Dimanche 13 avril 2025
Nous voilà de nouveau, toi et moi, prêts à reprendre le cours de notre existence terrestre sur l’océan de la vie après trois Dominical Day d’entraînement et celui qui nous précède ce jour; ce dernier ayant été d’une rarissime épreuve littéraire olympique. Il est toujours délicat après une telle intensité scripturale et une descente aussi profonde dans les limbes de la conscience humaine de revenir en surface pour reprendre un voyage sur une étendue aussi vaste avec pour seul horizon, les confins de l’immensité cérébrale qui sont tout aussi complexes que cette précédente plongée littéraire.
Les premiers vents porteurs gonflant de nouveau les voiles pouvant paraître insignifiants au regard de ces quatre derniers Dominical Day, il ne serait pas déraisonnable de s’accorder un arrêt momentané afin de remettre de l’ordre, décider d’un cap et de terminer la préparation d’une Lettre intemporelle, d’une lettre à Minerve, d’un prélude, indépendant de toutes celles qui ont été scripturalisées de manière hebdomadaire et qui le seront dans l’avenir.
Un exercice subtil et délicat s’il en est, car elle se devra être déliée de la temporalité humaine afin d’être perpétuellement contemporaine et toujours adressée à l’Inconnue du train, à Minerve, toujours à Minerve.
Un affalage des voiles ne serait donc pas déraisonnable, mais toutefois une erreur impardonnable en ce qu’elle s’apparenterait ici à de la paresse intellectuelle et à laquelle, je ne survivrai pas plus d’une journée et pas davantage l’araignée du destin qui m’accompagne depuis mon premier jour. Le cap va donc être mis en direction d’un secteur particulier de l’océan de la vie, plus précisément orienté vers une zone au sein de laquelle, tu pourrais aisément te trouver depuis ton premier jour. Quelques semaines de voyage afin d’en explorer chaque recoin n’a de semblable qu’une brindille comparativement à l’arbre de vie et ne sera donc cause d’aucun retard concernant cette rencontre qui nous est dévolue comme un héritage dont seule la date exacte nous est inconnue.
Concernant sa genèse, sa propagation et sa projection dans le monde réel, il n’est aucun retard à déplorer, car sa préparation touche à sa fin et c’était là, ce qui importait. Nous pouvons donc nous concentrer sur le cap qui va nous occuper lors des prochaines semaines.
Le destin d’une Minerve étant opposé à la normalité du plus grand nombre, aussi, elle ne peut être qu’une « enfant sauvage », une parmi quelques-unes.
A comparaison : 12 dieux de l’Olympe, 10 dieux du panthéon.
Ce n’est donc pas au sein d’une myriade indéterminée que Minerve se trouve, que tu vis non plus, seulement là où je ne me suis pas encore rendu.
Qu’est-ce qu’un « enfant sauvage » à l’instar de la définition de la communauté médicale ?
Une question purement rhétorique pour toi et moi, mais il est des lecteurs, des lectrices lambdas qui seront toujours curieux d’en avoir une définition qui leur soit préhensible afin d’appréhender un concept dont ils ne retiendront qu’ils en sont tellement éloignés qu’ils n’en saisiront que la surface des mots. Qu’importe, ce sera une entrée en matière avant de les rejoindre individuellement lors des semaines suivantes.
Mythes et légendes des enfants sauvages à travers le temps
Présents dans toutes les communautés de par le monde depuis les premières lueurs de l’aube de l’humanité, il est des enfants particuliers, des enfants sauvages, des êtres singuliers qui, de par leur unicité, vivent leur différence en marge de la rigidité des normes sociales, à l’écart de l’étau de l’anormalité du plus grand nombre et de la normalité de tous les autres fuyant le phototype de la raison. Des observateurs, des êtres indépendants arborant un inébranlable regard acéré, une féroce acuité sur la dynamique des sociétés et des relations humaines. Hétérodoxes, anomaliques, privés d’instinct grégaire, sauvages par nature, distincts de par leur iridescence neuronale et vibrant d’un attrait inassouvissable pour la recherche perpétuelle de leurs semblables où qu’ils se trouvent, ils n’ont de cesse de souhaiter se découvrir, se trouver où que chacun se dissimule. Des mégalopoles urbaines semblables aux systèmes sanguins, aux vastes étendues de Mongolie, jusque dans les déserts les plus inhospitaliers.
Intensément cérébraux, libres de tout dogmes, asociaux, indomptés, farouches, étrangers aux codes sociaux des sociétés inhumainement civilisées, il n’est pas rare que ces enfants sauvages développant sans cesse leur singularité, évoluent dans les profondeurs de la conscience humaine afin d’en explorer chaque sentier, les plus infimes et lointaines contrées abandonnant dans cette exploration, parfois, leur humanité au profit d’une absolue déshumanisante rationalité les éloignant de l’expérience de la chaleur humaine afin de se transcender par un exil cérébral au détriment de l’expérience collective.
Élèves de la connaissance, esclave d’une inextinguible soif de la sapience, à jamais satisfaits, ni rassasiés, ne cessant jamais d’apprendre, d’accumuler de nouveau brins de préhension cérébrale, refusant obstinément l’obscurité de l’ignorance, gravant à jamais leur élément primaire sur leur peau, dans chacune de leur cellule afin de le transmettre aux générations futures tel un atavisme qui trouvera toujours une particule élémentaire afin de lier les générations antérieurs aux générations futures, chacun d’entre eux ne représentant qu’une infime parcelle immémoriale d’un continuum des connaissances accumulées sans fin et indispensables à la résurgence de leurs origines.
Jamais dans l’instant, toujours présents dans l’anticipation d’un futur trop proche, ils sont libres et voyageurs naviguant perpétuellement sur l’océan tumultueux de la vie, patientant à l’orée des forêts, isolés sur l’île silencieuse de l’arbre de vie au centre de laquelle est érigée une tour de verre. Ils sont des enfants de la forêt, du paradoxe, de la Terre, du soleil, de la nuit, des étoiles mourantes, … Des interrogateurs silencieux qui, jamais ne s’approchent trop près des sociétés humaines et de leurs traditions sans se protéger derrière un voile afin de n’être reconnus que par leurs contemporains qui, également, aspirent à la connaissance et à la pure authenticité. Des êtres si particuliers à la recherche perpétuelle de cet Autre pour former une unicité, un non-collectif s’opposant aux structures sociales qui ne seront jamais que l’incarnation de ce que l’inhumanité intrinsèquement humaine a offert sur l’autel du sacrifice aux prémices de son évolution afin de survivre de par ses faiblesses en réponse aux dangers et aux défis qui se dressaient devant elle.
Ces enfants sauvages à jamais indifférents au sort de leurs communautés de naissance, de leur fratrie qui, jamais n’ont souhaité participer à l’inévolution des sociétés humaines dont ils ont toujours été étrangers au regard de leur intrinsèques particularités opposées à la masse de tous les autres, ont dévolus leur existence à l’édification de sanctuaires, d’univers à jamais éloignés du regard de ces communautés afin de s’épanouir libre du regard de tous. Physiquement présents, cérébralement absents, ces enfants sauvages ne sont que des marionnettes désarticulées de chair et de sang aux fils invisibles, arborant un semblant de présence lorsque la nécessité l’exige selon les besoins de leur propre survie et en détachent tout aussi rapidement ces fils lorsque le temps de disparaître leur parvient comme une ultime nécessité de survivance.
Ce fût le cas de l’enfant de la forêt au sein d’une tribu primitive d’Amazonie qui lors de son initiation pour renaître au sein de sa communauté en tant que guerrier, pour son passage à l’âge adulte, pour l’enfant du chaos et de son ultime souhait de se délivrer de ses résurrections et de tant d’autres depuis les premières lueurs de l’aube de l’humanité. Également de tous ceux dont le récit est contenu dans les légendes et les mythes des sociétés primitives, des hommes premiers et dont les marques indélébiles sont profondément ancrées en eux. Des êtres particuliers venant au monde jour après jour tout au long de leur existence perpétuelle et renaissant après chaque période de sommeil pour revivre l’expérience humaine identiquement à celle vécue au premier jour de l’apparition de l’Originel parmi les hommes, forgeant ainsi de nouveaux mythes dans les peuplades les plus reculés des dernières communautés humaines fuyant les civilisations expansionnistes.
De la rage de l’enfant du tonnerre abandonné sur les montagnes rocheuses de l’Himalaya, à la terreur qu’inspirait l’enfant loup lors de chaque nuit sans étoiles, il est également le descendant de l’enfant de la nuit et de celui qui entreprit de sauvegarder la mémoire de ces êtres insondables et si différents de par chacune de leur particularité; l’enfant du paradoxe. Ce scripteur toujours présent à la croisée du passé le plus lointain de ses ancêtres, du présent de ses contemporains à l’avenir incertain des siens et jusqu’à la prochaine disparition de l’enfant de l’humanité. À l’image de l’arbre de vie reliant chacun de ses pairs, ce dernier porte en son élément primaire, en sa particule élémentaire, les stigmates gravés au plus profond de chacune de ses limbes cérébrales. Une condamnation essentielle et indispensable à la survie d’une communauté d’individus épars sur la terre des hommes et dont les rares et tumultueuses rencontres sont toujours synonymes d’intenses palinodies et de transformation.
De leur spécificité, naît leur unicité et tout autant diaporisante à se rassembler en communauté, tant l’incompréhension de leur langage et l’harmonie de ce qui les relie s’entremêlent parfois difficilement.
De leur passage dans l’esprit des êtres qu’ils croisent, ils ne laissent derrière eux que des bribes incandescentes, des fragments d’images, des mots, des lettres, des messages, des souvenirs éphémères, un écho de leur existence…
Les enfants sauvages toujours portent en leur regard, le symbole de l’unicité de leurs prédécesseurs et de leurs successeurs avec cet instinct originel qui les relie à jamais quelle que soit la distance qui les sépare. Ordonnateurs de passerelles franchissant les abyssales frontières invisibles entre leur particule élémentaire, transmetteurs d’un entendement oublié, témoignant d’une abnégation sans borne qui, malgré ses excès et ses aberrations, aspirent à la transmission aux générations futures de ce qui les unis.
De l’interconnexion qui les relie par leurs origines, ils incarnent une mémoire collective dont chacun possède un fragment incompréhensible isolé de tous les autres et destructible par l’unique volonté de son possesseur pour n’être que dans l’attente de la renaissance dans un nouveau corps au terme de génération permettant l’oubli de son contempteur.
De la disparition d’un enfant sauvage, coïncide toujours dans l’instant suivant l’émergence d’un nouveau-né portant en lui un atavisme et l’histoire de l’un ses prédécesseurs. De l’apparition d’échos fugaces, de fragments d’images, à une respiration cosmique quelques brèves années parfois après la naissance, sinon immédiates, elles solidifient lentement la particule élémentaire à l’élément primaire.
Ils ne sont que des enfants sauvages dit-on, mais tellement davantage…
Post-scriptum,
C’était ce vendredi, nuit de pleine lune et lorsque je me décidais à refermer les antiques volets en bois de la chambre, j’ai profité de quelques instants pour observer un Batman dans la cour de l’immeuble. Il veillait dans l’obscurité, en volant maladroitement et de manière chaotique en un cercle approximatif parce qu’une chauve-souris vole rarement en ligne droite et en particulier dans une cour d’immeuble, où elle peut aisément, en moins trois secondes, se prendre un mur en pleine face. Elle devait certainement ce soir-là chasser des insectes à défaut de chasser des criminels à Gotham city.
Avait-elle des collants noirs et un slip par-dessus ? C’est possible, mais il faisait tellement sombre et son slip devait également être obscur.
La finalité de ce post-scriptum, qu’elle est-elle ? me diras-tu…
Si tu avais été présente à la fenêtre ce soir-là, tu aurais échappé à ce post-scriptum et ce Batman en slip chassant les insectes nous aurait fait rire tous les deux.
Une lettre à une Inconnue ne devant plus se refermer sans le passage de mes livres lus au cours de la semaine.
C’est moi qui souligne
Nina BERBEROVA
Actes Sud
Achevé d’imprimer en juin 1989
Page 264
J’ai eu l’occasion de fréquenter beaucoup de monde au cours de ma longue vie, et j’ai appris qu’il y a des gens dont on peut faire le tour en une soirée, en une semaine ou en une année, alors qu’il en est d’autres dont on n’arrive jamais à épuiser les richesses. Chez ces derniers il se passe à chaque instant quelque chose : ça bouge, ça travaille, ça remue, ça disparaît pour réapparaître à nouveau. Des rouages se mettent en marche, des ressorts de tendent, des aiguilles oscillent, des barrières s’ouvrent, des feux clignotent et parfois même on a l’impression d’entendre ce qui se déroule dans leur crâne : la chaîne avance, les transmissions sifflent, les moteurs vrombissent. Avec les personnes les plus simples, les relations sont également plus simples et se fondent exclusivement sur la sympathie réciproque, ou parfois l’attachement. Des années durant se prolonge une conversation banale qui a débuté un jour, par hasard, et qui ne mène jamais nulle part.
Lu et déposé dans un wagon de train le 09 avril 2025
Les neiges du Kilimandjaro
Ernest HEMINGWAY
Le livre de poche
Dépôt légal nº2888 2e trimestre 1963
Page 49
Et alors, au lieu d’aller vers Arusha, ils tournèrent à sa gauche; naturellement il se dit qu’ils avaient suffisamment d’essence et, regardant en bas, il vit un nuage d’un rose tamisé se déplacer au-dessus du sol et dans l’air, comme la première neige d’un blizzard soudain surgi de nulle part, et il comprit que les sauterelles arrivaient, venant du Sud. Ensuite, ils commencèrent à prendre de l’altitude en direction de l’Est, semblait-il; après quoi, cela s’obscurcit et ils se trouvèrent en pleine tempête, la pluie tellement drue qu’on eût cru voler à travers une cascade, et puis ils en sortirent et Compie tourna la tête et sourit en montrant quelque chose du doigt et là, devant eux, tout ce qu’il pouvait voir, vaste comme le monde, immense, haut et incroyablement blanc dans le soleil, c’était le sommet carré du Kilimandjaro. Et il comprit que c’était là qu’il allait.
Lu et déposé dans un wagon de train le 10 avril 2025
L’écume des jours
Boris VIAN
Edition 10/18
Dépôt légal : 2e trimestre 1963.
Page 151
Chick souleva le couvercle de son pick-up à deux plateaux et mis deux disques différents de Jean-Sol Partre. Il voulait les écouter tous les deux en même temps, pour faire jaillir des idées nouvelles du choc des deux haut-parleurs, afin que sa tête se trouve toujours juste à l’endroit où ce choc aurait lieu, et conserve, automatiquement, les résultats de l’impact.
Lu et déposé dans un wagon de train le 13 avril 2025
Le mystère de la chambre jaune
Gaston LEROUX
Folioplus classiques
Impression Novoprint à Barcelone, le 18 août 2003
En cours de lecture et sans extrait à partager ce jour
Une lettre à une Inconnue ne devant plus se refermer sans une citation personnelle qui vaut parfois mille mots.
Lorsque j’ai envie de rencontrer une personne qui me ressemble et qui pense comme moi, j’utilise un miroir et lorsque j’ai envie de la même chose en groupe, je vais à la fête foraine au palais des glaces.
Si tu as récupéré une enveloppe coquelicot, nous pourrons nous retrouver là où je t’attendrais désormais chaque Dominical Day avec un Caramel Macchiato Chantilly.
Table d’un Inconnu : Starbucks, 2 rue Victor Hugo, Lyon
Dimanche 20 avril 2025 : 10H30 – 14H30
Également disponible sur un banc de lecture : Place des Arts, Villefranche-sur-Saône entre 16H30 et 18H30. (sauf en cas d’averse ou de températures inférieure à 15°)
Lundi 21 avril 2025 – Mercredi 23 avril 2025 – Vendredi 25 avril 2025
Les lettres à une Inconnue évoluent également vers une rencontre mensuelle autour d’un Drunch végétarien sur le principe de l’auberge espagnole en une galerie d’art privée au sein de mon lieu de vie, au cœur du centre-ville de Villefranche-sur-Saône (Coordonnées disponibles sur simple demande)
Dès lors que nous nous serons rencontrés une première fois en l’un des lieux ci-dessus et aurons pris le temps d’une conversation, une place te sera réservée chaque mois.
Samedi 03 mai 2025 – 18H30
Nombre de lettres coquelicot disséminées depuis le 09 janvier 2025 : 300