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Cédric Lépine : Pouvez-vous me parler des liens que vous partagez avec Caetano Gotardo et Marco Dutra, deux cinéastes avec lesquels vous collaborez régulièrement ?
Juliana Rojas : Nous nous sommes connus durant nos études de cinéma à l'université où notre rapprochement venait d'un partage de mêmes intérêts. Avec Marco, nous étions plus attirés par les films d'horreur et avec Caetano les comédies musicales. Petit à petit, il nous arrive de codiriger un film mais aussi de réaliser seul es mais même dans ce cas, nous continuons toujours de parler de nos projets respectifs : cela peut prendre la forme de conseils techniques ou davantage.
Nous formons un collectif appelé Filmes do Caixote et cela crée bien sûr entre nous une véritable émulation.
C. L. : Est-ce que la volonté de montrer deux films séparés affirmée dans le titre Cidade ; campo souligne le fait que les mondes ruraux et citadins ont du mal à se rencontrer au Brésil ?
J. R. : Cette lecture est intéressante mais ce n'était pas du tout mon idée de départ. Je voulais ces deux univers séparés mais pour moi le point de départ c'est la thématique des origines, d'où l'on vient et les questions de l'ancestralité. J'ai tenu à mettre un point-virgule entre cidade et campo pour faire un lien : car nous venons toutes et tous de la campagne. Je voulais ainsi évoquer la migration de la campagne à la ville.
Cette thématique de la séparation de la ville et de la campagne est certainement issue du contexte de la pandémie où, comme d'autres films réalisés dans ce contexte, le mien a absorbé toutes ces polarisations et conflits entre personnes, alors qu'il y avait alors une inquiétude quant au futur à vivre et le film peut en être le reflet.
Le couple quitte la ville où la vie est onéreuse parce qu'il a idéalisé la campagne. Or celle-ci est déjà particulièrement détériorée en raison des exploitations minières et de soja.
C. L. : Les deux parties du film sont reliées à l'exploitation humaine par le travail, thématique que l'on retrouve déjà dans votre premier long métrage Travailler fatigue (Trabalhar cansa, 2011) coréalisé avec Marco Dutra. Pouvez-vous expliquer comment cette préoccupation rend compte de l'actualité brésilienne ?
J. R. : La question du travail est présente dans toute mon œuvre. Au Brésil, la question de l'exploitation par le travail est extrêmement liée aux problématiques de race, de classe et de genre. Il s'agit d'une problématique fondamentale pour moi et je voulais montrer à la fois la précarisation du travail en ville et la menace à la campagne avec les diverses pollutions mortelles.
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C. L. : On voit qu'en ville les femmes s'unissent dans le travail pour faire face à l'oppression alors qu'à la campagne, les femmes s'unissent avec des forces fantastiques pour se relier au monde immédiat. Quels reflets peut-on voir entre les deux ?
J. R. : Un des sujets importants du film, c'est la relation à la mort et à l'ancestralité. Dans la première histoire, il s'agit d'un processus de deuil puisque Joana a tout perdu et nous ne savons pas si son fils a disparu ou s'il ne veut plus la voir. Joana a besoin de recréer une famille qu'elle trouve auprès des femmes avec lesquelles elle travaille. Dans la seconde histoire, Flavia est également en deuil de son père mais elle peut se réconcilier avec ce dernier en remontant le passé avec la prise d'ayahuasca.
Le fantastique est présent sur tous mes films et elle progresse au fur et à mesure. Joana a par exemple un certain nombre de visions et des choses bizarres se passent sans explication. Dans la seconde histoire, le fantastique est travaillé à partir d'une superposition de sons et d'images pour faire sentir que l'on change d'espace et qu'il y a un lien organique entre les deux parties du film.
merci à Sylvie Debs pour la traduction du portugais au français et réciproquement
Cidade ; campo
de Juliana Rojas
Fiction
119 minutes. Brésil, Allemagne, France, 2024.
Couleur
Langue originale : portugais
Avec : Fernanda Vianna (Joana), Mirella Façanha (Flavia), Bruna Linzmeyer (Mara), Kalleb Oliveira (Jaime), Andrea Marquee (Tânia), Preta Ferreira (Ângela), Marcos de Andrade (Celino), Nilcéia Vicente (Dirce)
Scénario : Juliana Rojas
Images : Cris Lyra, Alice Andrade Drummond
Montage : Cristina Amaral
Musique : Rita Zart
Son : Gabriela Cunha, Tales Manfrinato
Design sonore : Tiago Bello
Décors : Juliana Lobo, Daniela Aldrovandi
Costumes : Gabriella Marra
Maquillage : Tati Chaves
Casting : Alice Wolfenson
Production : Sara Silveira, Maria Ionescu
Production exécutive : Ângela Destro, Helena Botelho, Maria Ionescu
Coproduction : Clement Duboin, Ingmar Trost
Sociétés de production : Dezenove Som e Imagens, Sutor Kolonko, Good Fortune Films
Vente internationale : The Open Reel
Contacts :
Dezenove Som e Imagens
São Paulo, Brésil
dezenove@uol.com.br
Sutor Kolonko
Köln, Germany
info@sutorkolonko.de
sutorkolonko.de sutorkolonko.de
Good Fortune Films
Paris, France
clement@goodfortunefilms.com
The Open Reel
Massafra, Italie
open@theopenreel.com
www.theopenreel.com
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