Qu’ils soient actifs, retraités ou chômeurs, ils contribuent, ont contribué, ou vont contribuer, chacun à son endroit, avec ses compétences, son expérience, son utilité sociale, à l’essor d’une société qui a besoin de tout le monde. Il n’y a pas « des gens qui réussissent et des gens qui ne sont rien ».(1) Tout le monde a sa place et cette arrogante conception du rapport à l’autre se heurte à l’origine et les fondements de l’inégalité parmi les hommes telle que Jean-Jacques Rousseau l’exposait dans son discours.(2)
« Je conçois dans l’Espèce humaine deux sortes d’inégalité ; l’une que j’appelle naturelle, ou Physique, parce qu’elle est établie par la Nature, et qui consiste dans la différence des âges, de la santé, des forces du Corps, et des qualités de l’Esprit, ou de l’Ame ; l’autre qu’on peut appeler inégalité morale, ou politique, parce qu’elle dépend d’une sorte de convention, et qu’elle est établie ou du moins autorisée par le consentement des Hommes. Celle-ci consiste dans les différents privilèges, dont quelques-uns jouissent, au préjudice des autres, comme d’être plus riches, plus honorés, plus Puissants qu’eux, ou mêmes de s’en faire obéir. »
Ceux qui réussissent seraient donc ceux qui accumulent les privilèges et les richesses au détriment des autres qui ne seraient rien !
L’ex philosophe Emmanuel Macron (3) préfère ainsi un Machiavel, qui présupposait que les hommes sont par nature mauvais, à un Jean-Jacques Rousseau pour qui l'homme est naturellement bon et que c’est la société le corrompt. Cette conception de l’homme du nouveau Président peut expliquer en grande partie la poursuite d’un combat politique qu’il mène pour affirmer la prédominance des privilèges dont quelques-uns jouissent, au préjudice de tous les autres.
C’est donc en toute logique que le Gouvernement du Président Macron prépare le budget 2018.
Pour ceux qui « réussissent »….
Ainsi, l'Impôt sur la Fortune (ISF) et la fiscalité du capital seront allégés dès 2018.
"La pression fiscale sera réduite de près de 0,6 point de PIB, soit un montant proche de 11 milliards", assure Edouard Philippe dans un entretien aux Echos. Aux 7 milliards déjà annoncés samedi dernier, composés notamment de la montée en puissance du CICE (4) et de la baisse de l'impôt sur les sociétés prévues par le précédent gouvernement, s'ajoutent la réforme de l'ISF, "appliquée intégralement en 2018" pour un coût de 3 milliards, et le prélèvement forfaitaire unique sur les revenus de l'épargne, une perte de 1,5 milliard d'euros pour l'Etat.
Et pour ceux qui ne sont rien !
Cet extrait d’article rédigé par Romaric Godin et Laurent Mauduit préfigure très bien cette politique : (5)
« On peut estimer qu’il faudra aller vers un recul en volume des dépenses et trouver entre 25 et 30 milliards d’euros d’économies, soit jusqu’à 1,5 point de PIB en un an. La France entrera alors dans une logique franchement austéritaire. Ce sera l’adoption d’une politique économique qui rappellera celle de Margaret Thatcher au Royaume-Uni dans les années 1980 où, pour financer les cadeaux fiscaux aux plus riches et aux entreprises, on a déconstruit les services publics. Car il ne sera pas possible alors d’éviter une remise en cause du modèle social français et des transferts sociaux. Les plus fragiles paieront donc le financement des cadeaux fiscaux aux plus fortunés et aux entreprises. »
Si l’on rappelle que le service public est le patrimoine de ceux qui n’ont rien, il est aisé de comprendre que ce nouveau Président n’est pas celui de tous les Français et surtout pas celui des actifs, des retraités ou des chômeurs, en fait, des gens qui ne sont rien !
C’est dans ce cadre qu’est imposée la réforme du code du travail, la hausse de la CSG et toutes les mesures qui découleront de cette volonté d’être le bon élève de cette Europe libérale. C’est toujours dans la même logique, que l’aide publique au développement va connaître une réduction de 140 millions d’euros en 2018 ! C’est «la plus importante coupe budgétaire de l’aide publique au développement jamais connue. C’est l’équivalent de 1,9 million de personnes qui n’auront plus accès à des soins de santé primaire » dénonce Michael Siegel, chargé de plaidoyer à Oxfam (6).
En marche vers l’abime !
En affirmant la prédominance des privilèges dont quelques-uns jouissent, au préjudice de tous les autres les nouveaux députés de la « République en Marche » conduisent la majorité des Français dans l’abime du fondement des inégalités.
(1) Emmanuel Macron, 15 juin 2017- salon VivaTech Paris
(2) J.J. Rousseau : « Discours sur l’origine et les fondements de l’inégalité parmi les hommes » - 1755
(3) Emmanuel Macron obtient un DEA de philosophie à l’université de Nanterre. Ses objets d’étude ? Machiavel, Hegel
(4) Le crédit d'impôt pour la compétitivité et l'emploi (CICE) équivaut à une baisse de cotisations sociales pour toutes les entreprises, y compris les PME et les TPE
(5) « Macron change de cap sous la pression des milieux d'affaires » 10 juillet 2017 Par Romaric Godin et Laurent Mauduit - Médiapart
(6) Oxfam France est membre de la confédération Oxfam, une organisation internationale de développement qui mobilise le pouvoir citoyen contre la pauvreté.