C'est dans l'indifférence quasi générale que les députés viennent de débattre d'une proposition de loi présentée par la gauche visant à donner le droit de vote des étrangers aux élections locales. A lire le compte-rendu intégral du débat [ http://www.nosdeputes.fr/dossier/9427 ], il apparaît qu'il s'agit quasiment d'un remake du débat du 26 novembre 2002.
Mais comme je ne suis pas sûr que beaucoup aient en tête les principaux éléments du débat ... et que la raison d'être du présent blog est de produire des « rétro - débats », je renvoie à une chronique de ce débat de 2002 publiée sur mon autre blog :
2002_La question des étrangers
Résumé des arguments en présence :
Premier argument (en faveur du droit de vote) :
« Il n'y a aucune raison de ne pas donner les mêmes droits à tous les étrangers sur notre sol, quelle que soit leur origine. »
Or ce droit est déjà accordé aux ressortissants de l'Union européenne.
CONTRA :
« C'est à mes yeux une situation tout à fait différente car, dans ce cas, il y a déjà entre ces citoyens et nous un début de citoyenneté commune. J'ai d'ailleurs du mal, mes chers collègues, à parler d'"étrangers" à propos des membres de l'Union européenne.»
Deuxième argument :
ces « étrangers », ils acquittent l'impôt !
CONTRA :
« Lier les deux [le droit de vote et l'impôt], c'est réintroduire le suffrage censitaire ! »
Troisième argument :
« Ces "étrangers", ils « sont actifs dans les associations, participent à la vie économique de nos cités et de notre pays par leur travail. »
Et même, ils participent déjà à un certain nombre d'élections (prud'hommes, conseils de parents, HLM ...).
CONTRA :
il y a élection et élection.
C'est une question de « souveraineté » qui est en jeu - même dans les élections locales, disent les députés de droite.
Quatrième argument :
C'est une affaire de « citoyenneté », disent les députés de gauche :
« Ne laissons personne hors du vote, faisons de la cité la chose de tous, sans exception. »
CONTRA :
1) On ne peut découper la citoyenneté, sous peine d'inventer « une espèce de."sous-citoyenneté" », une « citoyenneté de résidence », une « citoyenneté au rabais ».
2) Et puis, c'est prendre le risque de voir les différentes « communautés » - qui sont souvent regroupées dans de mêmes lieux - se refermer sur elles-mêmes : c'est ouvrir la voie au « communautarisme »
NON, « c'est tout le contraire », disent les députés de gauche :
« Le droit de vote est l'acte le plus fort qui exprime le refus d'enfermer le résident étranger dans son appartenance ethnique ».
3) De toute façon, les intéressés sont pas demandeurs.
« - Thierry Mariani. Depuis treize ans que je suis maire, aucun étranger n'est jamais venu me demander le droit de vote.
- Manuel Valls. Parce qu'ils connaissent vos positions ! Ils sont lucides ! »
A droite, la cause est entendue :
ce n'est pas le droit de vote qui est important, c'est l'intégration.
Donc, occupons-nous « d'abord » de l'intégration ... et « alors », la question du droit de vote pourra être abordée :
ce sera un aboutissement, « l'aboutissement d'un chemin normal, naturel, souhaité ».
Dans cette perspective, le droit de vote ne saurait être un préalable, mais un aboutissement, quelque chose comme la preuve que l'étranger a réussi son parcours d'intégration.
Ce qui, pour la droite, veut dire : être « naturalisé » :
« Jamais, nous n'ouvrirons la porte du droit de vote aux étrangers pour leur fermer celle de la nationalité. »...
... à bon entendeur, salut !
Et la gauche ?
Pour les députés de gauche, faire en sorte que les étrangers en situation régulière et durablement installés en France puissent voter aux élections locales ...
... c'est « une main tendue à tous ceux qui veulent que la France de demain soit une France solidaire »...
... c'est « refuser d'enfermer le résident étranger dans son appartenance ethnique »
... c'est « montrer la reconnaissance de notre pays » :
« Reconnaître leur histoire, c'est reconnaître à ces jeunes leur avenir, leur dire qu'avec leur propre histoire ils ont toute leur place chez nous.»
Bref, c'est « le signe le plus fort pour l'intégration dans la République ».