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Billet de blog 21 septembre 2025

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Écrivaillon sans éclat, lecteur vorace

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Chroniques d’un écrivaillon sans éclat

Cette lettre dominicale dresse le bilan d’une année d’écriture entre abondance de sujets, utopie fragile et silence créatif. Elle mêle introspection, lectures de Tchekhov, Ustinov et Vian, souvenirs de la tante Jeanne et digressions ironiques sur notre époque. Entre légèreté, nostalgie et causticité, elle trace une quête d’authenticité au milieu du tumulte.

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Dimanche 14 septembre 2025

Une année de lettres dominicales et un bilan ont été scriptularisés. J’ai toujours trouvé de la matière pour écrire, des sujets à traiter et jamais ne s’est posée l’hypothèse d’un vide créatif ou d’une absence de pistes de réflexion, car lorsqu’on projette ses rêves et son utopie hors de soi pour les coucher avec ardeur sur des pages et les agrémenter d’interrogations comme un jardin anglais, la matière est présente au premier plan en permanence et il suffit de tendre la main pour s’en saisir, l’observer en détail, la manipuler, l’ouvrir et en découvrir l’intérieur. On ne sait même parfois où donner du regard, où porter son attention durablement sans se laisser disperser et en de rares occasions, l’immensité de ce qui se trouve devant nous provoque un état passager de désillusion. C’est ce qui s’est déroulé cette semaine. Je me suis retrouvé devant une immensité de sujets à traiter, devant mon utopie, mon avenir et après m’être retourné la semaine précédente pour observer le chemin parcouru, j’ai pris conscience de l’importance de ce que j’avais réalisé, qui est en même temps, d’une insignifiance absolue au regard d’une vie humaine. Quelques dizaines de lettres… La belle affaire, rien de plus que quelques aiguilles de pin au milieu d’une forêt de mélèzes. 
Ce n’est pourtant pas tant la longueur de ces lettres, mais le contenu qu’elles recèlent qui me trouble. Non que j’ai dispersé mes rêves et mon utopie pour les disséminer aux quatre vents afin de m’en débarrasser, mais je peux désormais contempler tout cela d’une seule brassée et c’est ce qui me trouble.
Qu’ajouter à ce fragile édifice qui sera par nature toujours incomplet et d’une extrême fragilité ? Car, c’est cela dont il s’agit et suivre un chemin que l’on défriche à mesure qu’on le crée, c’est prendre le risque de se perdre dans une direction dont les traces de pas que nous laissons disparaissent à mesure que l’on revient sur nos traces pour se retrouver sur ce même tracé que l’on éclaircit à nouveau en imaginant que l’on avance toujours plus loin.
Il s’agit donc maintenant d’effectuer un choix spontané. Nul sentier à suivre, à ouvrir, à créer, plus simplement avancer au milieu des herbes hautes sans se soucier de la direction. Se frayer un passage éphémère et devenir plus attentif qu’auparavant aux signaux que mon atavisme me fait parvenir sous forme d’instinct et d’intuition.
J’ai encore à gérer les futures publications des lettres de ma tante Jeanne en respectant un désordre chronologique sauf pour la première, également les récits d’enfants sauvages et des lettres s’adressant aux enfants de demain qui plus tard seront des vieillards, ainsi qu’à des inconnus en leur adressant des messages personnels, mais cette semaine mon univers fut silencieux, sauf à ce que j’ai été dans l’incapacité à l’entendre.
Après avoir passé quelques semaines à lire les correspondances de Tchekhov et l’autobiographie d’Ustinov, un voile de silence s’est déposé sur ma relative créativité scripturale d’écrivaillon sans éclat et de lecteur vorace. L’envie d’écrire est restée prégnante, devenue urgente à mesure que la semaine s’est écoulée et pourtant, rien ne s’est déroulé comme je l’aurais souhaité.

Heureux les épicuriens hédonistement carpe diemistes ignorants qui jouissent de leur cuisses qui frottent lors de leur séance quotidienne de marche pour se rendre dans n’importe quel fast-food, alors que je me creuse parfois les méninges pour aligner du texte en texture paragraphiesque, bien qu’une lettre n’est jamais un essai littéraire ou une nouvelle que l’on organise pour percuter le lecteur et lui soutirer du plaisir jusqu’à la lecture de la dernière ligne, car c’est uniquement un message que l’on adresse à l’autre en étant honnête avec soi-même, également l’opposé d’un email instantané qui arrive dans une « boîte aux lettres » plus rapidement que le battement de paupière du facteur ; objet numérique identifié, accessible immédiatement où que l’on se trouve, où presque et dont la joie en est toujours incomparablement moindre que son corollaire physique transmissible de génération en génération.
À poursuivre cette lettre ainsi, je vais tomber dans le misérabilisme de la nostalgie et ce serait dommage, et ce serait décevant et je serai dans l’obligation morale de recommencer, aussi dois-je veiller à réorienter cette missive vers son objectif initial. Apporter à une inconnue, un inconnu, une forme de réflexion sur lui-même en raison que je suis un éternel optimiste, bien que lorsque j’observe des gauchiasses dans la rue et le métro, je ne compte pas vraiment sur eux pour financer ma future retraite de fonctionnaire gratte papier. « Il faut que jeunesse se passe » dit-on… Le problème, c’est que l’adolescence, maintenant, s’étire sur plusieurs dizaines d’années et parfois jusqu’à un âge tellement avancé que cela ne frise plus le ridicule, mais le dépasse au-delà de tout entendement.

De toutes ces lettres que je devais remettre à l’impression et à la dissémination dans des wagons de trains, je suis encore en retard, et cette fois, pas comme un homme amoureux porteur d’une bombe à retardement en raison mais comme un procrastinateur né, bien qu’avec un peu de motivation, je devrais avoir terminé la mise sous pli d’ici la fin de ce mois… Ou pas.
Un élargissement de distribution est également en cours d’étude dans d’autres lieux sous forme de street art que j’ai pratiqué étant plus jeune et avec le plaisir d’avoir toujours échappé à la police, mais cette fois avec un concept d’une rare originalité. J’ai dans l’idée que mes dimanches automnaux et hivernaux vont être occupés par des kilomètres de marche lyonnaise… Idéalement dans d’autres villes également.

Lire durant plusieurs semaines, la correspondance d’Anton Tchekhov, c’est du sérieux, l’autobiographie d’Ustinov également, mais du Boris Vian, ça permet de se reposer et de renouer d’agréables liens avec une créativité dont n’importe quel écrivaillon sans éclat a besoin pour écrire, car comme chacun sait, on ne peut écrire et se développer couché sur le papier qu’en se nourrissant de lettres qui sont pour moi, celles de l’alphabet bicaméral latin et non des lettres que je glisse dans des enveloppes coquelicots lorsque j’ai terminé mon temps de procrastination obligatoire afin de culpabiliser avant de me remettre à cet ouvrage lettré. Il arrive parfois régulièrement fréquemment, mais pas trop quand même que mes lectures influencent mon style et parce que j’ai commencé cette lettre avec Peter Ustinov et que je l’ai terminé avec Boris Vian, un lecteur attentif aura sans nul doute remarqué un changement de ton. Concernant les lectrices, les probabilités sont du même ordre. Pour les non genrés, il n’y a aucune gradation de probabilité en raison que s’ils n’ont pas de genre, ils n’existent pas.
Ben voui, je suis un réac…
Ben voui, ma pauve Lucette, si c’est pas désolant de lire un truc pareil !

Sur la courtitude de cette lettre dominicale, je pourrai être tenté d’invoquer des excuses, des justifications, une diarrhée mentale, un exil ou un cambriolage cérébral, sinon un minimalisme savamment orchestré, mais rien de tout cela, seulement des idées qui se sont égarées tellement loin que j’ai été dans l’incapacité de me rassembler complètement et de les entendre. C’est donc le jour idéal pour commencer la retranscription des lettres de ma tante Jeanne, qu’il convient de mettre en lumière, car lorsqu’un nouveau personnage apparaît, il est de bon aloi de lui laisser un peu de place pour se présenter et de se retirer en arrière plan sans pour autant disparaitre dans l’ombre dans l’attente de revenir pour de nouveau lui permettre de revenir sur le devant de la scène avec une première lettre en se retirant avant de reprendre le récit pour venir conclusionner sa lettre, la mienne et ce dimanche afin de recommencer la semaine suivante comme une bouteille de Klein lorsque je me retrouve en moi-même afin d’en extraire quelques bribes d’une pensée foisonnante dont je me sens le devoir de le mettre en avant comme un comédien qui se ferait oublier au profit de la parole de son personnage, tel l’archéologue au premier plan de l’histoire qui découvre et met en lumière le passé en s’effaçant afin d’éclairer ce qu’il convient d’observer afin de l’analyser pour le replacer dans une perspective comparative avec son présent de création et celui de sa redécouverte nous plongeant dans une continuité d’évolution et qui à l’échelle de l’univers, cette bouteille de Klein n’étant rien de plus que l’application de la théorie des ponts d’Einstein-Rosen permettant un voyage vers d’autres dimensions qui sont intrinsèquement reliées et permet un retour au point initial par la théorie des cordes.

J’aurais aisément pu me dispenser de clôturer cette missive sans ce concept plongeant 99,99 % des lecteurs dans un abyme d’incompréhension, mais il n’est pas dans ma nature de me comporter en facilitateur d’un lectorat paresseux en ce que je recherche toujours le 0,01 % au détriment de la masse que j’aime à exclure de mon existence de Misanthrope.

Présentation de ma tante Jeanne
Personnage haut en couleur et en humeur, excentrique et libre par nature, politiquement incorrect, possédant des idées hautes et des idéaux, pourvoyeuse de lettres, de conseils, collectionneuse d’art et d’antiquité, croqueuse d’hommes, détentrice d’un chien en porcelaine sur une télévision à écran cathodique.
Ces lettres qu’elles m’adressaient n’étaient jamais graves, toujours légères, souvent frappées du sceau de l’évidence, et parfois complexes avec un langage peu adapté à un enfant en bas âge, elles formaient ce que l’on pourrait nommer « La légèreté de lettre ».

03 octobre 1972
La légèreté de lettre : conseils d’une tante pour l’avenir

Cher Enfant,
Te voilà à la veille de ton premier anniversaire et déjà plein de fougue et d’une insatiable curiosité pour le monde qui te fait face.
Ton destin est celui d’être l’historien de tes ancêtres, des enfants sauvages qui t’ont précédé au cours des millénaires au sein des sociétés humaines et dont tu es le successeur, mais également l’ancêtre de ceux qui viendront après ton départ.
En toi se trouve l’élément primaire de tes origines, une particule que je possède également et qui nous rassemble par une pensée commune.
De ton expérience humaine acquise durant cette première année, il n’en est qui seront moins riches au cours de ta vie d’enfant et d’homme dont tu devras prendre garde à ne jamais les oublier afin que jamais, elles ne soient ensevelies.
Poursuis à jamais ton voyage sur l’océan de la vie et ne te laisse pas distraire par les femmes ancrées dans la terre, simulant l’art du voyage cérébral avec une simple littérature de copistes.
Ta tante qui t’embrasse tendrement

Une lettre ne devant plus se refermer sans le passage de mes livres lus au cours de la semaine.

Cher Moi
Peter Ustinov
Édition Stock
Dépôt légal : 3e trimestre 1978
Page 412
– Une femme parfaite n’aurait pas de personnalité. Hélène est un mélange harmonieux de délicieuses imperfections, ce qui est le plus grand compliment que je puisse faire à quelqu’un. J’espère seulement qu’elle trouve mes propres imperfections aussi délicieuses que moi les siennes. C’est si facile de donner quand quelqu’un est là pour recevoir ; c’est si facile de recevoir quand quelqu’un est là qui a tant à donner. Elle à presque fait de moi l’homme que j’espérais en secret devenir un jour. Elle est venue à mon secours à un tournant de cet épuisant, terrifiant et magnifique voyage à la découverte de soi qu’on appelle la vie. Et de cela je lui suis éternellement reconnaissant.
Lu et déposé dans une boîte à livres le 10 septembre 2025

L’automne à Pékin
Boris Vian
Edition 10/18
Dépôt légal : 4e trimestre 1967.
Page 295 et début de la page suivante
La composition de l’expédition sera donc la suivante : une secrétaire, deux ingénieurs, deux agents d’exécution, et trois conducteurs de camions. En raison des propriétés particulières que possède le soleil en Exopotamie, et étant donné la nature du sol, il risque de se produire des phénomènes remarquables ; il faut tenir compte également du fait qu’en Exopotamie se trouvent déjà une archéologue et ses aides, un ermite et une négresse, et l’abbé Petitjean, qui a beaucoup d’ermites à inspecter. Les agents d’exécutions partent avec leurs familles. La complexité de l’ensemble fait que tout ce qui peut leur arriver est vraiment, malgré l’expérience acquise, impossible à prévoir, encore plus à imaginer. Il est inutile de tenter de la décrire, car on ne peut concevoir n’importe quelle solutions.
Lu et déposé dans une boîte à livres le 14 septembre 2025

Une lettre ne devant plus se refermer sans une citation personnelle qui vaut parfois mille mots.

Les livres de développement personnel des gourous à la mode enrichissent uniquement ceux qui les écrivent, et pas les lecteurs plus heureux, plus épanouis ou plus intelligents, mais seulement un peu plus dépendants de ces écrivains de bibliothèques Ikea en sciure de bois agglomérée.

Chroniques d’un écrivaillon sans éclat

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