Après le « second tour » inutile et les « triangulaires » encombrantes, voici venues, les « législatives partielles », indirectement, dans l'œil du cyclone. A ce pas...autant supprimer les élections législatives et ne conserver que les « présidentielles » !
Par un nouveau tour de passe-passe, de type, encore, « coup d'état électoral », l'Elysée a trouvé le moyen, le 12 mai 2010, d'éviter à l'UMP un échec attendu à deux élections « partielles » à venir. La publication au Journal officiel de deux décrets de nomination des députés Brigitte Barèges et Denis Robert, parlementaires en mission, ne doit rien au hasard.
- les deux députés* avaient annoncé localement leur démission pour cause de cumul de mandats, après leur élection dans leurs conseils régionaux respectifs, en mars dernier ; pour ces deux députés, une démission immédiate entraînait une élection partielle, avant juillet, au résultat aléatoire
- la chance leur permit, par un opportun dépôt de recours en annulation des élections régionales en Midi-Pyrénées et à la Réunion, de reporter leur démission, comme la loi les y autorise, un mois après la publication de la décision administrative, ce qui aurait repoussé l'échéance à novembre ou décembre 2010, janvier 2011 même.
Depuis ce 12 mai 2010 (JO du 13 mai), la donne est complètement changée : nommés parlementaires en mission pour six mois, les deux députés vont pouvoir cumuler en toute quiétude leurs trois mandats jusqu'au 12 novembre 2010. Parions que le 11 novembre, un décret prolongera leur mission de six mois, de manière à faire fonctionner le clapet prévu à l'article LO 144 du code électoral et permettre leur remplacement à l'Assemblée nationale, le 12, par leurs suppléants !
Aucune partielle...ni vu ni connu, embrouille totale
Le procédé, déjà testé en 2008, avec un autre député UMP, Pierre Bédier, avait réussi à merveille. Le député des Yvelines sous la menace d'une condamnation définitive prononcée par la Cour de cassation et entraînant sa déchéance, s'était vu astucieusement nommé parlementaire en mission le 15 octobre 2008 avec une forte probabilité pour que la décision judiciaire « tombe » à la mi avril 2009 ; le 15 avril 2009, un décret prolongea la mission de Pierre Bédier (simultanément la Cour de cassation confirmait la condamnation) permettant à sa suppléante de devenir députée, évitant ainsi une élection partielle où la gauche l'aurait vraisemblablement emporté et dispensant, dès lors, le Conseil constitutionnel de prendre une décision de déchéance.
Lorsque Pierre, Messmer, le 3 octobre 1972, créait cette nouvelle forme « d'assistanat ministériel », il ne pensait pas aux multiples chemins de traverse qu'emprunterait la fonction...
L'attribution de « parlementaire en mission » a suivi, durant les trente premières années, un cours relativement normal, exception faite de bizarreries concernant les cabinets d'audit privés mentionnés dans certaines lettres de mission, des nominations de complaisance souvent remarquables par l'absence de publication de rapport . En revanche, elle connaît d'autres trajectoires, initiées particulièrement depuis juillet 2007 qui n'ont plus rien à voir avec l'intérêt général ; le cas d'espèce, en matière de « bouclier électoral » ou d'aide indirecte, par l'objet même de la mission, à une campagne électorale en sont des exemples flagrants. Par ailleurs, la confusion règne avec les missions confiées à des parlementaires par le Président de la République ou des ministres, livrant ainsi la séparation des pouvoirs de moins en moins lisible et permettant à de nombreux députés et sénateurs de franchir allègrement la ligne de partage, en se situant, le plus légalement du monde, certes temporairement, plus dans le camp de l'exécutif, avec ses prérogatives et ses accommodements, que dans celui, modeste, du législatif.
Les abus de la fonction permettront-ils d'ouvrir un débat pour clarifier le rôle, l'objet, l'impact, le résultat, l'opportunité des missions et surtout remettre de l'ordre dans la dérive croissante du Parlement vers ses cumuls d'un autre type - et dont personne ne parle, a fortiori les parlementaires eux-mêmes - et ses occupations extérieures aux multiples avantages de présidence d'organismes extraparlementaires, d'autorités administratives indépendantes Le « non droit » qui caractérise
Denys Pouillard
Directeur de l'observatoire de la vie politique et parlementaire
Site www.vlvp.fr voir l'étude sur "les parlementaires en mission" en date du 14 mai dans Etudes/Parlement
Notes
*Brigitte Barèges, maire de Montauban avait annoncé qu'elle abandonnerait son mandat de députée pour devenir leader de l'opposition UMP au conseil régional Midi-Pyrénées.
*Denis Robert, nouveau président du conseil régional de La Réunion, maire du Tampon, ne pourra conserver, en tout état de cause sa fonction de maire (non cumul de deux fonctions exécutives)
Billet de blog 15 mai 2010
La partie de bonneteau où l'UMP gagne à tous les coups
Après le « second tour » inutile et les « triangulaires » encombrantes, voici venues, les « législatives partielles », indirectement, dans l'œil du cyclone. A ce pas...autant supprimer les élections législatives et ne conserver que les « présidentielles » !
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