Evacuons d’emblée l’hypothèse d’une rancœur, voire d’une aigreur, de ne pas faire partie des happy few multibadgés qui hantent les couloirs du bunker en multipliant les tweets et les selfies pour que chacun sache qu’ils sont dans la place. Il y a 30 ans je ne dis pas, mais aujourd’hui il faudrait au sens littéral me payer pour que j’y mette les pieds.
Et envisageons ce billet pour ce que très modestement il est : l’expression d’une humeur non mauvaise mais plutôt effarée face à ce qui relève d’un phénomène de sidération puissant dont peu semblent s’émouvoir.
Je veux parler de l’extrême vulgarité de tout ce qu’a véhiculé l’édition du Festival qui vient de s’achever, hors certains films eux-mêmes dont la plupart venus d’Asie ( Japon, Taiwan, thailande), il n’y a sans doute pas de hasard.
Vulgaires les propos tenus par Pierre Lescure quand, en guise de liminaire, il se délecte des partenariats qui associe sa manifestation à des multinationales à volonté clairement hégémonique dans leur domaine, je pense évidemment à Kering. Promotion du cinéma, marché du film, la prégnance du commerce sur l’art à chaque recoin du festival s’affiche désormais sans vergogne. Toute aussi décomplexée et grossière, d’année en année bouffie par toujours plus de suffisance, l’omniprésence des médias audiovisuels, avec Canal en tête de gondole, balafre le paysage au propre comme au figuré.
Vulgaire aussi la pseudo-élégance des monteurs et monteuses de marche chopardisées, qui rivalisent d’étalage de chairs à la fermeté douteuse et de choix vestimentaires pour le moins erratiques, sans parler du sexisme ambiant qui voit des colonies de pingouins en total look tuxedo + nœud-pap’, à l’austérité imposée, cohabitées avec des hordes féminines aux extravagances capillaires et chromatiques rien moins que ridicules. N'est pas glamour qui veut.
Et vulgaire enfin l’incontinence des propos d’où qu’ils viennent qui confirme la peoplelisation de la société du spectacle dont les paroles, et sans doute les pensées, n’excèdent plus les 140 caractères (lorsqu’ils arrivent à les atteindre).
Et le pire est que ce miroir est aussi le nôtre, effet loupe en moins, qui nous en voit scruter les bords pour y déceler une ombre où se cacherait le début d’une résistance, mais en vain.