Rodrigo García nous présente, au Festival d’Automne à Paris, sa nouvelle pièce 4. Un poème avec 4 coqs, 4 comédiens et la 4ème symphonie de Beethoven. Une quête d’un micro-monde dans une forme qu’il souhaite plus complexe.
Un poème à demi enfoui
J’ai lu tout Rodrigo García et la chair est toujours triste, hélas ! Il se sent de plus en plus poète, cherche le pur esprit, car la chair, « sa chair » c’est le quotidien de la merde ; dès que tombe le soir. Nul besoin de décrire quelque chose d’aussi naturel que de vivre, « sa vie ».
Son poème est précieux à demi enfoui. Pas tout à fait visible, pas tout à fait caché. Il lui faut, non pas l’énergie du désespoir, mais l’énergie de l’histoire. Sa poésie s’écrit avec la matière et le visuel : un savon où s’ébattent deux corps, un drone musicien qui joue dans l’espace rêvé, une symphonie de grelots, des mini miss de neuf ans dansant la cumbia, et l’impossibilité de lire un livre jusqu’au bout, même ceux des plus grands écrivains.
Le scandale, qui fait son succès, n’a somme toute peu ou pas d’intérêt. Être poète c’est rechercher en soi-même, l’Intimité universelle de l’Homme pour finalement ne raconter que la face visible d’un iceberg solitaire ; dans l’océan du doute. Alors l’image, peu à peu, sort du sous-jacent ; et l’origine du monde de Courbet s’offre un orgasme tennistique. Des coqs, bien dans leurs baskets, nous content l’histoire inachevée de Monsieur tout le monde ; s’offrent un trip sous ses aisselles, meurent et ressuscitent.
Un je-ne-sais-quoi de paisible s’installe dans ce qui pour « l’autre » serait un cauchemar, lorsque des plantes carnivores dînent de lombrics. La 4ème symphonie de Beethoven et le doggy style y sont peut-être pour quelque chose ? Quoi de mieux, dans la vie, qu’une bonne levrette en musique ?
Le chiffre quatre
Nous ne pouvons pas croire qu’il n’a pas été curieux de la symbolique du chiffre quatre. Le chiffre quatre est le plus petit nombre composé. Il symbolise: la construction, la réalisation, le concret, l’ordre, la stabilité, l’organisation dans l’intransigeance, la rigidité, l’entêtement, le déséquilibre, l’obsession, et le pessimisme. Cela lui ressemble-t-il ?
Voyons ça avec les mots (en gras) que Rodrigo García prête à ses détracteurs ; en les adaptant à cette symbolique du quatre. Cela nous donne : « Je le savais poétique , je me disais bien qu’il réaliserait un film en live avec des mini-miss dansant la cumbia. Forcément l’ordre, la stabilité, l’organisation sont tour à tour en marche. Il fallait s'y attendre, l’intransigeance, la rigidité, l’entêtement de ses idées, il les défend mordicus. C'est ce que j'imaginais, le déséquilibre, l’obsession, le pessimisme, sont chez lui moteurs.
Bien sûr ce n’est qu’un petit jeu sans importance, mais qui nous raconte qu’une convention supprimée succède à d’autres conventions. Tout n’est-il pas recommencement, entre vie et mort ? En finalité le samouraï, qui nous conte l’enfance de l’auteur, est lui-même figé dans sa caricature. Peut-il être autre chose que ce qu’il est déjà ? Peut-il sortir de ce putain d’ordinaire ?
García nous dit inventer des lois, qu’il veut enrichir, mais ces inventions une fois mises en place ne deviennent-elles pas, à leur tour, conventionnelles ? Un micro-monde, dans une forme plus complexe, n’est-ce pas, pour le coup illusoire ; tant la vie se répète. Les lombrics de Rodrigo García, nous donnent une solution pour échapper à leur quotidien rampant : leur besoin de plantes carnivores. Alors 2+2 = ce que l’on voudra. Ce sera de toutes les façons une autre loi, une autre convention. Nous ne sortirons pas de cette auberge de sitôt ! Merci Rodrigo García ! Espero con impaciencia su proxima obra !
4 de Rodrigo García
Avec Gonzalo Cunill, Núria Lloansi, Juan Loriente, Juan Navarro
Avec la participation de deux petites filles
Assistant à la mise en scène
John Romão
Scénographie lumière
Sylvie Mélis
Traduction Christilla Vasserot
Création vidéo Serge Monségu, Daniel Romero, Ramón Diago
Création son Daniel Romero, Serge Monségu, Juan Navarro
Création numérique Daniel Romero
Costumes Marie Delphin
Spectacle en espagnol surtitré
Jusqu’au 22 NOVEMBRE 2015
CRÉATION 2015
Avec le Festival d’Automne à Paris
Nanterre Amandiers
Centre dramatique national
7 avenue Pablo-Picasso
92022 Nanterre cedex
http://www.nanterre-amandiers.com
Dates
Tous les jours à 20h30, jeudi à 19h30, dimanche à 15h30
Relâche le lundi
Durée
1h30 environ
Lieu
Salle transformable