En dix ans et seulement quatre longs métrages, Carlos Reygadas est devenu assurément un génie du septième art, comme on en compte très peu (moins d’une dizaine) dans le cinéma contemporain parmi les cinéastes encore vivants. Ce sont des créateurs, capables de renouveler un art au moment où celui-ci se trouverait dans l’impasse d’avoir tout expérimenter. Le cubisme comme le surréalisme en peinture ont su offrir de nouvelles voies au moment où le cinéma lui lançait de véritables défis. À noter également que le cinéma est né à la même époque que la psychanalyse (respectivement 1895 et 1897), ce qui fait que l’histoire de chacun d’eux leur est toujours restée étroitement liée. Ainsi, le démiurge Reygadas, s’intéressant à l’objet cinématographique comme moyen d’expression personnel, puise dans son essence et réussit avec Post Tenebras Lux à libérer rien moins que le septième art de la gangue (d’une prétendue définition du cinéma) dans laquelle il peut souvent s’enfermer. Car l’intérêt de l’œuvre de Reygadas est de pouvoir aussi bien interroger son propre inconscient, que celui du spectateur mais encore du cinéma en tant que mode artistique d’expression humaine. Il n’y a ici rien d’anodin dans ces métaphores car le démiurge Reygadas est véritablement créateur d’un nouveau monde de possibles : Post Tenebras Lux, littéralement « après les ténèbres, la lumière », cela peut tout aussi bien concerner la naissance d’un être, la création du monde mais aussi la lumière révélée par le cinéma (et par sa sœur jumelle la psychanalyse). Car c’est la lumière qui révèle les images dans le cadre d’une projection. La véritable naissance d’une image se fait sur la rétine et ensuite dans l’imaginaire propre du spectateur.
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Dans Post Tenebras Lux, des scènes se succèdent, sans ordre chronologique apparent comme fil conducteur. Toutes ces scènes sont émotionnellement très marquantes, sollicitant ainsi régulièrement l’inconscient. Si le film est né dans un contexte socioculturel précis associé au Mexique, les associations de chaque spectateur à travers le monde permettront de riches interprétations, livrant autant de lectures possibles qu’il y a de spectateurs. Du moins, à condition de laisser place à la liberté créative d’interprétation qui dépasse et complète à la fois la rationalité. À tout point de vue, Post Tenebras Lux était bel et bien la vraie belle surprise et découverte de la sélection cannoise de 2012, ce qui lui valut le Prix de la Mise en Scène.
Post Tenebras Lux de Carlos Reygadas
120 minutes. Mexique - France - Allemagne - Pays-Bas, 2012.
Sortie en salles (France) : 8 mai 2013
Avec : Adolfo Jiménez Castro (Juan), Natalia Acevedo (Natalia), Willebaldo Torres (Le Sept), Rut Reygadas (Rut), Eleazar Reygadas (Eleazar)
Scénario : Carlos Reygadas
Images : Alexis Zabe
Montage : Natalia López
Assistants réalisateurs : Alejandro Ezpelata et Fernando De La Peza
Son : Gilles Laurent et Raúl Locatelli
Décors : Gerardo Tagle
Effets visuels : Rodrigo Echavaría
Dir. artistique : Nohemí González
Production : Mantarraya Producciones et Nodream Cinéma
Coproduction : Le Pacte, Arte France Cinéma, FOPROCINE, The Match Factory, Topkapi Films, Ticomán
Producteurs : Jaime Romandía et Carlos Reygadas
Producteurs associés : Jean Labadie et Fiorella Moretti
Coproducteurs : Arnold Heslenfeld, Frans van Gestel et Michael Weber
Distributeur français : Le Pacte
Vente internationale : Mantarraya