©Elisabeth Carecchio
Petits fragments fictionnels pour histoires d’amour « simples »
L’amour est peut-être l’idéalisation (fictive ou réelle) la plus importante de l’humanité. Sa non-existence, qu’il soit fantasmé, divin, violent, sincère ou intéressé, n’enlèverait-il pas tout sens à la vie de l’homme ? Car l’amour, au firmament de son secret, ne brille-t-il pas intemporel et universel dans l’expansion infinie de son mystère ? Que seraient Tristan et Iseult, Othello et Desdémone, Paul et Virginie, Phèdre et Hippolyte, sans amour ?
Joël Pommerat écrit dans le programme : « je ne sais pas très bien comment parler de cette pièce. Pourtant elle est relativement simple. C’est une suite d’instants sans unité déclarée ou cohérence narrative. Elle ressemble plus à une succession de petits fragments fictionnels, comme des nouvelles, sur un thème à peu près commun ».
Dans La Réunification des deux Corées, les petits fragments fictionnels de l’amour, viennent d’un puzzle dramaturgique que Pommerat reconstitue pièce à pièce, à la recherche de la part inconnue de l’être, dans ignorance la plus secrète de l’image d’un amour qui ne comble en rien sa solitude. Où l’aimé n’existe que par pulsion, désir, dans l’attirance et le rejet de l’un, de l’autre. Jusqu’à l’agression, la blessure, la trahison. C’est une mise en scène amoureuse qui va à la limite de la réalité des personnages.
Pommerat aime jouer les malentendus de ce qui se raconte sur soi et sur les autres : ces petits mystères que l’on déforme pour mieux salir, déshonorer et blesser celui qui ne veut pas céder à l’instinct prédateur d’un patron, d’une parodie de mariage, d’un divorce ou d’une passion collective entre ex et amis.
La tragédie grecque, nous dit qu’une histoire d'amour est aussi une histoire de mort. La Réunification des deux Corées vient d'une phrase qu’un personnage jette, en exemple pour dire, à court d’arguments : nous deux, c’est comme les deux Corées… Avec, évidemment, la liberté d’imaginer le sens que nous voulons donner à ces mots mystérieux.
Le théâtre de Pommerat est grand et nous nous félicitons d’être contemporain de son art et de sa vie. Il perpétue, via les choses simples de nos défauts et contradictions, l’histoire de notre humanité. Merci à la pléiade talentueuse qui l’accompagne depuis si longtemps : Saadia Bentaïeb, Agnès Berthon, Yannick Choirat, Philippe Frécon, Ruth Olaizola, Marie Piemontese, Anne Rotger, David Sighicelli, Maxime Tshibangu. Merci aux étoiles de lumière d’Éric Soyer, aux étoffes d’Isabelle Deffin, aux vibrations sonores de François Leymarie, Grégoire Leymarie. À la musique originale d’Antonin Leymarie et au puzzle énigmatique de Renaud Rubiano. Tout simplement merci.
Le brouillard
De Louis
Mange les danseurs
Dans la fête foraine
Où
L’auto-tamponneuse
Glisse sur l’espace d’amour...
D.D
La Réunification des deux Corées
Joël Pommerat
Avec Saadia Bentaïeb, Agnès Berthon, Yannick Choirat, Philippe Frécon, Ruth Olaizola, Marie Piemontese, Anne Rotger, David Sighicelli, Maxime Tshibangu
Scénographie et lumière Éric Soyer
Costumes Isabelle Deffin
Son François Leymarie, Grégoire Leymarie
Musique originale Antonin Leymarie
Vidéo Renaud Rubiano
Théâtre de Odéon/Berthier
Entrée du public : 1 rue André Suarès / 14 boulevard Berthier – 75017
Métro : Porte de Clichy (ligne 13 / sortie av de Clichy / Bd Berthier- côté Timhôtel), à 150m du théâtre.
http://www.theatre-odeon.eu/fr
20h du mardi au samedi / 15h le dimanche
Jusqu’au 31 janvier 2015