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Collaborateur de Justice et Paix France, militant des droits humains, observateur indépendant et autodidacte passionné de la vie politique indonésienne.

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Billet de blog 8 septembre 2025

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Indonésie : un citoyen poursuit le vice-président Gibran

En Indonésie, un simple citoyen poursuit le vice-président Gibran et la Commission électorale pour 125 000 milliards de roupies (6,5 milliards d'euros). Au-delà du chiffre, c’est un signal fort : face à des dirigeants jugés inexpérimentés, la démocratie peut se réveiller, la justice devient outil de contrôle, et chaque citoyen peut bousculer l’ordre établi.

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Indonésie : un citoyen poursuit le vice-président Gibran

Dans un pays où l’opinion publique est souvent spectatrice plutôt qu’actrice du jeu politique, l’initiative d’un simple citoyen indonésien vient de créer une onde de choc. En déposant une plainte contre le vice-président Gibran Rakabuming Raka et la Commission électorale (KPU), avec une demande d’indemnisation astronomique de 125 000 milliards de roupies (6,5 milliards d'euros), cet homme, nommé Subhan, propose une lecture singulière et audacieuse de la démocratie : faire contribuer les responsables politiques présumés coupables de manipulations au redressement des finances publiques.

Un geste hors normes

À première vue, la requête peut sembler irréaliste, presque extravagante. Mais derrière ce chiffre colossal se cache un raisonnement d’une simplicité implacable : si des acteurs politiques violent les règles, leurs actes nuisent à la confiance des citoyens et, par extension, à l’économie nationale. Pourquoi alors l’État et ses citoyens devraient-ils supporter seuls le coût de telles dérives ? Cette plainte introduit une idée novatrice : l’usage de la justice comme outil de « réparation fiscale », où les fautifs, même au sommet de l’État, seraient appelés à remplir les caisses publiques.

L’ombre d’une légitimité contestée

Le cas Gibran n’est pas anodin. Son ascension fulgurante jusqu’à la vice-présidence a été largement critiquée. Pour beaucoup, il ne remplissait pas — ou pas encore — les conditions de maturité politique et d’expérience exigées pour une telle fonction. Certains vont même jusqu’à douter qu’il ait passé son bac.

L’image d’un jeune héritier bénéficiant de réseaux familiaux plus que de mérites propres a alimenté la perception d’une « manipulation institutionnelle », orchestrée par des arrangements juridiques et politiques.

Dans ce contexte, la plainte ne vise pas seulement une personne mais une méthode : celle qui permet à un candidat encore loin des critères classiques d’éligibilité de gravir, malgré tout, les marches du pouvoir suprême.

Une traînée de poudre potentielle

Au-delà de ce dossier particulier, la portée symbolique est considérable. Si un citoyen peut oser un tel geste, pourquoi d’autres n’en feraient-ils pas autant ? La démocratie moderne repose en principe sur la possibilité pour chacun de demander des comptes à ses dirigeants. Cette plainte pourrait ainsi ouvrir une brèche : multiplier les actions judiciaires contre d’autres responsables soupçonnés de pratiques douteuses.

Une telle dynamique pourrait se propager comme une traînée de poudre. Aujourd’hui Gibran, demain d’autres figures politiques de premier plan. Chacune de ces initiatives, qu’elles aboutissent ou non, renforcerait l’idée que le pouvoir n’est plus un sanctuaire intouchable mais un espace de responsabilité, où la justice civile peut intervenir pour rappeler les règles.

Entre utopie et réveil citoyen

Bien sûr, la probabilité que l’État encaisse un jour les 125 000 milliards réclamés reste infime. Mais la force de ce geste n’est pas tant dans son résultat concret que dans son message : la justice n’appartient pas exclusivement aux élites, et les citoyens, même isolés, peuvent s’en emparer pour bousculer l’ordre établi.

L’initiative ouvre un débat sur la façon d’envisager le rapport entre pouvoir, responsabilité et finances publiques. Elle interroge la complaisance des institutions face aux arrangements politiques et donne une forme juridique à une colère diffuse : celle de voir des individus « hors normes » accéder au pouvoir sans respecter les règles du jeu.

Conclusion

En définitive, cette plainte apparaît comme une expérience démocratique radicale, où la justice devient non seulement un instrument de sanction mais aussi un levier d’imagination politique. Qu’elle réussisse ou échoue, elle laissera sans doute une trace : celle d’un citoyen qui a osé, seul, mettre en cause l’un des plus hauts représentants de l’État, et qui pourrait bien inspirer une génération de contestataires prêts à rallumer, chacun à leur manière, cette traînée de poudre.

Source :

https://www.google.com/amp/s/news.detik.com/berita/d-8101175/seorang-warga-gugat-wapres-gibran-dan-kpu-rp-125-triliun-di-pn-jakpus/amp

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