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Billet de blog 8 août 2017

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Dernière (re)prise aux usines Wonder

Elle s’appelait Jocelyne, il s’appelait Hervé. Elle était ouvrière aux usines Wonder de Saint-Ouen, il était critique et cinéaste. Ils ne se sont jamais rencontrés mais par la grâce d’un film de 10 mn, ils ont été les héros d’une des plus belles histoires de cinéma.

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Le 26 juillet dernier, on a retrouvé Hervé le Roux, 59 ans, dans son appartement de Poitiers, mort semble-t-il depuis plusieurs jours. Depuis 15 ans, il était sorti des radars médiatiques mais restait bien présent dans la tête de ceux qui, comme moi, avait découvert « Reprise », sorti en 1997, et ne s’en sont pas remis.

Au départ, un court métrage réalisé en mai 1968 par des étudiants de l’IDHEC à l’entrée des usines Wonder, à deux pas des Puces. On y voit, une jeune femme, belle comme une héroïne de Godard, hurler son dégout à la perspective de reprendre le travail comme le préconisent le patronat et les syndicats suite aux accords de Grenelle. Pas question de remettre les pieds dans cette « taule dégueulasse », où on embauche à 14 ans pour travailler 10 heures par jour à la chaine au milieu du manganèse et divers produits chimiques, avec une seule pause de 10 mn pour aller aux toilettes. Autour d’elle, s’agite une petite société qui se révèle comme un précipité des acteurs de 68, militants CGT, CFDT, maos et qui voudrait, pour faire vite, qu’elle se taise et se soumette. Ce qu’elle ne fera pas, à l’écran du moins, certains diront qu’elle est finalement rentrée, j’ai du mal à le croire.

D’évidence, Hervé Le Roux est tombé littéralement amoureux de cette figure, dont on apprendra qu’elle se nomme Jocelyne. Pour la retrouver, il va se lancer dans une enquête cinématographique qui lui fera rencontrer tous ceux qui furent les acteurs de cette époque, militants CGT notamment mais aussi les ouvrières de Wonder et par elles, un certain état de la condition ouvrière de la fin des années 60. Mais les indices sur la jeune femme resteront incertains et jusqu’à la fin elle sera l’absente/présente de cette histoire.

Je n’en dirai pas plus, le film est disponible en DVD, des critiques aussi et quelques hommages dont celui de Fédéric Bonnaud, le directeur de la Cinémathèque, qui fut son ami.

En guise de salut, je lui adresse cette photo prise hier au 77 rue des Rosiers à Saint-Ouen. L’entrée des usines Wonder existe toujours, plus pour longtemps, des permis de démolition et de construction annonçant l’imminence d’un projet immobilier.

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