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Cédric Lépine : Est-ce que les cinéastes mexicains des années 2000 t'ont inspiré pour faire à ton tour du cinéma ?
Tess Anastasia Fernández : Le cinéma mexicain vit actuellement un moment très important de son histoire. Plusieurs professionnels mexicains, cinéastes, chefs opérateurs comme producteurs m'inspirent beaucoup. Chaque cinéaste parle de choses distinctes, ce qui permet d'approcher la diversité de la réalité mexicaine.
Par exemple dans Mil capas, la question de la couleur est très importante. J’ai été très attentive à la part créative des couleurs. En ce qui concerne le choix des acteurs, j'ai effectué un peu de casting mais j'avais au préalable en tête l'actrice principale Sonia Couoh. Je lui ai envoyé le scénario qui lui a plu et à partir de ce moment nous avons commencé à travailler. Nous avons beaucoup échangé sur la maladie de son personnage et comment elle s'en échappe. J'ai eu beaucoup de chance de trouver à la fois Sonia [Couoh] et les lieux du tournage.
C. L. : L'histoire de ton film se déroule dans un parc aquatique qui doit fermer ses portes : dès lors c'est son propre rapport au passé que le personnage principal interroge en s'opposant à la vente du parc.
T. A. F. : Ce parc se situe à côté d'un quartier populaire et d'une grande avenue à cinq voies. J'étais subjugué par ce lieu qui avait échappé au temps. C'est pourquoi pour finir le film j'ai utilisé au générique une chanson mexicaine des années 1960. Cela permettait de mettre en évidence la difficulté pour ce personnage de se séparer de son passé.
Une des choses qui me marque le plus dans l'histoire de María est qu'elle débute en portant plusieurs couches de vêtements qu'elle va progressivement enlever. Au final, elle se libère en enlevant toute ces couches physiques et émotionnelles, prenant en main sa propre vie. Alors que sa vie était jusque-là toute tracée, pour moi dès lors sa vie réelle commence vraiment à la fin du film.

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C. L. : D'où vient cette idée de mettre la peur de la lumière au centre de ton récit ?
T. A. F. : Cette histoire a été écrite par une scénariste : lorsqu'elle me l'a envoyée, j'ai commencé à réfléchir à ce que pouvait représenter pour moi cette histoire. Au sujet de cette peur de la lumière je peux dire qu'il est le reflet plus général des choses qui à la fois nous font peur et que nous désirons le plus. Tel est aussi le cinéma pour moi.
Dès le début j'étais intéressée pour me confronter à un personnage contraint par des circonstances particulières.
J'ai beaucoup apprécié de travailler avec une scénariste qui m'a offert un point de vue extérieur à mes propres désirs de cinéma. J'ai pu évacuer certaines choses pour mieux m'en approprier d'autres. Apprendre à collaborer est pour moi une expérience fondamentale car le cinéma se fait avec de très nombreuses personnes.
Je vais réaliser encore un court métrage car je sens le besoin de continuer à expérimenter la réalisation avant de passer au long métrage.