Billet de blog 22 septembre 2024

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Cédric Lépine

Critique de cinéma, essais littéraires, littérature jeunesse, sujets de société et environnementaux

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FBAL 2024 : Je suis toujours là (Ainda estou aqui) de Walter Salles

Le quotidien de la famille Paiva est violemment troublé du jour au lendemain par la disparition du père, ancien député travailliste, au début des années 1970 alors que le Brésil est soumis à un régime dictatorial.

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Illustration 1
Ainda estou aqui de Walter Salles © StudioCanal

Film d'ouverture de la 33e édition du Festival Biarritz Amérique Latine 2024 : Je suis toujours là (Ainda estou aqui) de Walter Salles

Walter Salles fait enfin son retour au long métrage après son documentaire consacré à Jia Zhang-ke (2014) inédit en salles en France et son film de fiction Sur la route (2012). Entre temps, il a continué à s'investir dans la préservation de l'histoire du cinéma et de la cinémathèque brésilienne au moment où la politique de Bolsonaro était conduite comme un bulldozer contre la mémoire. C'est avec la même conscience politique qu'il se lance avec Ainda estou aqui, prix du meilleur scénario au festival de Venise 2024, dans l'adaptation du roman biographique de Marcelo Rubens Paiva qui retrace le récit de la disparition politique de son père Rubens Paiva durant la dictature.

Si l'histoire de la dictature brésilienne est moins visible en France au cinéma que les dictatures chilienne et argentine dans les cinématographies nationales respectives, Maria de Medeiros avec À nos enfants (Aos nossos filhos, 2019) avait rappelé cette mémoire autour d'une activiste du Brésil contemporain confrontée à l'horreur des tortures subies durant la dictature. Walter Salles partage également cette continuité avec cette cinéaste en rappelant l'engagement politique des femmes durant la dictature avec la naissance d'une conscience politique au long cours pour une femme destinée au rôle de mère d'une famille nombreuse dans la société brésilienne des années 1970.

Comme pour Linha de passe (2008) coréalisé avec Daniela Thomas, il accorde en guise d'introduction une longue attention à l'harmonie familiale avant de faire intervenir le drame d'une disparition politique. Peu à peu, la mère est appelée à devenir une matriarche à poursuivre la responsabilité politique de son défunt époux tout en incarnant par ses actions la mémoire transmissible de l'histoire du Brésil. Contrairement à l'apprentissage politique du jeune Che Guevara dans Carnets de voyage (Diarios de motocicleta, 2004), la naissance politique de cette femme ne se fait pas dans un mouvement transfrontalier, mais plutôt en lien étroit avec la réalité centrale du foyer, encore habité, comme le prouve encore la mise en scène du film, par l'âme du disparu.

Plus qu'une reconstitution politique avec forces informations historiques sur la dictature au Brésil, Walter Salles a voulu rendre hommage à la fois à une femme et à l'unité familiale comme force fondamentale d'ancrage et de protection face aux violences venues de l'extérieur. Son film survient avec la force de la nécessité du témoignage contemporain afin de toucher le public le plus large et de transmettre une mémoire quant à la conscience politique toujours vive de son pays.

Je suis toujours là
Ainda estou aqui

de Walter Salles
Fiction
136 minutes. Brésil, France, 2024.
Couleur
Langue originale : portugais

Avec : Fernanda Torres (Eunice, jeune),Selton Mello (Rubens Paiva), Maeve Jinkings (Dalva Gasparian), Antonio Saboia (Marcelo Rubens Paiva), Fernanda Montenegro (Eunice Paiva, âgée), Valentina Herszage (Vera Paiva), Guilherme Silveira (Marcelo), Cora Ramalho (Maria Beatriz Facciolla Paiva), Marjorie Estiano, Humberto Carrão, Camila Márdila, Dan Stulbach, Carla Ribas, Olívia Torres, Maria Manoella, Kauã Rodriguez, Gabriela Carneiro da Cunha, Bárbara Luz, Luiza Kosovski, Otavio Linhares, Maitê Padilha
Scénario : Murilo Hauser, Heitor Lorega, d'après le roman de Marcelo Rubens Paiva
Images : Adrian Teijido
Montage : Affonso Gonçalves
Décors :Carlos Conti
Musique : Warren Ellis
1er assistant réalisateur : Daniel Lentini
Effets visuels : Cláudio Peralta
Superviseur des effets spéciaux : Sergio Farjalla Jr.
Costumes :Cláudia Kopke
Maquillage : Marisa Amenta
Production : VideoFilmes (Maria Carlota Bruno), RT Features (Rodrigo Teixeira), MACT Productions (Martine de Clermont-Tonnerre)
Coproduction : Arte France Cinéma, Conspiração Filmes, Globoplay
Distributeur (France) : StudioCanal
Vente internationale : Goodfellas
Date de sortie (France) : 15 janvier 2025

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