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Billet de blog 17 mars 2025

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Culture pour chacun/culture pour tous : de l’essence à l’essentiel

Certains se rappelleront peut-être le mantra qu’avait choisi Frédéric Mitterrand pour incarner son mandat ministériel sous influence sarkosyste: « La culture pour chacun ». A bien y réfléchir, ce qui n’était qu’une pétition de principe a cheminé plus qu’il n’y parait dans les esprits, notamment ceux des décideurs publics.

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Certains se rappelleront peut-être le mantra qu’avait choisi Frédéric Mitterrand pour incarner son mandat ministériel sous influence sarkosyste: « La culture pour chacun ». Le slogan avait été disputé voire chahuté, ne produisant rien de bien neuf sur le moment hormis d’instiller l’idée que l’individu est apte à déterminer seul ce qui l’ouvrira au monde du sensible et des idées. A bien y réfléchir, durant les quinze années qui nous en séparent, ce qui n’était qu’une pétition de principe a cheminé plus qu’il n’y parait dans les esprits, notamment ceux des décideurs publics. Car, somme toute, qu’est le tant décrié Pass Culture si ce n’est l’encouragement à ne se conformer qu’à ses propre goûts, si l’on en a, ou sinon à ses pulsions consuméristes pour autant qu’elles puissent se couvrir d’un vernis culturel ? Au point qu’il a fallu, pour tenter de sauver les apparences face à un fiasco de plus en plus flagrant, en distinguer une part « collective » plus présentable. Ses promoteurs se gardant bien de préciser que cette adaptation, en apparence apte à amplifier les actions d’éducation artistique en milieu scolaire, de fait les parasite voire les phagocyte en les nivelant.

On dit le Pass Culture moribond mais même s’il trépassait (pavant d’une nouvelle pierre l’enfer des bonnes intentions), il aura produit plus d’effets pervers que vertueux et contribué à une forme de décomplexion vis-à-vis des politiques publiques de la culture qui s’affiche désormais au plein jour. En déversant chaque année des centaines de millions sans se donner les moyens d’agir en profondeur sur les pratiques culturelles, il a offert le meilleur des prétextes à celles et ceux qui considèrent comme révolues les vertus émancipatrices de celles-ci. Leur héraulte française, la présidente du conseil régional du Val de Loire Christelle Morançais, revendique une forme de décomplexion budgétaire et idéologique par rapport au sujet et se sent autorisée à proclamer qu’il n’appartient pas à la collectivité de se substituer aux familles pour fournir à leurs enfants ce dont ils ont besoin en termes de culture. Et sabrant, dans le même mouvement, la quasi-totalité des subventions aux acteurs culturels hors patrimoine et musique classique.

On avait glosé sur les dirigeants illibéraux d’Amérique du sud ou des ex-pays de l’Est et leur propension à jouer de la tronçonneuse pour abattre des pans entiers de la création ou de la recherche, on s’horrifie à juste titre des terres brulées par le tandem Trump/Musk mais sommes-nous suffisamment en alerte à ce qui est en train de se jouer à notre porte ? On parle de fin de cycle, de moment charnière, de maltraitance institutionnelle vis-à-vis de la culture guère plus considérée de nouveau que comme un supplément d’âme, ce qui est déjà grave et préoccupant ; mais est-ce encore la question ? De notre capacité à chercher ensemble les moyens d’agir et de convaincre, ou de s’en remettre à l’hypothétique plus ou moins bonne volonté de quelques uns, dépendra la réponse.

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