Billet de blog 22 août 2025

Cédric Lépine (avatar)

Cédric Lépine

Critique de cinéma, essais littéraires, littérature jeunesse, sujets de société et environnementaux

Abonné·e de Mediapart

FID 2025 : "Cobre" de Nicolás Pereda

Au petit matin, Lázaro quitte la mine où il travaille pour rentrer chez lui et découvre sur la route un cadavre. Dès lors, son appréhension du monde ne sera plus la même à commencer par sa propre perception de son corps qu'il sent contaminé.

Cédric Lépine (avatar)

Cédric Lépine

Critique de cinéma, essais littéraires, littérature jeunesse, sujets de société et environnementaux

Abonné·e de Mediapart

Ce blog est personnel, la rédaction n’est pas à l’origine de ses contenus.

Illustration 1
Cobre de Nicolás Pereda © DR

Film en compétition internationale de la 37e édition du Festival Cinélatino, Rencontres de Toulouse 2025 : Cobre de Nicolás Pereda

Chaque film de Nicolás Pereda est une aventure cinématographique unique où la fausse simplicité du récit minimaliste, cache des tensions dramatiques multiples, métaphores d'un hors-champs sans cesse sollicité. Le cinéaste poursuit son travail avec sa troupe d'interprètes complices à la manière de Fassbinder ou de Cassavetes, avec un égal goût pour l'antinaturalisme brechtien mais avec une approche contemplative de la mise en scène à la frontière entre la ressource narrative de la fiction et la charge contextuelle documentaire de Tsai Ming-liang.

Entre vrai et faux, fiction et documentaire, vérité du jeu et fantasmes de l'appréhension d'un monde violent, le cinéaste construit une œuvre hybride sans cesse contaminé par la réalité sociale qui imbibe l'intégralité du récit. Ainsi, le contexte endémique d'une violence qui n'est pas le monopole au Mexique du narcotrafic, place au centre de l'intrigue l'industrie minière comme une menace omniprésente : le cadavre anonyme en introduction du film peut ainsi représenter la répression du milieu syndical et/ou activiste écologique face à la toute puissance du milieu extractif en quête de minerais qui prend actuellement dans le monde une ampleur inégalée générant de multiples conflits armés comme autant de destructions.

Ce corps peut aussi être appréhendé comme le corps à venir du protagoniste qui commence à être contaminé tandis que tout son entourage ne reconnaît pas sa maladie dans ce qui ressemble à un déni social des conséquences des crimes environnementaux et sociaux de cette emprise industrielle prédatrice sur un milieu.

La force de la mise en scène de Nicolás Pereda repose sur un espace très large offert à son public pour s'approprier un discours politique de son film, avec un protagoniste qui se veut précisément apolitique. Chacune des rencontres de celui-ci avec son entourage, le conduit à le définir tout autant qu'à questionner sa propre identité. Alors que ce personnage comme tous les autres du film possèdent le même prénom devant et derrière l'écran, ce sont les identités de chacun et chacune qui sont interrogées en permanence dans un jeu subtil de correspondances, où le public est à nouveau sollicité pour entrer dans la complicité des jeux entre les personnages autour de l'énoncé et du non-énoncé à l'image du désir et de l'amour entre Lázaro et sa tante Rosa. Les relations sentimentales entre les personnages constituent encore un élément semi ludique prenant parfois une teinte plus grave pour mettre en avant les rapports de genre.

Cobre
de Nicolás Pereda
Fiction
79 minutes. Mexique, Canada, 2025.
Couleur
Langue originale : espagnol

Avec : Lázaro Rodríguez (Lázaro), Rosa Estela Juárez (la tante Rosa), Teresita Sánchez (Tere, la mère de Lázaro), Harold Torres, Francisco Barreiro, José Rodríguez López, Mariana Villegas, Norma Pablo
Scénario : Nicolas Pereda, Juan Francisco Maldonado
Images : Miguel Tovar
Montage : Nicolás Pereda
Son : Mercedes Gaviria, Andrea Bussmann
Musique : Nicolás Pereda
Production : Nicolás Pereda, Paula Mónaco

Ce blog est personnel, la rédaction n’est pas à l’origine de ses contenus.