Dipa Arif

Collaborateur de Justice et Paix France, militant des droits humains, observateur indépendant et autodidacte passionné de la vie politique indonésienne.

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Billet de blog 29 septembre 2025

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Quand le silence tue et que la vérité se tait

Haïr, c’est encore reconnaître l’autre. Mais l’ignorer, c’est l’effacer. Tandis que l’indifférence glace les cœurs, la vérité, elle, demeure souvent seule, abandonnée pour le confort des foules. Deux renoncements jumeaux qui minent l’humanité et appellent le courage de se lever, même dans la solitude.

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Quand le silence tue et que la vérité se tait

Il est des crimes qui ne laissent ni sang ni cicatrice visible, mais qui éteignent lentement la lumière de l’humanité. Ce ne sont pas les cris de la haine qui sont les plus destructeurs, mais l’absence de voix, le détournement du regard, l’indifférence glacée qui nie jusqu’à l’existence de l’autre. Haïr, c’est encore reconnaître. Mais ignorer, c’est abolir. C’est réduire l’autre à néant, comme s’il n’avait jamais été.

Dans ce désert affectif, la vérité elle-même se retrouve abandonnée. Platon le savait : elle est souvent solitaire, car elle ne promet ni applaudissements ni confort. Elle marche nue, exigeante, sans flatter ni apaiser. Or, les hommes préfèrent la chaleur d’un mensonge partagé au froid d’une lucidité solitaire. La foule choisit l’illusion qui unit plutôt que la clarté qui isole. Ainsi, la vérité s’éteint dans le silence, non parce qu’elle est faible, mais parce que trop peu osent la suivre.

Ces deux renoncements – l’indifférence envers l’autre et l’abandon de la vérité – se nourrissent l’un l’autre. Car ignorer la souffrance humaine revient à se détourner de ce qui est vrai ; et délaisser la vérité, c’est condamner les hommes à s’enfermer dans une cage d’illusions où la compassion n’a plus sa place. Les grandes tragédies de l’histoire ne se sont pas bâties seulement sur la cruauté des puissants, mais sur les milliers de regards qui ont refusé de voir, sur les milliers de voix qui se sont tues.

Et pourtant, il suffit parfois d’un être pour briser ce cercle mortel. Retrouver l’humanité, c’est refuser la froideur commode du silence. C’est accepter de porter une part du fardeau d’autrui, même au prix du confort, même au prix de la solitude. C’est risquer de se retrouver seul, mais debout, pour défendre ce qui est juste. Car la grandeur humaine ne se mesure pas au nombre de voix qui nous suivent, mais au courage de parler quand tous se taisent, au courage d’aimer quand tous s’éloignent.

Alors seulement, la vérité cesse d’être orpheline. Alors seulement, le visage de l’homme se réchauffe à nouveau de lumière.

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