Dipa Arif

Collaborateur de Justice et Paix France, militant des droits humains, observateur indépendant et autodidacte passionné de la vie politique indonésienne.

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Billet de blog 8 août 2025

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Pulau Galang, l’île où l’on attend

Pulau Galang, ancienne île-refuge des boat people vietnamiens, accueille aujourd’hui des réfugiés palestiniens blessés, principalement de Gaza. Mais il ne s’agit pas d’un lieu d’accueil permanent : ce centre médical temporaire reflète la politique indonésienne prudente, offrant soins mais imposant isolement et incertitude quant à l’avenir des réfugiés.

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Pulau Galang, l’île où l’on attend

Sur l’île indonésienne de Pulau Galang, l’histoire semble se répéter. Jadis refuge des boat people vietnamiens et cambodgiens, cette terre isolée au large de Batam retrouve aujourd’hui son rôle d’abri, cette fois pour des réfugiés palestiniens fuyant les violences de Gaza et du Moyen-Orient. Mais si l’île rouvre ses portes, elle ne devient pas pour autant un foyer permanent.

En effet, Pulau Galang n’est pas un camp d’accueil classique pour les réfugiés palestiniens. Le gouvernement indonésien a choisi d’en faire un centre médical temporaire, destiné à soigner environ 2 000 blessés palestiniens. Ces hommes, femmes et enfants arrivent ici non pas pour s’installer durablement, mais pour recevoir des soins urgents, dans un contexte où leur avenir reste suspendu à de nombreuses incertitudes.

Cette décision s’inscrit dans une politique migratoire prudente : l’Indonésie, qui n’a pas ratifié la Convention de Genève de 1951 sur les réfugiés, refuse l’établissement permanent des réfugiés sur son sol. Le droit au travail, à l’éducation libre, ou à l’intégration sociale leur est ainsi largement refusé. Pulau Galang fonctionne alors comme un sas humanitaire — un espace sous contrôle strict, où les identités sont vérifiées, l’aide centralisée, et les tensions potentielles avec la population locale limitées.

Sur place, les infrastructures témoignent d’un passé d’accueil : un dispensaire opérationnel, des logements rudimentaires, une école de fortune. Pourtant, malgré ces équipements, l’atmosphère reste lourde. Les réfugiés, bien qu’en sécurité, vivent dans l’attente. « On nous dit que nous partirons bientôt, mais quand ? », confie Youssef, un réfugié originaire de Rafah. Ici, les jours s’étirent dans un entre-deux sans certitude.

L’enjeu est de taille. Si les flux de réfugiés palestiniens augmentent dans les mois à venir, comment éviter que Pulau Galang ne devienne un ghetto isolé, un lieu où l’espoir s’érode peu à peu ? Ce défi interpelle non seulement la politique indonésienne, mais aussi la communauté internationale. Derrière les murs et les filets barbelés, se joue le sort de milliers d’êtres humains qui, au-delà de la protection matérielle, aspirent à une vie digne et libre.

Pulau Galang, avec son passé chargé et son présent incertain, demeure un miroir des contradictions de l’accueil humanitaire : entre solidarité affichée et contrôle strict, entre hospitalité et isolement.

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