Billet de blog 24 juillet 2023

Cédric Lépine (avatar)

Cédric Lépine

Critique de cinéma, essais littéraires, littérature jeunesse, sujets de société et environnementaux

Abonné·e de Mediapart

"La Vache qui chantait le futur" de Francisca Alegría

Cecilia, chirurgienne établie, part retrouver avec ses deux enfants son père qui vient d'être hospitalisé après avoir cru reconnaître sa défunte épouse qui s'est suicidée. Sur l'exploitation dirigée à présent par le frère de Cecilia, des vaches commencent à se porter mal tandis que des poissons sont morts par milliers dans la rivière polluée.

Cédric Lépine (avatar)

Cédric Lépine

Critique de cinéma, essais littéraires, littérature jeunesse, sujets de société et environnementaux

Abonné·e de Mediapart

Ce blog est personnel, la rédaction n’est pas à l’origine de ses contenus.

Sortie nationale (France) du 26 juillet 2023 : La Vache qui chantait le futur de Francisca Alegría

Le Chili comme beaucoup de pays d'Amérique latine est encore la victime au fil des siècles et de manière encore plus intense avec le développement des économies ultranéolibérales ,accélérées conjointement par le soutien en marche forcée des sociétés humaines par les régimes dictatoriaux. Ainsi, le film qui s'ouvre avec les morts indénombrables de poissons en bord de rivière accompagnées d'un chœur antique qui pourrait figurer l'âme de la nature, rappelle la réalité de la pratique décomplexée de l'extractivisme des puissantes entreprises mondialisées ne laissant derrière elles localement que la désolation de désastres environnementaux colossaux. La manifestation contre les pratiques polluantes restent cependant ici en arrière-plan du récit qui est davantage habité par l'âme des êtres vivants qui dépassent le seul milieu humain. Ainsi, cette fable écologique est en même temps un drame familial autour de la violence de l'exercice patriarcat dans une logique implicitement écoféministe.

Illustration 1
La Vache qui chantait le futur La Vaca que cantó una canción sobre el futuro de Francisca Alegría © Nour Films

Avec naturel, la mise en scène du film laisse advenir le fantastique avec toutes les possibilités de métaphores ouvertes comme appréhension du monde et notamment avec ce fascinant retour à la vie d'une femme méprisée et exploitée à l'instar de la nature elle-même dans son ensemble. L'exploitation des vaches à lait séparées de leurs liens à leurs petits veaux pour créer de la richesse économique humaine devient dès lors une métaphore puissante qui sourd comme une rivière puissante dans les relations étroites entre les membres d'une même famille dans une logique transgénérationnelle.

Orchestrer les différentes intrigues des personnages qui s'entremêlent pour définir le portrait d'une famille meurtrie est particulièrement réussi. Le film relève avec une belle audace d'autant plus le défi d'une première réalisation de long métrage qu'il ose aller sur des terrains inédits.

Francisca Alegría s'est associée dans cette évocation où le mystère poéticopolitique et mystique du cinéma de Pier Paolo Pasolini s'invite aussi allègrement, au plus enthousiasmant des chefs opérateurs chiliens : Inti Briones. Celui-ci touche avec sa caméra la lumière comme s'il dansait avec elle, les êtres vivants filmés étant toujours accompagnés d'une aura élégiaque fascinante. Il en résulte une entrée profonde dans une cosmogonie qui rend d'autant plus significative l'écoféminisme comme une portée d'entrée d'appréhender le monde sur les cendres du patriarcat.

Illustration 2

La Vache qui chantait le futur
La Vaca que cantó una canción sobre el futuro
de Francisca Alegría
Fiction
98 minutes. Chili, France, USA, Allemagne, 2022.
Couleur
Langue originale : espagnol

Avec : Leonor Varela (Cecilia), Mía Maestro (Magdalena), Alfredo Castro (Enrique), Luis Dubó (Victor), Marcial Tagle (Bernardo), Laura Del Rio Rios (Alma), Enzo Ferrada Rosati (Tomas), Benjamin Soto (Pablo), Frederique Gudelj, Camilo Arancibia, Maximiliano Jair, Javier Navarrete, Claudio Echeverría, Adriel Rubio, Oscar Mena, José Luis Villalobos, Francisca Inzunza, Carol Sandoval, Daniela Pino, Domingo Araya B., María Velásquez, Alberto Carrasco, Cristian Celis
Scénario : Francisca Alegría, Fernanda Urrejola, Manuela Infante
Images : Inti Briones
Montage : Andrea Chignoli, Carlos Ruiz-Tagle
Musique : Pierre Desprats
Son : Javier Neira
Monteur son : Benoît Gargonne, Thomas Robert Mixeur Jean-Guy Véran
Direction artistique : Bernardita Baeza
Étalonneur : Lionel Kop
Sociétés de production : Cinéma Defacto, Wood production
Sociétés de coproduction : Match factory productions, Jirafa films, ZDF
Production : Tom Dercourt, Alejandra García
Coproduction : Bruno Bettati, Andrés Wood, Michael Weber, Viola Fügen, Shrihari Sathe
Producteurs.rices exécutif.ves : Casey Bader, Alec Baldwin, Bill Reedy, Emily Reedy, Rick Rosenthal, Nancy Stephens, Christine Woodhouse
Producteurs.rices associé.es : Jamal Zeinal Zade, Dan Wechsler, Andreas Roald, Augusto Matte, Matias de Bourguignon, Sophie Erbs, Burkhard Althoff, Doris Hepp
Producteurs délégués : Nicola Worsdell, Pierrick Baudouin
Distributeur (France) : Nour Films

Ce blog est personnel, la rédaction n’est pas à l’origine de ses contenus.