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Sortie Blu-ray : O Cangaceiro de Giovanni Fago
Toujours dans la dynamique de suivre le filon du western qui a fait ses preuves auprès du public, le cinéma italien continue à proposer de nouvelles productions à l'affût des attentes du public. En l'occurrence, le western politique dit « Zapata » du nom du révolutionnaire mexicain, commence à s'imposer avec force et conviction depuis El Chuncho (Quién sabe? 1966) réalisé par Damiano Damiani. Parmi les luttes politiques et sociales des déshérité.es, il est une réalité sociale historique, celle des cangaceiros, qui semble un terrain propice aux yeux des scénaristes intellectuels italiens engagés politiquement pour développer une nouvelle lecture politique ancrée dans l'époque contemporaine du tournage.
Si O Cangaceiro (1969) de Giovanni Fago apparaît comme un remake du film du même nom de Lima Barreto primé au festival de Cannes en 1953, le cangaceiro a encore davantage été inspiré par le cinéma politique du Cine Novo. Comment ainsi ne pas citer Le Dieu noir et le Diable blond (Deus E o Diabo na Terra do Sol, 1964) de Glauber Rocha comme véritable source d'inspiration pour Giovanni Fago, tandis qu'Antonio das Mortes sort sur les écrans la même année que le film O Cangaceiro ?
Ainsi, cette production politique est d'autant plus en dialogue avec la réalité du présent qu'il est aisé de voir dès la première scène de massacre de toute une population brésilienne par l'armée un écho non caché à la répression de la dictature militaire au Brésil au moment du tournage. Sans rivaliser avec les inventions de mise en scène du cinéma de Glauber Rocha, le film interprété par Tomás Milián a pour intérêt et grand enjeu de toucher un public plus large avec une sensibilité politique non dissimulée proche du parti communiste italien.
La démarche d'aller tourner au Brésil cette production italienne est inédite à l'époque et offre au film sa singularité, qu'il s'agisse des décors uniques, des nouveaux visages qui s'intègrent dans une démarche documentaire de la réalité sociale, sans oublier une ambiance brésilienne omniprésente traduite avec vigueur par la continuité envoûtante de la composition musicale.
Tomás Milián a beau être un ogre d'interprétation à l'instar d'un Jack Nicholson comme le dénote avec perspicacité le regard fin de Gérald Duchaussoy en bonus de cette édition, il s'intègre dans un ensemble qui fait de ce film un véritable ovni parmi les production italiennes de son époque. Il est ici d'ailleurs bien dommage que cela n'ait pas entraîné des coproductions avec le Brésil à l'instar de ce qui s'est déroulé en Espagne et qui a permis durant la dictature de Franco de voir émerger une nouvelle génération de cinéastes s'appropriant les codes du genre. Cela n'empêche pas le cinéma brésilien d'avoir eu son propre parcours malgré la forte répression de la dictature militaire sur les milieux de gauche.
Pour en revenir à ce magnifique ovni que constitue O Cangaceiro, Tomás Milián offre l'une de ses plus inoubliables prestations en reprenant son personnage picaresque et humble d'El Cuchillo. Il y a donc un véritable plaisir à (re)découvrir cet acteur fascinant qui, certes ici, ne laisse pas beaucoup de place aux autres acteurs. Son personnage de révolutionnaire analphabète suit une prise de conscience politique progressive à la manière des protagonistes de nombreux western zapata, d'El Chuncho à Il était une fois la Révolution (Giù la testa, 1971) de Sergio Leone, œuvre phare qui clôt par sa synthèse le cycle thématique filmique.

O Cangaceiro
de Giovanni Fago
Avec : Tomás Milián (Espedito dit « Le Rédempteur »), Ugo Pagliai (Vincenzo Helfen), Eduardo Fajardo (le gouverneur Branco), Leo Anchóriz (le colonel Minas), Howard Ross (le capitaine), Mário Gusmão (le Diable Noir), Quinto Gambi (Sebastian), Alfredo Santacruz, Jesús Guzmán, Claudio Scarchilli, José Carlos Farias, Bernadette Dinorah De Carvalho, M. De Moura, Irio Fantini, Aldo Gasparri, Bob Leo
Italie, Espagne – 1969.
Durée : 91 min
Sortie en salles (France) : 21 juin 1970
Sortie France du Blu-ray : 8 juillet 2025
Format : 2,35 – Couleur
Langues : français, italien - Sous-titres : français.
Éditeur : Elephant Films
Collection : La Vendetta Collezione
Bonus :
Le film par Gérald Duchaussoy (2024, 20’46”)
Scène coupée (2’26”, VOST)
Bande-annonce d’époque (0’45”, VOST)
Bandes-annonces des films de la vendetta collezione