Billet de blog 26 septembre 2024

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Cédric Lépine

Critique de cinéma, essais littéraires, littérature jeunesse, sujets de société et environnementaux

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FBAL 2024 : "La Piel en primavera" de Yennifer Uribe Alzate

Sandra, mère célibataire d'un adolescent et agent de sécurité dans un centre commercial à Medellín, redécouvre son corps et son pouvoir de séduction.

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Illustration 1
La Piel en primavera de Yennifer Uribe Alzate © Monociclo Cine

Film de la compétition long métrage fiction de la 33e édition du Festival Biarritz Amérique Latine 2024 : La Piel en primavera de Yennifer Uribe Alzate

Dans l'atmosphère omniprésente de Medellín dont l'image est celle d'un printemps perpétuel en raison de ses conditions météorologiques privilégiées, Yennifer Uribe Alzate développe un récit à la mise en scène subtile où sa protagoniste devient dans le renouvellement florissant de son être au monde, l'incarnation de la ville colombienne elle-même.

Cela commence avec le développement narratif subjectif et une description fine de la vitalité de la ville avec une présence sonore omniprésente tout autant qu'une description anthropologique d'une grande perspicacité de toute une classe sociale dans des rapports fondamentalement horizontaux dans l'expression du travail. Yennifer Uribe Alzate crée ainsi une mise en scène au service de la description précise de la réalité urbaine par une approche sensitive profonde plutôt que d'user des ressorts coutumiers du réalisme social brut autour duquel une partie du cinéma colombien d'auteur s'est développé dans la continuité du cinéma de Víctor Gaviria dans les années 1990. La portée politique de la mise en scène devient dès lors la revendication à la fois de la place des femmes et de toute une classe sociale laissée dans l'ombre d'une vision verticale et patriarcale des modèles sociaux.

Ainsi, à l'image de son héroïne, Yennifer Uribe Alzate déconstruit le mélodrame tout autant que l'approche sociale dans sa globalité, autour de la conviction que l'expérience sensorielle est la mieux à même d'approcher une compréhension plus profonde de la société dans sa complexité.

Sans jamais quitter son héroïne, Yennifer Uribe Alzate filme le travail précaire des rues, dans un centre commercial, tout autant que dans la sphère intime d'une relation d'amitié complice entre deux femmes, rappelant la dignité de toutes ces personnes anonymes créant par leurs activités elles-mêmes des interactions qui font société. Il en résulte une absence de conflits ouverts dans ce récit, basé notamment sur la force de la sororité dont l'héroïne tire les ressources énergétiques pour garder toujours la tête haute et s'épanouir pleinement au monde.

Par le jeu avec les différentes tenues portées, allant du costume de travail, à celui de mère, de séductrice assumée, à la semi nudité dans des espaces intimes, le film interroge sans cesse une définition sociale de l'individualité par son inscription immédiate au monde que permet et développe ce tissu qui fait sens comme rempart ou prolongement de la peau.

La Piel en primavera
de Yennifer Uribe Alzate
Fiction
100 minutes. Colombie, Chili, 2024.
Couleur
Langue originale : espagnol

Avec : Alba Liliana Agudelo Posada Sandra), Luis Eduardo Arango Correa (Javier), Julián López Gallego (Julián), Laura Zapata Acevedo (Andrea)
Scénario : Yennifer Uribe Alzate
Images : Luciana Riso Soto
Montage : Juan Cañola Vélez
Musique : Alekos Vuskovic
Son : Romina Cano
Direction artistique : Marcela Gómez Montoya
Décors : Marcela Gómez Montoya
Costumes : Juliana Hoyos Vivas
Maquillage : Juanita Santa Maria Vélez
Production : Alexander Arbelaez Osorio, Jose Manuel Duque López
Coproduction : Rebeca Gutierrez Campos
Production exécutive : Jose Manuel Duque López, Rebeca Gutierrez Campos, Alexander Arbelaez Osorio, Miguel Yilales Agelvis
Sociétés de production : Monociclo Cine, Pinda Producciones

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