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Djalila Dechache

Auteure, chercheure sur l 'Emir Abdelkader l 'Algérien, Kateb Yacine et le théâtre arabe.

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Billet de blog 9 octobre 2021

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Rotterdam la nuit, Création, texte et mise en scène Charif Ghattas.

Il ne suffit de le vouloir pour que le malentendu ou l‘incompréhension cessent. Il y a un passif trop lourd, trop présent, trop encombrant. Des comptes à rendre, se justifier, expliquer ce qui ne peut s’effacer…Bref un tribunal familial permanent !

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Ce blog est personnel, la rédaction n’est pas à l’origine de ses contenus.

Rotterdam la nuit, texte et mise en scène Charif Ghattas, avec Elisabeth Bouchaud, Coralie Emillion-Languille et Pauline Ziadé, Théâtre de la Reine blanche, 2 bis passage Ruelle, Paris 18ème, Tél 0140050696, durée 1h 15, jusqu‘au 17 octobre 2021.

Trois femmes d’âge différent, trois sœurs se déchirent dans une chambre d’hôtel, règlent des comptes du passé le soir de la mort de leur mère dans un hôpital.

On n’en saura pas plus ou si peu.

Il y a Mire, puis Diane va se marier, et enfin Rita qui a édité un premier roman, elles jouent aux chaises musicales. Elle ne se sont pas vues depuis un an, et même plus. Elles ne sont jamais ensemble sauf au début et à la fin du spectacle où Mire la plus âgée des trois commence seule et termine seule.

En fait c’est elle la plus marquée, la plus lucide, la plus dramatique des trois sœurs. Elle n‘a pas de projet en cours.

Elle veut exister et être aimée de sa famille.

De la  mère on ne saura rien : c’est sans doute elle la responsable de l‘éducation qui a engendré cette concurrence, cette rivalité, cette jalousie entre ses filles.

Une lumière rouge, un lit posé en biais sur le plateau, trois oreillers blancs, un couvre-lit couleur cuivre, un jeu de glaces, une musique lugubre, une femme assise par terre, près du chevet. Elle est seule, ne fait rien de spécial, elle attend. Comme les spectateurs. On frappe à la porte. Une femme entre. C’est sa sœur, Rita.

« Arrêtons ce cirque, dès maintenant, ce soir … »

 Il ne suffit de le vouloir pour que le malentendu ou l‘incompréhension cessent. Il y a un passif trop lourd, trop présent, trop encombrant. Des comptes à rendre, se justifier, expliquer ce qui ne peut s’effacer…Bref un tribunal familial permanent !

© Théâtre de la Reine Blanche

« Pourquoi suis-je venue,  se demande Diane ? ».

Mire questionne : « que penses-tu de moi ?  »

Rita enfin : «  je vous supporte » et à Mire : «  il faut que tu bouffes l‘espace, écraser l‘autre ».

On pourrait dire que les trois sœurs monologuent tout en étant ensemble en un dialogue de sourds. Un mur est dressé entre elles, ne pouvant communiquer entre elles en même temps. Le ressentiment a supplanté l‘amour entre elles.

Le final, joliment mené donne l‘aperçu d’une possible réconciliation, quoique très fragile, mais qui sait ? Il faut y croire.

Cet état de fait est bien connu au sein des familles, la violence des rapports entre les éléments d’une fratrie, la littérature, le cinéma en pullule. C’est un thème aussi vieux que le monde, en somme.

Les trois comédiennes jouent leur rôle à merveille, chacune avec un style, une musique particulière et une mise en scène respectant la règle des trois unités.

 Mention particulière pour Elisabeth Bouchaud, l‘aînée des sœurs, joue toute en retenue la passion qui sommeille et s’exprime parfois.

Elle est comédienne et scientifique pointue : elle a pris les rênes du Théâtre de la Reine Blanche en 2004 en y insufflant une programmation originale et nouvelle. Pour en savoir plus :

https://www.lemonde.fr/sciences/article/2019/04/28/elisabeth-bouchaud-de-la-physique-au-theatre_5455870_1650684.html

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