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Billet de blog 3 août 2008

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Le Bleu de l'Espoir !

Cette semaine une annonce scientifique fit le buzz : celle d’une recherche prometteuse et d’une nouvelle molécule, le Rember™.Les résultats ont été présentés par TauRX Therapeutics de Singapour lors de la conférence internationale sur la maladie d’Alzheimer tenue à Chicago début 2008.

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Cette semaine une annonce scientifique fit le buzz : celle d’une recherche prometteuse et d’une nouvelle molécule, le Rember™.

Les résultats ont été présentés par TauRX Therapeutics de Singapour lors de la conférence internationale sur la maladie d’Alzheimer tenue à Chicago début 2008. Rappelons brièvement que l’étude concernait 321 malades répartis dans 17 centres de Grande-Bretagne et de Singapour. Une simple balade sur les moteurs de recherche vous donnera les mêmes développements ou les mêmes micros-trottoirs avec quelquefois les mêmes argumentaires de réticence.Alors à Médiapart, piquons-nous de curiosité en allant plus loin que les dépêches d’agence pour savoir ce qu’est cette fameuse molécule qui semble en perturber certains, quant à une menace éventuelle pour des budgets provisionnés souvent extorqués (franchises médicales), une trop grande simplicité pour une maladie posant un problème majeur de santé publique, et même une trop rapide disponibilité envisagée à l’horizon 2012 : c’est déjà demain ! Rember™ (molécule active : méthylthoninium ou bleu de méthylène)

Certes TauRx Therapeutics rappelle que la formulation utilisée diffère de celle en usage courant en médecine dont la fabrication a d’ailleurs été abandonnée il y a cinq ans et met en garde quant à une utilisation du simple bleu de méthylène dans l’indication Alzheimer. Il n’en demeure pas moins que l’hypothèse de départ fut cette part de hasard qui fit que le Pr. Wischik, en faisant tomber une goutte de bleu de méthylène dans un tube à essai, constata la dissolution de l’échantillon de protéines Tau sur lequel il travaillait.

Ainsi vingt ans après, son équipe semble être en mesure de démontrer pour la première fois qu’il est possible de stopper la progression de cette maladie en ciblant des mécanismes fortement corrélés avec elle.
Le bleu de méthylène pourrait aussi retarder la sénescence et un prochain essai pourrait cibler, dans la maladie de Parkinson, le repliement anormal du neuromédiateur alpha-synucléine qui s’accumule dans le cerveau des malades en formant des corps de Lewy.

Flashback sur un « vieux » médicament intéressant

Identifié par Paul Ehrlich aux alentours de 1891, depuis 1930 le bleu de méthylène était utilisé dans les indications d’infections urinaires et plus tard pour traiter la malaria. Il disparut en tant que tel pendant les guerres en Asie, lorsque les militaires américains dénoncèrent ses deux effets secondaires inévitables, mais réversibles (urine verte et selles bleues). L'intérêt dans son utilisation a récemment été ranimé , notamment à cause de son coût peu élevé. Plusieurs essais cliniques sont en cours, essayant de trouver un nouveau médicament.Son potentiel redox a permis l’utilisation de doses importantes de bleu de méthylène comme un antidote à l'empoisonnement au cyanure de potassium, une méthode évaluée avec succès en 1933 par le Dr Matilda Moldenhauer Brooks à San Francisco. Le Bleu de méthylène a été aussi utilisé au milieu de siècle dernier dans le traitement contre l’empoisonnement au monoxyde de carbone.

En temps qu’agent vasoactif, le bleu de méthylène est un inhibiteur de la guanylate cyclase soluble et peut donc s'opposer aux effets de la production de NO au cours du choc septique. Il respecterait les propriétés immunologiques, antiradicalaires et anti-infectieuses du NO, sa spécificité d'action sur la guanylate-cyclase et son effet à long terme chez des patients en choc septique restent à démontrer.

L'utilisation du bleu de méthylène dans le traitement de l'encéphalopathie induite par l'ifosfamide a été décrite dans plusieurs rapports de cas anecdotiques et dans une analyse rétrospective de dossiers mais aucun essai clinique contrôlé n'a été retrouvé. Chez quelques patients, le bleu de méthylène s'est révélé contribuer à la disparition des symptômes d'encéphalopathie dans un délai de 10 minutes après administration, mais il a une efficacité modeste dans la plupart des cas. Chez les autres patients, les symptômes ont disparu dans un délai compatible avec une disparition de l'encéphalopathie induite par l'ifosfamide sans traitement.

Les données disponibles provenant de rapports de cas anecdotiques indiquent que le bleu de méthylène est une option dans le traitement de l'encéphalopathie induite par l'ifosfamide, en particulier chez les patients présentant des symptômes sévères de toxicité.

Et pendant ce temps, la France qui avait pris le problème à bras le corps, s’empêtre dans les propositions, tire un plan sur la comèteElle se fait son cinéma !

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