Billet de blog 25 mars 2016

Cédric Lépine (avatar)

Cédric Lépine

Critique de cinéma, essais littéraires, littérature jeunesse, sujets de société et environnementaux

Abonné·e de Mediapart

New York des années 1990, du point de vue de l’exil haïtien

Après une enfance passée à Haïti, Chase Delall a dû quitter le pays soumis à la dictature où elle laisse derrière elle une histoire parentale traumatique. À New York, elle gère la mort au quotidien en tant que médecin légiste de la brigade criminelle.

Cédric Lépine (avatar)

Cédric Lépine

Critique de cinéma, essais littéraires, littérature jeunesse, sujets de société et environnementaux

Abonné·e de Mediapart

Ce blog est personnel, la rédaction n’est pas à l’origine de ses contenus.

Illustration 1
corps-plonge-s © JBA

À propos du DVD Corps plongés de Raoul Peck

Avant que ne soit finalisé son film sur Karl Marx qui signera son grand retour au cinéma, Raoul Peck réalisait deux décennies plus tôt un téléfilm curieux globalement passé inaperçu et qui répondait à une commande passée par ARTE. Il était alors produit pour la première fois par Jacques Bidou avec lequel il a travaillé à plusieurs reprises par la suite. Quelques temps auparavant, Raoul Peck était revenu en Haïti appelé par le nouveau gouvernement pour assurer la responsabilité de ministre de la Culture. Cette histoire personnelle de Raoul Peck se retrouve intimement liée au récit qu’il livre dans Corps plongés. Il y avait beaucoup de lui dans ce personnage de femme contrainte à l’exil à New York, s’exprimant à travers la voix off de son journal personnel et qui a beaucoup de mal à s’intégrer à la vie new-yorkaise : ce n’est pas anodin que son personnage gère les morts. Sa relation amoureuse compliquée avec un homme politique est également un ressort scénaristique pour Raoul Peck pour mêler intimement autobiographie, politique et genre cinématographique. On l’appendra vers la fin du film avec les actualités télévisées annonçant la décision du président Bill Clinton d’intervenir militairement à Haïti, l’histoire se situe exactement quelques années avant que Raoul Peck ne se décide à laisser entre parenthèses son activité dans le cinéma pour assumer des responsabilités politiques. En cela aussi, bien que le film soit une commande de la télévision, Corps plongés parle d’autant plus aisément de Raoul Peck, son sentiment d’exilé, son attachement à Haïti, qu’il signe lui-même le scénario. La trame est simple en apparence puisqu’il est question d’une médecin légiste confrontée à des crimes mais le film évacue à tout moment l’intrigue policière. Par flash-back, à la manière des pièces d’un puzzle qui prennent le temps de se reconstituer, les crimes dont elle s’occupe parle d’une Amérique des années 1990 où le racisme, la corruption politique, les consciences de classe sont encore prédominants et empêche la cohésion sociale de se développer harmonieusement. Si le regard politique de Raoul Peck est omniprésent, le film souffre quelque peu d’avoir été réalisé à la hâte : le scénario est souvent bien trop maîtrisé par rapport à une mise en scène qui ne laisse aucune liberté à l’inattendu du réel. Ainsi, le spectateur ne peut pas réellement rencontré les lieux traversés par les personnages et encore moins leur univers social : ceux-ci sont enchaînés au récit et aux intentions de leur auteur. Telles sont les quelques limites de ce film qui vaut la peine de connaître pour son regard distancié sur New York, par exemple, comme on ne le retrouvera jamais chez les cinéastes new-yorkais, qu’il s’agisse de Woody Allen ou Spike Lee.

Illustration 2
dvd-corps-plonge-s

Corps plongés

de Raoul Peck

Avec : Geno Lechner (Chase Dellal), Jean-Michel Martial (Dimitri), Bob Meyer (Ralph), Susan Moncur (Denise Mellroy), Jerry Di Giacomo (Raymond Mellroy), Dominic Gould (Bernard), Joe Sheridan (le portier), Jeane Manson (Béatrice), Israel Horovitz (Thimothy), Dee Dee Bridgewater (la femme au verre de lait), Paul Barrett, Brigitte Boucher, Randall Holden, Donald Roman Lopez, John Paval

France, Allemagne, Haïti – 1997.

Durée : 96 min

Sortie en salles (France) : inédit

Sortie France du DVD : 20 mars 2010

Couleur

Langues : anglais, français - Sous-titres : anglais, français.

Éditeur : JBA Éditions

Distributeur : Les Films du Paradoxe

lien vers le site des Films du Paradoxe : http://www.dvdparadoxe.com/corps.html

Ce blog est personnel, la rédaction n’est pas à l’origine de ses contenus.