Dashiell Donello (avatar)

Dashiell Donello

Je suis un homme libre !

Abonné·e de Mediapart

272 Billets

1 Éditions

Billet de blog 9 mai 2016

Dashiell Donello (avatar)

Dashiell Donello

Je suis un homme libre !

Abonné·e de Mediapart

Samuel Beckett attend-il encore Godot ?

La troupe de Jean-Claude Sachot sert, avec tact et sourire, ce grand dramaturge qu’est Samuel Beckett dans «  En attendant Godot », au théâtre Éssaïon.

Dashiell Donello (avatar)

Dashiell Donello

Je suis un homme libre !

Abonné·e de Mediapart

Ce blog est personnel, la rédaction n’est pas à l’origine de ses contenus.

Illustration 1

Route à la campagne, avec arbre. Soir. Voilà les premières didascalies de la pièce En attendant Godot. Samuel Beckett, en réponse à une lettre de Michel Polac en janvier 1952, prétendait ne pas avoir d’idées sur le texte. Un lecteur qui arriverait à lire la pièce avec attention en saurait autant que lui. La seule chose que Beckett disait savoir, c’est que les personnages auraient des chapeaux melon et qu’ils attendraient un certain Godot.  Il ajoutait qu’il ne savait même pas, si Vladimir et Estragon croyaient ou non à celui qu’ils étaient supposés attendre. D’ailleurs, ni Beckett ni ses personnages ne savaient si Godot existait vraiment. Pour finir sa lettre, il écrivait : «  quant à vouloir trouver à tout cela un sens plus large et plus élevé à emporter après le spectacle, avec le programme et les esquimaux, je suis incapable d’en voir l’intérêt. Mais ce doit être possible ». Assez déroutant non ? 

J’ai lu et vu plusieurs fois En attendant Godot dans ma vie d’homme de théâtre. Selon les dires de l’auteur, j’en sais donc autant que lui. Si j’ai bien lu la pièce, il est question de la Bible, de deux larrons et du Sauveur. Je sais aussi que les personnages de la pièce, ont un temps et un espace où Beckett** ne sera plus jamais. Car dit-il : « Ils vous doivent des comptes peut-être. Qu’ils se débrouillent. Sans moi. Eux et moi nous sommes quittes. ». 

Je lis pourtant au début de la pièce, ces dialogues qui nous questionnent.

Estragon : Quoi ?

Vladimir : Si on se repentait ?

Estragon : De quoi ?

Vladimir : Eh bien… On n’aurait pas besoin d’entrer dans les  détails.

Estragon : D’être né ?

N’est-ce pas là qu’il faudrait chercher le déclic beckettien de En attendant Godot ? Je me souviens qu’il était un fidèle lecteur de la Divine comédie de Dante ; surtout les chapitres du purgatoire et de l’enfer. Le  « Laissez toute espérance, vous qui entrez », dans le chant III résonne chez Beckett comme un sourire ; puisque Vladimir n’ose même plus rire de sa blague d’être né. Si finalement, Beckett en bon dramaturge était Godot lui-même, ayant laissé ses personnages se débrouiller dans une attente qui n’est là que pour eux ?

C’est ce que j’ai ressenti au sortir du théâtre Éssaïon. La troupe de Jean-Claude Sachot a bien raison de servir ce grand dramaturge qu’est Samuel Beckett et, cerise sur le Godot, avec tact et sourire.

* Texte publié aux Editions de Minuit

** Samuel Beckett (1906-1989)

EN ATTENDANT GODOT

De Samuel Beckett

Mise en scène de Jean-Claude Sachot. 

Assistante, Bérengère de Pommerol

Avec Philippe Catoire, Vincent Violette ou Guillaume van't Hoff, Jean-Jacques Nervest et Dominique Ratonnat

Jusqu’au 4 juin 2016

Du jeudi au samedi à 21h30. 

Théâtre Essaïon

6 rue Pierre au Lard

75004 Paris

Tél. : 01 42 78 46 42. 

www.essaion.com

Ce blog est personnel, la rédaction n’est pas à l’origine de ses contenus.