutique Pfizer aurait engrangé en 2022 le chiffre d’affaires colossal de 100 milliards de dollars provenant des ventes du vaccin Comirnaty contre le SARS-Cov2 issu de sa collaboration avec la firme BioNTech. Son PDG aurait refusé de répondre aux interrogations d’eurodéputés sur les contrats négociés « en opacité » avec la Commission Européenne. L’UE serait le plus juteux des marchés de ce mastodonte, qui y a écoulé pour 2,4 milliards de doses et augmenté le prix unitaire de 15.50 à 19.50€. L’émission projetterait aussi une lueur sur les agissements passés du laboratoire qui lui a déjà valu des pénalités records en matière de recherche et essais médicaux, dès avant le phénoménal succès, il y a un quart de siècle, du Viagra, ou encore d’incitation au surdosage d’un antalgique cinq ans plus tard. La victoire, du moins partielle, sur le Sars-Cov2, ne saurait absoudre de telles pratiques.
On peut lire plus loin, dans la rubrique « Idées », une demi-page signée, avec cinq de ses prédécesseurs, par Patrick Baudoin, président de la Ligue des droits de l’homme (LDH), en réplique au ministre de l’intérieur parlant de reconsidérer les subventions à l’association suite à ses positions dans les incidents des mégabassines ayant opposé forces de l’ordre et manifestants. Le gouvernement y est vertement accusé d’accumuler les entraves à sa mission de défense des libertés fondamentales. Le renforcement de l’appareil répressif leur apparaît décidé par un président ébranlé par le désaveu massif infligé à la réforme des retraites, aboutie de justesse en cumulant des expédients institutionnels. Des exemples illustrent ce réquisitoire : la mise en cause de la liberté de manifester au prix infligées par la police dans le public suivrait l’instrumentalisation des forces de l’ordre, la systématisation des interpellations préventives irait de pair avec l’asphyxie des associations sous des clauses contractuelles, les technologies de surveillance de masse par drones et caméras prolifèreraient à l’approche des JO, et enfin les droits des étrangers et migrants ploieraient sous la vigilance face à un prétendu « écoterrorisme ».
Le laxisme de l’exécutif européen envers les appétits de multinationales voraces coexiste avec le rigorisme étatique à réprimer la protestation populaire et criminaliser la migration. Plus qu’un populisme mal défini, ne sont-ce pas là les ingrédients jumeaux du déclin démocratique ?