Castellucci se perd dans une performance biblique pour le moins chaotique.
© LUCA DEL PIA
Le sang de l’enfantement ruisselle sur le sol aseptisé des vécés. Des convulsions broient le corps d’une femme qui souffre. Elle tombe inanimée. Est-ce l’impudeur d’un sexe créateur ? L’espace improbable des toilettes ? Ou le tulle ? Qui nous met en position de voyeur froid, avec cette scène d’accouchement naturel ?
La femme est enveloppée d'un drap d’effroi. Dans un bureau de police, un inspecteur l’interroge sur la disparition du bébé. La femme reste muette. Puis une soudaine logorrhée, nous transporte sur le Nil en Égypte. C’est de nouveau l’enfant sauvé des eaux. C’est Moïse. Nous y voilà, le récit biblique naît du théâtre et vice-versa comme le souhaiterait Roméo Castellucci. Mais il y a loin de la coupe aux lèvres dans ce chaos biblique.
Nous sommes maintenant, dans l’imagerie par résonance magnétique, à l’intérieur du corps de la femme. La machine l’avale bruyamment et l’amène dans une tribu troglodyte. Ici se côtoient les décès, les naissances. Les mains positives s’impriment sur la paroi et dessinent un SOS rupestre. Sera-t-elle lue l’empreinte plaintive et y aura-t-il le souvenir d’une alliance divine ?
Le final nous ramène aux sources raphaéliques pour un Castellucci plasticien et performeur. Sommes-nous pour autant convaincus de cette toile vivante ? À force de fuir les mots, pour nous montrer le merveilleux du son et de l’image, le langage castellucien ne nous parvient plus. Pour le coup son buisson ardent, sorte de turbine chevelue, tourne à vide et consume en nous toute croyance en ce sibyllin artifice.
Castellucci dans le livre* « Ces années Castellucci », nous parle, pour définir son travail, de « l’enveloppe d’une bulle de savon, très fragile ». Nous sommes tentés de dire que Castellucci a percé le film arc-en-ciel de cette bulle ; où il se perd entre les fragments de l’art, du théâtre et de Dieu.
*de Jean-Louis Perrier, Les Solitaires intempestifs
Go Down, Moses
Mise en scène, décors, lumières, costumes
Romeo Castellucci
Musique
Scott Gibbons
Textes
Claudia Castellucci et Romeo Castellucci
Collaboration à la scénographie
Massimiliano Scuto
Assistant à la création lumières
Fabiana Piccioli
Responsable de la construction des décors
Massimiliano Peyrone
Sculptures en scène, prosthesis et automatisations
Giovanna Amoroso, Istvan Zimmermann
Collaboration à la conception des costumes
Laura Dondoli
Avec
Rascia Darwish, Gloria Dorliguzzo, Luca Nava, Stefano Questorio, Sergio Scarlatella
Production déléguée
Societas Raffaello Sanzio
THÉÂTRE DE LA VILLE
2 PLACE DU CHÂTELET
PARIS 75004
http://www.theatredelaville-paris.com/spectacle-godownmosesromeocastellucci-740
LOCATION 01.42.74.22.77