Quand les prêcheurs de tolérance deviennent les véritables intolérants
Il est fascinant, et en même temps inquiétant, d’observer ce phénomène : certains dirigeants, intellectuels ou personnalités publiques se présentent comme les champions de la tolérance. Dans leurs discours, la bienveillance et le respect des différences sont célébrés avec emphase. Sur les tribunes, dans les médias ou sur les réseaux sociaux, ils répètent sans cesse : « Nous sommes ouverts et inclusifs. Le monde devrait apprendre de nous ce qu’est la tolérance. »
Pourtant, derrière ces slogans, la réalité est souvent tout autre. Ceux qui se parent des vertus de l’ouverture et de la compréhension peuvent se montrer extraordinairement intolérants envers toute pensée qui diverge de la leur.
L’intolérance cachée derrière la vertu affichée
Cette forme d’intolérance est subtile, mais puissante. Elle se manifeste par :
- La censure des voix critiques, même lorsqu’elles s’expriment avec politesse et argumentation.
- Le rejet systématique de ceux qui ne se conforment pas à l’orthodoxie morale ou idéologique dictée par le groupe.
- L’usage du discours de tolérance comme arme pour discréditer et exclure.
Autrement dit, la tolérance proclamée devient un instrument de pouvoir. Ceux qui s’en réclament définissent eux-mêmes les limites de ce qui est acceptable, puis punissent quiconque ose s’en écarter.
Les vrais intolérants
Le paradoxe est saisissant : en prétendant protéger la diversité, ces « défenseurs de la tolérance » finissent par ériger un carcan intellectuel. L’espace du débat se réduit, et la pluralité des opinions est remplacée par un conformisme obligatoire.
Ainsi, ceux qui se réclament des valeurs les plus élevées deviennent les gardiens les plus rigides du dogme. Ils transforment le respect de la différence en instrument de jugement, et la tolérance en arme contre ceux qui pensent autrement.
L’impact sur la société
Lorsque ce phénomène se généralise, il fragilise les sociétés :
- Les citoyens hésitent à exprimer leurs opinions, de peur d’être ostracisés ou accusés d’intolérance.
- Le dialogue se réduit à une répétition des slogans officiels, tandis que la diversité intellectuelle et culturelle s’appauvrit.
- La morale affichée remplace l’éthique réelle : l’attention sincère aux autres est sacrifiée sur l’autel de l’apparence vertueuse.
Comment reconnaître la vraie tolérance
La véritable tolérance ne se proclame pas, elle se manifeste. Elle se traduit par :
- L’écoute active, même de ceux avec qui l’on est en profond désaccord.
- La capacité à accepter que d’autres modes de vie, opinions ou croyances puissent exister sans menace pour le groupe.
- Le refus de transformer les différences en armes idéologiques.
La vraie tolérance ne cherche pas à imposer un standard moral ou intellectuel ; elle protège l’espace de liberté nécessaire à l’épanouissement de chacun.
Le miroir de la vertu
Il est temps de regarder en face ce paradoxe : les prêcheurs de tolérance peuvent être les intolérants les plus sévères, et leur discours sur l’ouverture n’est souvent qu’un masque. La vigilance consiste à distinguer ceux qui vivent réellement les valeurs qu’ils proclament de ceux qui les brandissent pour renforcer leur pouvoir ou leur prestige.
En fin de compte, la tolérance authentique ne se mesure pas aux mots que l’on prononce, mais à la liberté que l’on laisse aux autres d’exister et de penser différemment.