Pièces de guerre, Prométhée enchaîné, Les Suppliantes, Eschyle, mise en scène Olivier Py.
Théâtre 14 Paris et en itinérance dans le 14 ème arrondissement. Avec Philippe Girard, Mireille Herbstmeyer et Frédéric Giroutru, jusqu‘au 26 mai 2023.http://www.theatre14.fr
Que cette langue est belle, harmonieuse, mouvementée, ondulée au rythme des vagues de l‘époque.Quelle modernité dans le propos, dans les thèmes et quel joie de voir les trois comédiens jouant toute à tout plusieurs rôles.
Installée dans un lieu difficile et trop ingrat, jouée en plein jour, sans autre apport que la voix portée par des comédiens sublimes, la langue d’Eschyle retentit à nos oreilles et fend notre armure.
Prométhée enchaîné, porté essentiellement par Frédéric Giroutru, au buste nu, chaque mot retentit et affecte ses os, ses muscles, sa vitalité.Il a désobéit en offrant le feu et les arts aux hommes.Zeus n‘est pas content, il se venge, Prométhée maintient ce qu‘il a fait.Il paie de sa personne, de son corps, de sa pensée et c’est remarquable.« Cette pièce fondamentalement politique, cette pièce offre, selon Olivier Py, une leçon d’insurrection ».
Cette insurrection que nous vivons depuis quelques années en France face à l‘impossible dialogue.
Crédit photo Christophe Raynaud de Lage
Les suppliantes, autre texte sublime, moderne, pose une problématique séculaire : demander asile en terre d’Argos et rester vierges et refuser de se marier.Ce qui met en cause les lois de l’hospitalité. Danaos, leur père, leur dit : lorsque vous serez devant les Argonides « Ne prenez pas trop vite la parole ni ne la gardez trop longtemps, les gens d’ici sont irritables, sachez céder ( …) un langage trop assuré ne convient pas aux faibles.Mettez la modestie plus haut que la vie ».
« Déposez devant l‘autel des dieux des rameaux d’olivier, attribut de Zeus, comme il sied aux suppliantes ».Cela ne sera hélas pas suffisant, une guerre se prépare et les suppliantes restent enfermées dans leurs malheurs d’étrangères.
A n’en pas douter les questions posées demeurent les piliers de l’espèces humaine confrontées à l’ordre, la transgression, le rapport à l’autre, l’étranger et l’étrangère, l’hospitalité et ses limites…
Sujet devenu problématique a-temporelle qui retentit encore de nos jours en Méditerranée et ailleurs.
Ici le texte est privilégié, il parvient à laisser au second plan un lieu ingrat, au profit des trois remarquables et efficaces serviteurs de la scène.
Avec la :
Collaboration artistique Pierre-André Weitz, Production déléguée La Jolie Pouroise, Production Odéon-Théâtre de l’Europe avec le soutien des Fondations Edmond de Rothschild.