Sortie DVD de Pour tout l’or de Colombie, de Roméo Langlois et Pascale Mariani
Roméo Langlois est apparu sur la scène médiatique internationale quand il fut prisonnier des Farc du 28 avril au 20 mai 2012. Le jour où il fut enlevé, il avait une caméra à la main parce qu’il poursuivait ses investigations sur le terrain. De cette journée particulière qui débouchera sur de nombreuses morts, il en résulte le témoignage pris sur le vif qu’est Colombie, à balles réelles. Ce reportage, diffusé sur France 24, a obtenu le Prix Albert Londres 2013. Étonnant prix qui vient en fait saluer l’ensemble du travail d’investigation du journaliste reporter, que ce film lui-même. En effet, à part narrer les événements qui ont précédé la détention par les Farc de Roméo Langlois, ce reportage ne nous apprend guère sur la situation en Colombie. Le véritable travail du journaliste se trouve dans son documentaire Pour tout l’or de Colombie. En rendant hommage aux disparus dans cette guerre fratricide, Colombie, à balles réelles témoigne en même temps du hors champs du tournage de Pour tout l’or de Colombie. Le reportage étant destiné à la télévision, il faudra donc accepter la forme télévisuelle du traitement de l’information et des images. Ainsi, les scènes sont nécessairement spectaculaires, les personnes filmées ne souffrent d’aucune ambiguïté quant à leurs intentions, les paroles sont traduites en français (avec des voix off qui surjouent) rendant inaudibles la version originale, le récit traite point par point ses sujets pour parvenir à une conclusion qui montre davantage l’intention des journalistes que la réalité plus complexe en Colombie. Si l’on passe outre toute cette forme encombrante du format télévisuel, il reste un louable travail d’investigation sur un sujet peu connu et qui est pourtant en étroite relation avec l’économie mondialisée. Il est question ici de l’exploitation d’une mine d’or par une firme multinationale canadienne au nord-ouest de la Colombie à Segovia dans le département d’Antioquia : la Gran Colombia Gold. À proximité de cette mine, des hommes et des femmes ont ouvert des mines clandestines pour exploiter cette ressource. Ces entreprises, légales ou illégales, sont également confrontées aux forces de l’ordre payées par la firme canadienne, aux paramilitaires, aux narcotrafiquants et aux guérilléros, chacun tirant profit de l’extraction aurifère. Au fil des investigations, il est démontré que la mine légale est issue d’une exploitation par une compagnie anglaise qui a débuté au XIXe siècle et a cessé son activité car elle devait encore à la fin du XXe siècle les salaires non payés de ses salariés. Il fut décidé que la mine revenait en dédommagement aux travailleurs. Or l’État colombien est intervenu directement pour vendre la mine à la Gran Colombia Gold, au profit direct de plusieurs membres de l’entourage d’Alvaro Uribe, président de la Colombie dans les années 2000. Ainsi, les luttes sociales autour de cette mine sont vite devenues des enjeux nationaux et à travers ce reportage, Roméo Langlois et Pascale Mariani réussissent à concentrer les multiples obstacles au respect des droits fondamentaux de l’Homme en Colombie. La fièvre de l’or qui a décimé le continent américain au moment des conquêtes européennes à partir du XVIe siècle, se poursuit encore aujourd’hui, l’Histoire imposant la fatalité de son regard. Il n’est pas anodin que le reportage se termine avec le point de vue des Indiens colombiens comme seuls véritables défenseurs de l’environnement et du bien-être universel. Il fallait le point de vue de telles personnes désintéressées pour disposer d’un recul et d’un espoir face à cette situation humaine et environnementale inextricable où l’extraction de l’or contamine aussi bien les sols que la raison des hommes.
Pour tout l’or de Colombie
de Roméo Langlois et Pascale Mariani
France - 2012.
Durée : 52 min
Durée totale du DVD : 78 min
Sortie en salles (France) : inédit
Sortie France du DVD : 5 novembre 2013
Format : 1,77 – Couleur – Son : Stéréo
Langues : anglais, français, espagnol, portugais - Sous-titres : français.
Éditeur : Éditions Montparnasse
Bonus :
- 1 livret : Les Fantômes du fleuve (20 pages) de Doan Bui, 75e Prix de la Presse écrite
- Colombie, à balles réelles, de Roméo Langlois, 2012, 26 min