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Cédric Lépine : Pourquoi avoir abordé ce sujet méconnu de la migration au Costa Rica ?
Gabriela Hernández : En réfléchissant un peu, notamment lors des présentations du film, je pense que je n'en avais peut-être pas vraiment conscience lors de la réalisation. En effet, ce qui a motivé le film, à l'origine, c'était une réaction au Costa Rica à l'immigration nicaraguayenne en 2005, très visible et très forte à l'époque, témoignant beaucoup d'hostilité, de stigmatisation et de xénophobie. Je me suis donc dit : « Mais nous ne nous en rendons pas compte, nous ne le reconnaissons pas, nous n'admettons pas que des gens quittent aussi le Costa Rica, que ce n'est pas le paradis que nous imaginons, celui où tout le monde veut venir, celui où personne ne veut partir. »
Il s'avère que la réalité du pays est autre. Les gens partent, et par exemple, dans certaines régions du pays, comme la région sud, Pérez Zeledón, la région de Los Santos, certaines parties de la province de La Juela, Sarcero et Naranjo, beaucoup de gens partent, mais nous n'en parlons pas. Peut-être que de le savoir nous sensibiliserait davantage aux migrants et migrantes, à ce qui arrive aux Nicaraguayen.nes qui viennent parce qu'ils et elles ne vivent pas une vie agréable au Nicaragua.
Il y a donc des gens ici au Costa Rica qui ne sont apparemment pas heureuses non plus et partent. Autrement dit, le Costa Rica n'est pas seulement un pays d'accueil pour les migrants ; c'est un pays qui expulse sa population et c'est aussi un pays de transit, et il l'a toujours été. De par sa position géographique, les cultures et les espèces y ont toujours transité, et elles y sont restées. C'est ce qui a en quelque sorte donné naissance au projet, mais plus tard j'ai commencé à penser que nous avons presque tous et toute une histoire de migration. Parmi ceux qui sont partis, nous avons tous un cousin, un oncle, un parent éloigné qui est parti et n'est peut-être jamais revenu. Je me souviens du cas, par exemple, d'une tante dont le mari est parti, elle avait trois jeunes enfants et elle n'est jamais revenue.
C. L. : Est-ce parce que déjà les personnages de tes films de fiction Agua fría de mar (2010) et Viaje (2015) se déplacent de leur lieu de vie quotidienne pour se confronter à l'ailleurs, que le projet de documentaire de Gabriela a pu faire sens pour toi ?
Paz Fábrega : Oui, je pense que la question de partir ou de rester, les endroits qui manquent mais que l'on souhaite quitter, l'attachement, le désir de partir... Tout ceci a été très présent dans ma vie, dans la réalité, pas seulement dans les films. Mon court métrage de fin d'études, intitulé Temporal (2006), parle d'enfants qui grandissent dans une petite ville avec l'idée d'aller en ville. J'aime parler de ça, et je pense que pour beaucoup de gens c'est un dilemme constant dans la vie, entre vivre là-bas et ici, revenir ou pas.
J'aime aussi beaucoup le travail antérieur de Gabriela qui parle de personnes qui se trouvent en quelque sorte dans une rébellion face à une sorte de résistance à la joie. Pour moi, nous devrions tous pouvoir prendre du bon temps en osant aller vers l'inconnu qui offre une ouverture, même le fait de quitter les choses que l'on connaît coûte. Ce sont là des questions beaucoup plus importantes que d'autres plus courantes dans les récits, comme les conflits et la manière de survivre.
Ainsi, je m'intéresse davantage à la façon dont vivent et s'amusent les personnes un peu en dehors du système, ou celles qui ne gagnent pas d'argent, plutôt qu'à la façon dont ces personnes survivent. Je sais que même si la survie est difficile, il y a néanmoins du plaisir chez elles et il est intéressant de voir comment elles y parviennent.
C. L. : Comment avez-vous découvert cette histoire vraie de fausse équipe de football ?
G. H. : Ce fut une exploration de plusieurs années. J'avais déjà entendu cette histoire, mais j'ai continué à en chercher d'autres, même si j'ai toujours aimé celle-ci. En effet, il me semblait que cette histoire réunissait tous les éléments que je cherchais et aussi qu'elle avait pour mérite de prendre les traits d'une grande farce et qu'elle pouvait aussi bien se terminer.
J'ai voyagé deux fois aux États-Unis et j'ai pu parler à beaucoup de gens là-bas qui avaient des histoires qui sortaient d'un film. Par exemple, j'ai rencontré un père qui était parti, qui avait promis de ne pas se couper les cheveux avant d'avoir revu sa petite fille.
Je ne voulais pas non plus me disperser et tomber dans des situations générales, à essayer de couvrir trop de choses. L'idée était plutôt de se concentrer sur quelques personnages, même s'il s'agissait d'une approche chorale, en tentant de creuser de plus en plus profondément cette histoire initiale.
Nous avons donc finalement opté pour l'histoire de l'équipe de football et à un moment donné nous avons pensé qu'il pourrait aussi s'agir d'une fiction. En effet, nous nous sommes demandé comment nous pourrions réaliser un documentaire si personne ne voulait parler de ce qui s'était passé. C'est alors que nous avons pensé à en faire une fiction. J'ai donc pensé que ce serait bien que Paz partage son point de vue.
C. L. : Comment avez-vous imaginé construire le récit dans un film où il y a beaucoup d'interviews ?
P. F. : Nous n'en avons pas beaucoup parlé avant car nous étions très concentrées sur les personnages à qui nous devions parler. Il s'agissait plutôt de savoir quel genre de choses nous allions faire et pas la manière précise de construire l'image. Je voulais plus déplacer la caméra et Gabriela voulait qu'elle soit plus immobile. Comment faire pour rendre visuellement intéressantes ces images fixes ? Je me souviens au départ que je ne voulais pas d'interviews. Il fallait construire des scènes autour de ces interviews pour que les personnes se sentent à l'aise et n'aient pas l'impression d'être interviewées. Il s'agit simplement de faire en sorte que cela ressemble davantage à une conversation. Ainsi, nous avons essayé d'avoir plus de personnes en même temps devant la caméra et de les faire parler les unes avec les autres. Nous cherchions aussi à partager l'idée qu'il y a des personnes qui n'ont pas bougé d'ici, comme si elles étaient dans leur couloir, dans leur chaise, dans leur hamac. Il s'agissait de rappeler que beaucoup de gens partent mais que d'autres restent à leur place.
Quand la parole commençait à émerger, un flot de témoignages se déversait et nous avons à ce moment-là décidé d'opter pour un trépied. Je me suis dit aussi que j'avais besoin de filmer d'une manière plus vivante. Je pense que ces plans de la brume sont des images que je ressens, avec des scènes aussi d'observation où il se passait des choses sans que personne ne parle forcément. C'était aussi une façon de représenter les villages, à cause de certaines dynamiques, de petits espaces récréatifs.
C. L. : Au fil du film, vous passez d'un regard à l'autre, notamment des informations télévisées aux témoignages directs des personnes sur place. Comment cette évolution s'est écrite ?
P. F. : J'aime le fait que ce ne soit pas explicite. Ainsi, il n'y a pas de récit du genre « j'ai entendu parler de cette histoire dans un article de journal, je me suis posée des questions et nous avons dû partir. » Les images par elles-mêmes racontent l'histoire et cela commence par l'article. Ensuite, les images du brouillard présentent notre déplacement vers là où se trouve l'histoire.
Puis, avec le supermarché, l'histoire commence. Ce n'était pas prévu comme ça, mais c'est ce que nous avons trouvé au montage. Cela raconte un peu comment on affine son regard avec quelque chose qui commence par une anecdote, une note dans le journal. Ensuite, avec la scène du supermarché, on commence à sentir que c'est aussi une légende locale.
G. H. : C'est une histoire racontée de manière chorale, par ces personnages qui permettent aussi de laisser derrière eux l'événement pour devenir davantage quelque chose qui fait partie d'un imaginaire et aussi une réalité, une expérience.
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C. L. : Si le fil conducteur du récit est incarné par Arturo, il est aussi question d'une famille qui réalise la cueillette du café et l'on trouve plus largement le portrait d'une communauté. Pourquoi avoir privilégier cette approche chorale ?
G. H. : Dans ma filmographie ce sont généralement des personnages populaires exprimant un collectif. Il s'agit toujours de groupes de personnes, des familles. Dans le cas de Roofing, le personnage central était une équipe de football. C'est ensuite que leurs familles se sont jointes à eux, parce que leurs familles en faisaient partie. Les familles connaissaient, bien sûr, leur projet, c'est-à-dire qu'il y avait la complicité de toute la communauté. Pour que ce plan fonctionne, pour qu'il réussisse, c'est ce qu'il fallait. Et cela se reflète dans les images et les scènes montrées dans le documentaire.
P. F. : J'ai toujours pensé que ce documentaire devait être choral, parce que c'était aussi construire un exploit à partir de plusieurs points de vue. Parfois, nous parlions du fait qu'il y avait des gens qui connaissaient l'histoire directement, d'autres indirectement, d'autres encore qui en avaient entendu parler. Cela me fait penser que j'ai toujours eu du mal avec cette imposition du point de vue du personnage principal. Dans la fiction, la tendance à suivre le point de vue d'un unique personnage est assez forte mais je pense que le point de vue de plusieurs personnages est plus intéressant.
C. L. : Quel était l'objectif en réunissant un ensemble de témoignages sans l'intervention d'autorités, qu'il s'agisse d'un politique, d'un sociologue, historien ou journaliste étrangers à la communauté ?
G. H. : Il s'agissait de refléter cet imaginaire entre l'invention, la mémoire, ce qui est supposé s'être passé. Peu importe que ce soit une invention ou non. C'est comme si c'était validé sur la base de leurs propres récits.
P. F. : Au cours du montage, nous nous sommes demandé comment assembler ces éléments tournés. Peut-être que le récit qui faisait le plus autorité était celui d'Arturo, parce qu'il l'a vécu directement. Cependant, j'avais l'impression qu'il ne s'agissait pas tant d'une hiérarchie que de donner à chaque chose la place qui lui revenait, parce que les récits de seconde et de troisième main étaient également très intéressants. Ils ont ainsi ajouté une couche de complexité supplémentaire parce qu'ils nous disent ce qui est en train d'être construit là-bas. Là où les témoignages s'éloignent de la réalité, il y a encore beaucoup d'informations.
C. L. : Comment les archives des vidéos tournées par Arturo sont-elles entrées dans le film ?
P. F. : J'ai l'impression que ce serait un autre documentaire sans ces images que j'aime à part entière. J'aime beaucoup ces séquences : la façon dont la caméra bouge, c'est tellement émouvant ! L'arrière-plan est sombre, exprimant leur propre enfermement. Ils ont vécu dans la clandestinité. Comme le dit Arturo, quand ils sont arrivés, ils se sont déplacés mais ne savaient même pas dans quelle partie des États-Unis exactement ils se trouvaient. Je pense que le matériel contient cet aspect émotionnel, comme un état d'esprit très bien reflété.
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C. L. : Dans ce travail de recherche, en dialogue avec d'autres archives provenant de la télévision, que pensez-vous du rôle du cinéma indépendant pour compléter une réalité médiatisée à laquelle il manque quelque chose ?
P. F. : Lorsque l'on représente un lieu peu évoqué par les programmes audiovisuels, il est très important de donner la priorité à la vérité. Cela n'a rien à voir avec l'objectivité mais il faut faire attention à la façon dont on regarde, pour ne pas exotiser ce qui est inhabituel dans un endroit afin d'être fidèle à sa singularité. Il s'agit d'essayer de normaliser tout ce que l'on voit afin de pouvoir le transmettre d'une manière différente. C'est quelque chose d'assez subtil mais il me semble qu'il est très important de toujours garder à l'esprit de ne pas exotiser, de ne pas entretenir l'image officielle de la « pura vida »
G. H. : Oui et une chose que tu as toujours dit et que j'aime beaucoup, c'est qu'il est très difficile de ne pas tomber dans ce portrait du pays présenté comme une carte postale, comme une idéalisation ou une folklorisation. Cela se traduit encore dans la représentation des personnes de la campagne. Nous avons cherché à saisir à l'image une essence qui existe d'une manière transparente et honnête, sans tomber dans l'idéalisation. En effet, il existe beaucoup de complexité dans les histoires qui se sont passées et les réactions diverses du public en voyant le film témoignent de leurs différentes lectures.
Le public est très ému, parce qu'il s'agit d'eux, de leur quotidien. Le vide causé par l'absence de ceux qui sont partis est quelque chose qui touche pratiquement toutes les familles. C'est donc quelque chose de très présent, ça fait partie de leur vie, c'est un drame en quelque sorte.
P. F. : Il ne me semble pas que le film fasse un mauvais portrait du départ. Il dépeint une image qui a ses bons et ses mauvais côtés. Je pense qu'il est très significatif que les gens ressentent ici le film comme un avertissement contre le départ, peut-être qu'ils pensent que c'est plus dramatique que ce que nous voulions dépeindre.
G. H. : La motivation était aussi, en faisant le film, de ne pas tomber dans cette chose, si forte, si dure, si triste, de la représentation de la migration. Nous voulions montrer que le désir de partir pouvait être le produit d'une impulsion vitale humaine. Cet esprit d'exploration, de ces enfants qui voulaient partir, Arturo en est le meilleur exemple : il voulait voir un peu le monde, c'était une aventure pour lui, et un peu une farce aussi, de partir de cette façon.
Nous souhaitions aussi un autre regard que celui développé dans les films sur le thème de la migration qui évoque des histoires désespérées, comme l'a dit Paz, qui se déroulent dans des situations à la limite du respect de l'intégrité physique, où les gens n'ont pas d'autre option que de partir. Nous voulions montrer que partir peut être vécu comme une alternative : voyager, partir pour un certain temps, vivre cette expérience et puis revenir, ou choisir de rester, vivre cette expérience, puis revenir. Le désir de partir et de découvrir le monde est quelque chose de très humain, c'est comme le moteur du monde, c'est ce qui fait bouger la vie et le monde.
P. F. : Ces départs développent aussi une douleur très profonde ici, vécue différemment de la ville, car le sentiment de l'appartenance à la famille est si important à la campagne que les séparations sont vécues plus intensément.
C. L. : Je considère votre film comme un acte politique qui dénonce la criminalisation de l'immigration. En effet, il existe une discrimination de l'immigration en fonction de la différence de classe sociale, puisque la migration des classes aisées ne souffre pas de la violence verbale de certains politiques.
G. H. : Oui, cette idée naît de l'intention de sensibiliser les Costaricains, la population d'ici, à l'immigration nicaraguayenne, alors que celle-ci a subi une vague d'expression xénophobe. Mon prochain projet concerne les personnes en provenance des États-Unis qui émigrent au Costa Rica, parce qu'il s'agit d'une migration et que nous devons en parler en ces termes. Il s'agit d'une migration inverse, du Nord vers le Sud. Le Costa Rica est actuellement le pays qui compte la plus grande population américaine, en dehors des États-Unis, en termes relatifs, en raison de la taille du territoire. Ils sont les bienvenus et l'on ne parle pas d'eux en tant que migrants mais d'expatriés ou de retraités, d'Américains retraités dans le pays.
Dans ce cas, que se passe-t-il ? Parce qu'il y a aussi un impact qui n'est pas toujours positif, notamment autour de la gentrification. Dans ces environnements, dans ces communautés, dans ces cultures, il y a aussi un impact culturel et nous devons en parler.
Je ne dis pas que ce phénomène est bon ou mauvais mais il est important de le faire connaître, de le rendre visible, et le cinéma est un bon outil pour cela. Le cinéma permet de développer une vision plus subtile en respectant la complexité de la réalité sociale.
P. F. : C'est vraiment absurde ce qui se passe. Je ne pense pas qu'il s'agisse directement de xénophobie, mais plutôt d'une peur des populations ayant un certain niveau économique. Il est très surprenant que nous ayons été convaincus que nous devions craindre les gens qui viennent et font un travail très important dans le pays où ils arrivent : cette peur à leur égard ne devrait pas exister !
Je pense que c'est quelque chose qui est peut-être en train de changer. Dans le post-capitalisme dans lequel nous vivons, nous avons été convaincus qu'avoir de l'argent est une vertu, et je pense que nous réalisons peu à peu que nous devrions peut-être nous méfier davantage des gens qui ont beaucoup d'argent. Ainsi, lorsqu'il y a une forte migration, les gens qui ont beaucoup d'argent augmentent les prix et cela provoque une exclusion pour la population locale. Lorsque les immigrés clandestins viennent ici, ils contribuent à l'activité agricole, alors lequel des deux est le plus avantageux pour nous ? Je pense que cette migration, cette gentrification, ne convient vraiment qu'aux grandes entreprises touristiques, aux sociétés immobilières, aux promoteurs, mais pour la population locale, ce n'est pas la meilleure chose à faire.
Alors qu'une grande partie de l'immigration clandestine a sa place dans l'économie, de manière tout à fait intégrée, je pense que nous devrions chercher à comprendre pourquoi certains emplois si importants ne peuvent être faits que par des migrants dans des conditions très difficiles. Nous devrions alors nous demander comment pouvons-nous légaliser leur situation dans le pays et les soutenir. Le mouvement migratoire pour les récoltes toujours existé dans le monde agricole à des moments où il y a besoin de beaucoup plus de personnes qu'à d'autres moments. Il devrait y avoir des décisions politiques qui permettent de légaliser cette réalité économique et sociale dans ces endroits du pays, c'est fondamental.
G. H. : En effet, la politique migratoire ne devrait pas être envisagée en termes de sécurité, parce que l'accent est toujours mis sur la sécurité, ce qui est criminalisant. Dans le cas de la migration nicaraguayenne, il devrait y avoir une approche plus humaine, qui envisage toutes ces transformations, tous ces changements, tous ces impacts, et que la migration soit un facteur de développement. Le monde politique devrait prendre en compte tous ces impacts et considérer la migration comme partie intégrante de la vie sociale, politique, économique et culturelle de tous les pays.
C. L. : En ce sens il était essentiel de représenter cette famille ngäbe qui durant tout le film réalise la récolte du café avant de partir à nouveau.
G. H. : En effet, nous voulions montrer que les Ngäbe font partie du paysage mais que la vie autour se poursuit sans forcément prendre conscience de leur présence. L'enjeu du film était aussi de rendre compte de la perception qui leur est faite.
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C. L. : Pouvez-vous parler de l'importance que vous donnez au fait de filmer des personnes non seulement en train de témoigner mais encore en train de faire et construire leur culture, qu'il s'agisse de construire une maison, faire des pains de sucre ou encore réaliser la cueillette de café ?
P. F. : L'une des choses les plus importantes que fait le cinéma est de souligner et d'exalter les choses les plus quotidiennes de la vie. Celles-ci donne un sens à des choses qui peuvent sembler insignifiantes et les observer avec la caméra participe à rappeler leur sens intrinsèque.
C'est important parce que cela met en valeur des activités qui ne rapportent pas beaucoup d'argent, voire pas du tout mais qui ont du sens. Je crois que nous nous sommes trop habitué.es au quotidien à donner de la valeur seulement à ce qui génère une économie. Comme s'il y avait des activités qui permettent de gagner de l'argent et ensuite des activités qui peuvent plaire dans lesquelles on se retrouve individuellement. Ces activités sont ainsi séparées. Dans ce milieu rural, il y a des choses à faire, qu'elles soient rentables ou non. Ces activités donnent de la valeur à la vie au quotidien.
G. H. : Ces mêmes activités peuvent être dénigrées par les nouvelles générations à la campagne. Celles-ci cherchent des choses nouvelles mais peu à peu, elles se rendent compte que cette tranquillité qui pourrait confiner à l'ennui présente des valeurs où elles peuvent aussi se retrouver. Certains jeunes deviennent ainsi guides pour faire découvrir la diversité de la faune et de la flore.
P. F. : Cela rend compte d'une éthique et d'une autre conception de la vie à la différence de la ville où il semble qu'il n'y ait pas de place pour tout le monde. Le monde rural offre davantage d'opportunités pour réaliser des choses collectives sans compétition. Ainsi, Daniel dans le film continue à faire son sucre de cane en réunissant pour l'occasion plusieurs personnes, parfois venues d'autres villages. Voilà pour moi une forme de vie d'une grande sagesse.
Roofing. Mal de patria
de Paz Fábrega et Gabriela Hernández
Documentaire
70 minutes. Costa Rica, Uruguay, 2024.
Couleur
Langue originale : espagnol
Avec les participations de : Arturo Ortiz, Lethy Gamboa, Daniel Ortiz, Jeffry Ortiz, Mariela Ortiz, Luis Torres, Alexander Badilla, Olger Danilo Madrigal, Isidro Amador, Gladys Amador, María Rosa Amador, Ramona Hidalgo, Marjorie Solís, Lillian Ureña, Ulises Ureña, Yariel Brenes, Andrés Jovino Hernández, Raquel Amanda Garro, Tomás Hernández, Naomy Hernández, Farid Kalani Mora, Desiderio Morales, Richar Espinoza, Heiner Arroyo, Herbert “Vito” Porras
Scénario : Paz Fábrega, Gabriela Hernández
Images : Paz Fábrega
Montage : Fernando Epstein, Manuel Rilla, Gabriela Hernández
Musique originale : Gabriel Estrada, Gonzalo Moreira, Bruno Cammá
Son : Camila Azofra, Irene Quirós, Gabriela Rivas, Rafa Chinchilla, Roberto Murillo, Federico Moreira
Production : Paz Fábrega, Gabriela Hernández, Federico Moreira
Production associée : Patricia Velásquez, Rolando Muñoz
Assistante de production : Carol Campos
Sociétés de production : Temporal Films, La Mayor Cine