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Collaborateur de Justice et Paix France, militant des droits humains, observateur indépendant et autodidacte passionné de la vie politique indonésienne.

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Billet de blog 25 septembre 2025

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Conflit agraire en Indonésie : quand la terre ancestrale devient champ de bataille

Le 22 septembre 2025, à Sihaporas (Sumatra), des autochtones Tano Batak se sont heurtés violemment aux employés de Toba Pulp Lestari. Trente-trois villageois ont été battus, dix hospitalisés. Au cœur du conflit : 1 500 hectares de terres ancestrales convoitées par l’entreprise, symbole de tensions foncières persistantes en Indonésie.

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Conflit agraire en Indonésie : quand la terre ancestrale devient champ de bataille

Le 22 septembre 2025, le calme apparent de Sihaporas, un village niché dans la régence de Simalungun au nord de Sumatra, a été brisé par des cris, des coups et des sirènes. Des membres de la communauté autochtone Tano Batak se sont heurtés violemment aux employés de PT Toba Pulp Lestari (TPL), le géant indonésien de la pâte à papier. Selon l’Alliance des Peuples Indigènes de l’Archipel (AMAN), trente-trois villageois ont été battus, et dix ont dû être hospitalisés, certains dans un état préoccupant.

Une terre ancestrale revendiquée

Au cœur de ce conflit brûlant se trouve la question de la terre. Les Tano Batak affirment que les 1 500 hectares convoités par TPL pour la culture d’eucalyptus appartiennent à leurs terres coutumières, transmises de génération en génération. Mais l’entreprise, elle, considère ces étendues comme faisant partie de sa concession forestière.

Ce jour-là, environ 150 personnes — employés, agents de sécurité et individus en uniforme noir — ont pris d’assaut les villageois. Les maisons ont été endommagées, les véhicules vandalisés, et même l’évacuation des blessés a été entravée. Les villageois parlent d’un assaut brutal, orchestré pour les intimider et imposer la mainmise sur leur territoire.

Des voix courageuses s’élèvent

Dans ce chaos, certains individus ont émergé comme de véritables protecteurs. Le père capucin Walden Sitanggang, membre de la Commission pour la Justice, la Paix et l’Intégrité de la Création à Medan, a organisé l’évacuation des blessés et dénoncé l’usage excessif de la force. Il appelle à une enquête indépendante, rappelant que la violence ne doit jamais devenir l’instrument de la loi.

Les autorités locales se sont limitées à visiter les victimes à l’hôpital, sans sanctionner les responsables. Une inertie qui alimente la frustration et la colère des communautés autochtones.

Un problème systémique

Ce conflit n’est pas un cas isolé. Partout en Indonésie, les communautés autochtones se heurtent aux entreprises exploitant les ressources naturelles sans leur consentement. De Sumatra à la Papouasie, des incidents similaires ont fracturé des villages et détruit des vies. Les réformes agraires promises par l’État restent largement théoriques, et la reconnaissance légale des droits fonciers coutumiers demeure insuffisante.

Chaque arbre abattu, chaque hectare de terre cultivé sans autorisation est un rappel cruel de la vulnérabilité des peuples autochtones face à des intérêts économiques puissants.

Vers une justice pour les peuples autochtones

L’affrontement de Sihaporas illustre tragiquement le combat des communautés autochtones pour préserver leur identité, leur culture et leur lien sacré avec la terre. C’est un appel à la justice, une demande pressante pour que la loi protège réellement ceux qui vivent depuis des générations en harmonie avec leur territoire.

La communauté internationale et les défenseurs des droits humains observent de près. Mais au-delà des sanctions et des enquêtes, la question fondamentale demeure : l’Indonésie saura-t-elle un jour reconnaître pleinement les droits de ses peuples autochtones et mettre fin à ces conflits répétitifs ?

Source :

https://www.ucanews.com/news/indigenous-people-clash-with-pulp-company-staff-in-indonesia/110406

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