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Billet de blog 6 octobre 2011

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Marche des Indignés - 04/10 - Clarté et ombres

Enfin, la Belgique. C'est un pays ridicule et je ne le comprendrai jamais, mais je l'adore. Pour un Néerlandais, la Belgique a quelque chose "d'exotique". C'est légèrement différent. Les gens y sont de tradiction catholique, ils ont un drôle d'accent, et dans le Sud ils parlent même une autre langue.

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Enfin, la Belgique. C'est un pays ridicule et je ne le comprendrai jamais, mais je l'adore. Pour un Néerlandais, la Belgique a quelque chose "d'exotique". C'est légèrement différent. Les gens y sont de tradiction catholique, ils ont un drôle d'accent, et dans le Sud ils parlent même une autre langue.

Kortrijk, 4 octobre 71 è jour de la Marche vers Bruxelles. 29 km depuis Rijsel
Chers tous,
A Arras, une marche bis est née, désignée sous le nom de "super Indignados", et qui est composé de gens ulcérés, pour diverses raisons, par les Indignés. Au début, ils étaient trois, Alexis et deux autres camarades. Hier on les a retrouvés à Lille, et à présent leur marche compte déjà neuf participants. je suis curieux de savoir combien ils seront à Bruxelles.
Pendant que je traverse la zone urbaine de Lille, le camarade Roberto, mon partenaire dans les Renseignements, révèle son véritable but. J'aurais pu deviner ce qu'il était, mais c'était si criant que je n'y ai jamais réfléchi. En tant qu'ex-banquier, ex-courtier en bourse et ex-enfant de choeur, il a infiltré le mouvement du 15 Mai pour rétablir le capitalisme sous la tutelle éclairée du Pape.
"Et ce n'est que le début", dit-il, "On va créer un Nouvel Ordre Mondial.". Il se retourne. Le groupe suit à une certaine distance. "Regarde ces gens. Est-ce que tu crois qu'ils vont changer quelque chose? Tu crois vraiment à une révolution? Il sourit. "Viens avec moi du côté obscur."
Je ne bronche pas, le regardant comme pour lui signifier: "Continue."
"Tant qu'on leur laisse l'illusion d'être libres, c'est facile de modeler l'esprit des gens. C'est ce que nous faisons."
"Nous: c'est à dire?"
"Nous sommes un sur cent. Nous sommes le Patriarcat."
Je me souviens d'une bannière qui était attachée à l'une des entrées du métro pendant l'Acampada à Sol. "La Révolution sera féministe", disait-elle"ou elle ne sera pas."
"Avant l'avènement de la Civilisation", explique Roberto, "la société était habituellement administrée par les femmes. Les gens étaient égaux, et ils étaient libres. Ça devait être incroyablement chiant, et Dieu merci, on a changé tout ça. D'abord par l'épée, et ensuite par l'Église." Il me regarde. "Tu ne crois pas que c'est inouï que l'Église se soit débrouillée pour transformer l'image de la femme? D'un symbole de la fertilité vénéré et respécté, on est passé à celui de la chasteté et de la soumission..."
"Ça ne me fait pas bondir d'allégresse."
"Réfléchis aux implications. Une fois que les gens ont soumis leurs femmes, ils deviennet capables de soumettre aussi la Terre-Mère. Nous n'avons plus de limites à notre potentiel humain d'exploitation."
"Mais quelle en était la raison?"
" Le pouvoir n'a pas besoin de raisons. Il ne tend qu'à une chose: croître." Je vois un éclat dans ses yeux. "On va créer de nouveaux humains. On le fera grâce à la technologie. On l'a déjà fait. Dans le futur proche, l'homme sera incapable de se rebeller contre nous. On le forcera à détruire la planète, et on le forcera à trouver un moyen d'émigrer sur d'autres astres. Notre pouvoir se répandra dans l'Univers. On dévorera tout, et on ne laissera que le désert. Le Côté Obscur est trop fort. Il est impossible de nous arrêter."
A première vue, Roberto semble tout à fait normal. Je suppose qu'il blague. Mais le fait est que je n'en suis pas totalement sûr. Pour éviter la tentation, j'allonge le pas et le distance.
Nous arrivons à la frontière. Je ne peux pas y croire. Il y a six semaines, on entrait en France, et voilà qu'on l'a entièrement traversée à pieds. Même si les seuls qui aient vraiment fait toutes les étapes à pieds sont Jésus Christ et moi.
Enfin, la Belgique. C'est un pays ridicule et je ne le comprendrai jamais, mais je l'adore. Pour un Néerlandais, la Belgique a quelque chose "d'exotique". C'est légèrement différent. Les gens y sont de tradiction catholique, ils ont un drôle d'accent, et dans le Sud ils parlent même une autre langue. Il y a un peu de nature aussi, des collines et des forêts, des choses que nous n'avons pas vraiment dans un pays artificiel comme la Hollande. D'un autre côté, pour un Néerlandais à l'étranger, la Belgique a un côté très familier. C'est l'harmonie des deux qui fait de ce pays un endroit si adorable.
Traverser une frontière donne une énorme énergie. C'est comme avoir accompli quelque chose. On ne se préoccupe plus trop de tous les problèmes pratiques et sociaux. On les relativise. C'est ce que j'ai fait hier à Lille, quand deux jeunes autochtones sont venus me voir pour m'exprimer leur admiration pour ce qu'on fait. "On vous soutient. Souvenez-vous en."
Ils sont loin d'être les seuls à avoir dit ça. C'est toujours bon à entendre. Cela me fait prendre conscience que notre marche est bien plus qu'un simple groupe de gens qui cheminent.

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Retrouvez l'original en anglais avec les photos sur le blog "Spanish Revolution"
Comme les autres billets sur la Marche, celui-ci n'est pas de moi, mais juste une traduction que j'en fais aussi souvent que je peux.

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