C’est l’histoire d’une sportive. Elle est membre depuis sa jeunesse d’un club d’aviron , l’ORC (Olympischen Ruder-Club) à Rostock. C’est un bon club qui obtient en 2006 une troisième place au championnat du monde junior (en huit avec Barreur).
Dans le même temps la jeune femme se prépare à une carrière dans la police.
Cette année elle fait partie à 23 ans de l’équipe allemande aux JO de Londres, mais jeudi dernier, après une discussion avec un responsable elle est rentrée à la maison. Il faut dire aussi qu’en septembre 2011, l’association sportive de la police du Land Mecklemburg-Vorpommern » lui avait déjà repris sa carte.
La cause de tout ça : son copain est actif dans le parti NPD, groupe d’extrême droite, et surveillé par les services de sécurité intérieure (Verfassungsschutz).
Nous avons déjà mentionné la sensibilité « A fleur de peau » de l’opinion et la vitalité de la société civile en RFA pour contrer le Neo-Nazisme (cf ici ).
Cependant le cas Drygalla n’est pas sans poser quelques problèmes et révèle des dangers fascistes dont le plus menaçant n’est pas du côté désigné, à savoir la relation d’une sportive avec un membre du NPD, mais du côté de la société allemande qui accepte presque sans broncher la méthode inquisitoriale des services secrets, le lynchage médiatique sans oublier ce qu’il faut bien appeler la lâcheté des responsables sportifs se pliant sans aucune résistance à la pression des médias.
Pour vous faire une idée plus précise et bien comprendre, voici quelques extraits de l’interview que j’ai découvert ce lundi 6 août dans mon quotidien local (Dürener Zeitung) :
Question : Qui vous a interpelée à Londres ?
Drygalla : J’ai eu des appels de médias jeudi dernier et aussi du directeur sportif de la fédération d’aviron avec qui je me suis rendu chez Herrn Vesper, responsable de la fédération olympique allemande.
Question : Est-ce qu’on vous a fait des reproches ?
Drygalla : Il n’y a pas eu de reproches. Il m’a dit qu’on l’avait informé de ma situation privée et il m’a demandé comment est-ce que c’était arrivé. Herr Visper voulait savoir quelle était ma relation actuelle avec mon ami Michael Fischer (N.D.A : l’ami en question membre du NPD) et si je partage ses idées. La discussion et les conseils m’ont conduite à prendre la décision de quitter le village olympique : ça a été ma décision.
Question : pourquoi avez-vous pris cette décision
Drygalla : J’ai voulu enlever la pression sur l’équipe ….
Question :Comment avez-vous supporté au début les tendances extrémistes de votre ami ?
Drygalla :J’avais 18 ou 19 ans, je n’y ai pas prêté attention, aux manifs et tout ça.
Question :Est-ce que vous êtes allées vous-mêmes à des manifestations ?
Drygalla :Non, jamais. Je ne connaissais personne parmi ses amis …
Question :Il y a des images dans Internet sensées vous montrer dans une manifestation à Malchow en 2009 …
Drygalla : Mais non, ce n’est pas moi, je n’ai jamais été à une manif ….
Question :On a vu votre voiture près d’une manifestation …
Drygalla :parce que mon copain l’avez utilisée en mon absence …je ne lui avez pas prêté ma voiture pour ça.
Question :Pourquoi avez-vous quitté la police l’an dernier ?
Drygalla :J’ai eu un entretien avec mon supérieur hiérarchique au cours duquel il a fait référence à ma relation et émis des doutes sur ma loyauté. J’ai réalisé qu’il y avait un conflit et j’ai préféré démissionner.
Je ne sais pas comment vous, vous réagissez, mais moi, malgré mon allergie à Lepen, au NPD et aux chemises brunes en général, quand je lis un interrogatoire interview comme ça, ça me fait froid dans le dos : peut on combattre le fascisme (en temps de paix) avec des méthodes qui lui ressemblent ?
Notez que plusieurs personnalités politiques à droite, mais aussi à gauche, ont réagi en dénonçant la méthode : Sellering, Ministerpräsident SPD du Land Mecklenburg-Vorpommern déclare : « On ne devait pas la renvoyer à la maison et abdiquer devant la tempête médiatique. A notre avis il n’y a rien à lui reprocher ».
Notez aussi que parfois, les services secrets traitent l’autre parti, extrémiste à leurs yeux, «die Linke » de la même façon que le NPD (voir ici ) car ils considèrent ces partis comme dangereux pour la démocratie ; je ne sais pas où on en est en France, c’est moins transparent je crois.