Billet de blog 15 août 2023

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Cédric Lépine

Critique de cinéma, essais littéraires, littérature jeunesse, sujets de société et environnementaux

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Festival de Locarno 2023 : "El Esqueleto de la señora Morales" de Rogelio A. González

Depuis leur mariage il y a quinze ans, Gloria Morales, catholique bigote, ne supporte pas son mari Pablo taxidermiste qui n'a pas la même passion qu'elle pour la religion et la conception d'une vie de sacrifices. Elle refuse le divorce et passe son temps à repousser son mari et à lui faire des reproches injustifiés tout en cultivant le rôle de victime pour l'extérieur.

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Diffusion sur la plateforme Mubi (France) depuis le 2 août 2023 : El Esqueleto de la señora Morales de Rogelio A. González

Remis en valeur lors de la dernière édition du festival international de cinéma de Locarno au sein d'une large rétrospective, le cinéma mexicain des années 1940 à 1960 révèle de bien grandes surprises où El Esqueleto de la señora Morales (1960) de Rogelio A. González constitue un véritable joyau de la comédie noire. Si le réalisateur est méconnu en Europe malgré une production intense où il réalisa plus de 70 longs métrages en trois décennies, son scénario est signé par Luis Alcoriza, fidèle scénariste de Luis Buñuel et réalisateur.

Illustration 1
El Esqueleto de la señora Morales de Rogelio A. González © DR

Il se trouve ainsi que le scénario est d'une brillante efficacité sans temps mort où les personnages ont tous un rôle d'une grande pertinence dans l'intrigue. L'histoire est l'adaptation de la nouvelle The Islington Mystery (1927) écrite par Arthur Machen qui s'est lui-même inspiré de l'histoire vraie d'Hawley Harvey Crippen accusé d'avoir fait disparaître son épouse. Cette histoire aurait très bien pu inspirer l'humour noir britannique de la Hammer mais au Mexique durant l'âge d'or de son industrie cinématographique, elle trouve son plein épanouissement. C'est l'occasion en effet de tourner en dérision les obsessions de la société mexicaine, notamment autour du contrôle catholique des âmes et la diabolisation de la sexualité avec un esprit qui n'aurait pas déplu à Buñuel qui dirigea d'ailleurs quelques années plus tôt avec une grande inspiration le majestueux et toujours inspiré Arturo de Córdova dans Él (Tourments, 1954). Cet acteur peut à la fois jouer de son charme et de son ambiguïté pour devenir un assassin au-dessus de tout soupçon.

Quant à l'image, elle est construite avec un très grand soin, sous l'influence du cinéma expressionniste avec des plans inattendus qui déforment les décors et les visages par Víctor Herrera qui venait également de signer l'image de la meilleure adaptation du mythe du vampire dans le cinéma mexicain classique : El ataúd del vampiro (1958) de Farnando Méndez. De cette comédie noire autour d'une histoire de couple qui se détruit, le fantastique n'est ainsi pas loin et le travail de l'image et de la lumière participe pleinement à la mise en scène pour un délicieux et atemporel moment de cinéma.

El Esqueleto de la señora Morales
de Rogelio A. González
Fiction
83 minutes. Mexique, 1960.
Noir & Blanc
Langue originale : espagnol

Avec : Arturo de Córdova (Dr. Pablo Morales), Amparo Rivelles (Gloria Morales), Elda Peralta (Señorita Castro), Guillermo Orea (le professeur), Rosenda Monteros (Meche), Luis Aragón (Elodio), Mercedes Pascual (Lourditas Mendiolea), Antonio Bravo (le père Artemio), Angelines Fernández (Clara, la sœur de Gloria), Armando Arriola (Don Amado), Paz Villegas (l'autre Sra. Mendiolea), Roberto Meyer (l'historien), Pepita González (une amie de Gloria, témoin contre Pablo), León Barroso (Dr. Quiñones), Mario Sevilla (le juge), Humberto Dupeyrón (un enfant), Roger López (l'avocat de la défense), Jorge Mondragón, Armando Gutiérrez, Manuel Alvarado
Scénario : Luis Alcoriza, d'après la nouvelle The Islington Mystery (1927) écrite par Arthur Machen
Images : Víctor Herrera
Montage : Jorge Busto
Musique : Raúl Lavista
Son : Luis Fernández, James L. Fields
Effets spéciaux : Juan Muñoz Ravelo
Décors : Edward Fitzgerald
Maquillage : Ana Guerra
Coiffure : Juana Lepe
Production : Sergio Kogán, Armando Espinosa
Sociétés de production : Alfa Film S.A.

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