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Billet de blog 10 septembre 2014

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Interview-rencontre avec Pippo Delbono à propos de «Ma mère et les autres» à la Maison rouge

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Ce blog est personnel, la rédaction n’est pas à l’origine de ses contenus.

© DR Pippo Delbono

Delbono entre fiction et réalité

Pour ne pas dévoiler ce que vous pourrez voir à l’exposition, j’ai préféré vous mettre dans la sensation de moments forts qui m’ont interrogé et de vous faire partager cet entretien de l’intérieur avec Pippo Delbono.

La rencontre avec l’artiste est simple et cordiale. Cette interview est venue de photos prises durant la visite guidée de l’exposition. Je devais rester dans le ton de la performance. Cela ne pouvait pas être une interview classique, mais  une continuation du récit poème par le regard et la narration de Delbono.  Des photos prises sur un smartphone défilent devant ses yeux. Je propose à Pippo Delbono de commenter sa propre exposition, avec un ou plusieurs mots, sur l’image, en guise de question.

Nous cherchons une place dans un coin tranquille et sans bruit (il est très sollicité). La conversation a déjà commencé, nous parlons de Bobo*. 

Pippo Delbono : (…)  C’est vrai que Bobo est tellement magnétique… Tu ne peux plus partir, c’est pour cette raison que j’ai voulu faire l’expo… il est de tous les siècles, c’est lui qui te regarde… c’est comme quand tu es dans la chambre noire, que tu dis : « basta, je ne peux plus, la douleur est énorme, mais aussi la joie, basta…  pars,  laisse-moi ! » il y a tout ça… tu lui dis laisse-moi, mais tu lui dis aussi, ne me laisse pas, ne m’abandonne pas.  ! J’ai peur de sortir… (nous sommes souvent interrompus. Pippo est disponible, il répond de bonne grâce aux personnes qui le félicitent), je lui parle de cette disponibilité. Oui, c’est la seule façon de faire l’artiste aujourd’hui, c’est de partager des choses. De sentir ce que les gens vivent, avec toi, dans ton histoire… Sinon qu’est-ce qu’on fait d’autre ? 

Je lui demande, comment il a imaginé son exposition. Et qu’est-ce que c’est, pour lui, une exposition ?

Pippo Delbono : C’est la première fois que je fais une exposition, je suis touché de ce que je vois se créer dans le temps de sa création, mais je ne sais pas ce que c’est… je suis content, je l’aime,  mais je me dis : c’est quoi cette expérience… (une pause)

Je repense ce que tu me disais, tout à l’heure, que tu te reconnais dans mon histoire, c’est une chose terrible…  car c’est quoi la vie, c’est quoi d’être là, c’est quoi le fait de mourir ? nous sommes un petit fragment d’une chose énorme que nous ne comprenons pas… je ne comprends rien de moi-même.  (rires)

J’ai 55 ans et parfois, je me pique, comme un idiot, pour des amours qui ne sont pas des amours… d’un côté on pourrait dire que je suis un artiste qui a fait des choses importantes et d’un autre côté, je suis une personne qui doit encore connaître une multitude de choses.  Cela n’est pas possible ! 55 ans et tu n’as pas encore résolu telle ou telle chose de ta vie ? Qu’est-ce que tu veux dire dans cette exposition ? À la fin, je me dis qu’une exposition doit être un lieu de solitude pour le partager tous ensemble par la parole… être dans une parole ensemble, c’est fondamental ! Bergman disait : « le théâtre c’est la rencontre avec l’être humain ». Nous avons besoin de nous rencontrer, parce que nous sommes dans une solitude qui, en finalité, nous montre quelque chose qui est plus grand que nous-mêmes. 

Je montre à Pippo Delbono une photo de lui prise sur une vidéo de l’exposition, (il est à l’hôpital psychiatrique avec Bobo). Le mot proposé est masque.

Pippo Delbono :  (un temps) je me vois… mais ce n’est pas moi, c’est quelqu’un d’autre. C’est une transposition de quelque chose, je me vois avec Bobo… dans un moment de crédo… je suis un amateur qui cherche la vérité, mais quand je me vois à côté de Bobo, je sens que je dois chercher encore plus. Bobo est lui-même, il n’a pas de masque et en même temps, il n’est pas naturaliste. Il est double. Totalement le personnage, et totalement  lui-même. C’est extraordinaire ! 

Je passe à une autre image avec les mots : cri et silence. On voit Bobo acteur.

Pippo Delbono : là, c’est la victoire. Cri, silence. C’est la victoire, c’est dans l’hôpital, c’est Bobo dans le retour, c’est Bobo dans le rituel de la beauté. Cela n’est pas vrai, mais c’est plus fort que la vérité. Il récite son rôle dans ce lieu retrouvé. Il sait bien que ce n’est pas vrai. Il fait un signe, il retourne dans le temps, il le répète. Il y a quelque chose de l’ancien théâtre… Je lui demande : « de l’ancien théâtre, Grec ? ». Oui. Bobo est dans une partition musicale. Tu peux habiller Bobo en costume de gardien médiéval… (c’est bien que tu aies pris cette photo) et tout de suite, il est le gardien du château. N’importe qui avec ça devient comique. Nous acteurs, nous devenons comiques, c’est symbolique. Alors que Bobo instantanément est le gardien, il  l’incarne, il entre dans le passé. Il va dans le mystère de la vie et de la mort...

On vient chercher Pippo Delbono. On se salue chaleureusement. Il n’y a pas de fin. La rencontre est, comme son oeuvre, sans début ni fin. Tout est dans l’instant présent. Comme dans ce qui vit et ce qui meurt. 

* Pippo Delbono à rencontré Bobo dans un hôpital psychiatrique, il travaille avec lui depuis de nombreuses années

Lire aussi l'article sur l'exposition sur ce lien :

http://blogs.mediapart.fr/blog/dashiell-donello/050914/ma-mere-et-les-autres-de-pippo-delbono-exposition-performance-la-maison-rouge

Ma mère et les autres

De Pippo Delbono

Exposition du 5 septembre au 21 septembre 2014

La maison rouge fondation Antoine de Galbert

10 bd de la bastille - 75 012 paris France tél. +33 (0) 1 40 01 08 81
Fax +33 (0) 1 40 01 08 83 info@lamaisonrouge.orgwww.lamaisonrouge.org

Métro : Quai de la Rapée (ligne 5) ou Bastille (lignes 1, 5, 8)

RER : Gare de Lyon
Bus : 20, 29, 91

accessibilité

Les espaces d’exposition sont accessibles aux visiteurs handicapés moteur ou aux personnes à mobilité réduite

Jours et horaires d’ouverture :

Du mercredi au dimanche de 11 h à 19 h Nocturne le jeudi jusqu’à 21 h Fermeture les 25 décembre, 1er janvier et 1er mai.

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