Dans ce premier quart de siècle, avec toujours plus d'insistance, il n'est plus question de paix mais de trêve, histoire d'une parenthèse fragile et « plus » calme mais de paix, pas question. Il faudrait pour cela un minimum de justice que le monde des nantis ne veut pas, vu que la géopolitique, les intérêts financiers, le règne des dictateurs commandent. Toujours la même rengaine : trêve politique pour la trêve olympique, trêve à Gaza pour préparer la suite des massacres.
Autrefois la trêve était imposée par l'Eglise dans les guerres d'antan où il fallait la déclarer. C'était avant. Maintenant, pas de déclaration de guerre donc pas de guerre « officielle » même si les morts s'amoncellent et, en France, pas de consultation suivie du vote de l'Assemblée Nationale. Le monarque républicain décide dans la solitude de son ego narcissique, Toute-Puissance révélée.
Trêve de plaisanterie, de flagornerie, la trêve n'est qu'un moment pour mieux préparer la suite en guerre plus affinée, en somme efficace. Pas même de cessez-le-feu ni à Gaza, ni aux frontières libanaises, ni en Ukraine martyrisée, cessez-le-feu qui ne sont à peu près jamais respectés. Ainsi va le monde tout à sa logique mercantile et impérialiste.
Bien sûr la trêve est demandée avec force quand les armes se déchaînent et que rien ne semble plus possible que cette fenêtre dans les tueries mais de paix il n'est jamais question pour ne pas passer par les fourches caudines de la justice qui n'intéresse pas les grands de ce monde, seulement les peuples quand ils ne sombrent pas dans la paranoïa des menaces ou des boucs-émissaires ou gobent les rhétoriques de ces puissants.
Monsieur notre président n'a cessé d'appeler à la trêve olympique pour mieux faire oublier sa double défaite électorale et sa négation du suffrage majoritaire fut-il relatif en refusant de nommer celle choisie par le nouveau Front Populaire – Lucie Castets - avec une formule méprisante d'un simple revers de manche. Il n'est pas étonnant que notre population – au moins une partie - se soit engouffrée dans cet oasis suspendant un moment - deux semaines - violences verbales et institutionnelles, mensonges et déni démocratique, tout à la fête, à son ivresse après tant de mois de tensions exacerbées quand ce Monsieur colle et caracole en son château, identique à lui-même. Marre de ces combats-impasses, de ces politiques qui ne regardent que leurs nombrils d'organisation et d'intérêts ; marre de ne plus pouvoir espérer des jours meilleurs avant bien des lunes d'une autre planète.
Même avec les chassés de JO qui feraient tâche dans le décor parisien, même avec le paquet de fric jeté à l'eau pour nager dans la Seine avec des chiffres opaques pour vérifier son innocuité, même avec cet été de ministres-démissionnaires et députés ce qui est le comble de la confusion des pouvoirs législatif et exécutif, même avec tout ce tintouin pour une entreprise privée dite C.I.O. qui se frique avec ces jeux, même avec tout ce que nous avons de bien troubles depuis si longtemps, il fallait une rupture, même provisoire, même illusoire, avec cette société malade de l'absence de démocratie, malade de sa violence, de ses mensonges, de son mépris, des trahisons pour s'enivrer avec ces sportifs qui reproduisent au plus haut niveau la performance que ne cesse de prôner cette économie libérale pour enrichir les plus riches qui n'ont jamais assez. Oui, ces champion·nes même les moins médaillé·es participent tout à la fois à la joie du public présent ou à distance qui met de côté un moment la dure condition d'une société pathogène et profondément injuste comme à la glorification du culte de la performance, quintessence de cette société ancrée dans toutes les formes d'inégalités et de discriminations quand bien même sa devise porte « égalité » au plus haut niveau des valeurs républicaines. La trêve fut de cris et d'émotion. Le pays ne s'en porte pas plus mal. Les bombes ailleurs sont encore tombées.
La trêve n'attendra pas la fin de l'année pour dynamiter ce fragile rempart contre le réel qui n'incite guère à l'optimisme mais à le fuir et à résister de toutes les manières.