La dégénérescence de la Veme République est bien avancée lorsqu'on constate qu'elle est désormais squattée par trois partis bonapartistes, réunis chacun autour d'un chef: Le Pen, Macron et Mélenchon. L'une d'elles vient de se faire tacler sévèrement et ne s'en relèvera sans doute pas en tant que personnalité politique, ce qui dans le modèle bonapartiste est décisif (Bardella devra faire une vraie mue pour être à la hauteur, à moins que la cour d'appel ne sauve la soldate Le pen). Macron s'était pris une vraie gamelle aux élections qu'il avait déclenchées, et l'on voit bien que son aura a pâli, quand bien même il occupe toujours la scène à l'occasion des crises internationales multiples. Mélenchon était passé à travers les gouttes, voire même s'était requinqué avec le Nouveau Front Populaire, mais là, c'est plus original, il est désormais prêt à saboter ce qu'il avait impulsé pour tout ramener à la présidentielle qui est son unique objectif personnel.
Bref, les bonapartistes se portent nettement moins bien. Et pourtant, ce ne sont pas les partis traditionnels qui ont joué un rôle là-dedans, puisque LR est en lambeaux, les centristes survivent en apnée avec Bayrou qui se contente de ne pas couler, le PS se re-re-re divise et ne sait plus que jouer "retour vers le passé" usé. Certes les écologistes tiennent bon, notamment dans les villes, mais pèsent peu car toutes les avancées écologistes sont détricotées une par une, malgré des mobilisations citoyennes sur de nombreux thèmes.
Ce qui veut dire que la décomposition avance à grand pas et si les solutions trop faciles des bonapartistes s'éloignent, ça ne donne pas pour autant de clés politiques pour préparer l'avenir. Ce régime doit mourir, c'est tout ce qu'il lui reste à faire, toute la question étant de savoir comment le nouveau monde émergera et quand, car c'est dans ces entre-deux que les crises peuvent dégénérer.
Les villes, les régions, les autres niveaux de pouvoir possibles doivent prendre le relais. Comme je l'ai proposé dans un autre post et aussi dans un texte publié sur AOC (le tout en accès ouvert sur mon site personnel), des parlement régionaux tirés au sort, en vue d'un fédéralisme citoyen constituent l'une des pistes qui méritent d'être explorées. A vrai dire, tout le monde se trouve tellement sonné par les coups tordus de la bande des Trump/Musk qu'on parvient difficilement à se projeter sur une crise de régime national qui parait presque paisible en comparaison du coup d'état fasciste des fondamentalistes alliés aux USA.
Mais n'oublions pas que la disparition juridique de Fillon a ouvert un créneau improbable au commando Macron, tout heureux de retirer les marrons du feu. Il faut donc observer qui peut capitaliser sur cette crise conjointe des trois bonapartismes pour refaire un coup à la Macron, puisque dans un contexte d'impasse idéologique face à l'offensive réactionnaire, les électeurs vont encore rejouer la partition bonapartiste du sauveur, syndrome décidément permanent de la Ve République.
Il me semble que Villepin se trouve à une intersection idéologique et partisane qui peut redistribuer à nouveau les cartes, sachant que ce genre de contexte favorise l'impasse sur les sujets essentiels de lutte contre la toute-puissance financière, les inégalités, la corruption et la dette qu'elles engendrent, des attaques contre les acquis sociaux, de redéploiement des services publics, et de requalification du vivre ensemble dans une nation devenue diverse. Bref, il n'y a pas sauveur suprême mais tout se met en place pour qu'on en cherche encore un....