Billet de blog 27 septembre 2023

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Cédric Lépine

Critique de cinéma, essais littéraires, littérature jeunesse, sujets de société et environnementaux

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FBAL 2023 : "Se permuta" de Juan Carlos Tabio

Une mère qui souhaite éviter ce qu'elle considère comme des mauvaises fréquentations à sa fille, envisage de réaliser un changement de maison pour habiter les quartiers modernes de La Havane.

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Film de la section « Clin d'œil à la comédie cubaine » de la 32e édition du Festival Biarritz Amérique Latine 2023 : Se permuta de Juan Carlos Tabio

Pour son premier long métrage, Juan Carlos Tabio inscrit sa comédie en assumant l'héritage du chef d' œuvre de Tomás Gutiérrez Alea La Mort d'un bureaucrate (La Muerte de un burócrata, 1966) notamment avec ce montage des gestes des statues d'un cimetière qui semblent prendre vie par la magie du montage. Cette parfaite illustration de la comédie à la cubaine démontre les ressources décomplexées pour mettre en scène un monde pris de folie, en intégrant des bulles tout droit issues d'une bande dessinée, un montage rapide des ressorts du cinéma burlesque de la période du muet, associé à la comédie italienne où tout un quartier s'invite spontanément à l'intrigue.

Illustration 1
Se permuta de Juan Carlos Tabio © ICAIC

L'enjeu même du film repose sur l'autodérision d'une spécificité cubaine à une époque où il était interdit de vendre un bien immobilier mais où il était possible de l'échanger (permutar) contre un ou plusieurs autres. Cette règle entraîne des aventures rocambolesques où les maisons s'échangent aussi bien que les couples qui se forment, déforment et reforment. C'est ainsi l'occasion de documenter une réalité architecturale d'une ville avec ses différentes formes d'habitation au fil des pérégrinations des personnages en quête d'un endroit rêvé. Les acteurs et actrices semblent prendre beaucoup de plaisir à interpréter des rôles excentriques rarement taiseux et toujours inoubliables. Dans la relation d'une mère élevant seule sa fille Yolanda, il est question d'un cheminement vers l'indépendance où la jeune femme ne voit pas d'un très bon œil tous ses rêves d'architecte qu'elle doit abandonner en entrant dans un régime matrimonial qui plaît surtout à sa mère pressée d'intégrer une famille plus large où elle deviendrait grand-mère.

Les rôles masculins sont largement tournés en ridicule dans leurs indécisions ou encore dans leur besoin de plaire et leur aisance à oublier les besoins de leur compagne. Une comédie rafraîchissante encore très riche d'enseignement sur ce que fut La Havane dans les années 1980 avec une certaine innocence générale malgré les difficultés rencontrées qui ne sont jamais des grands drames.

Illustration 2

Se permuta
de Juan Carlos Tabio
Fiction
103 minutes. Cuba, 1983.
Couleur
Langue originale : espagnol

Avec : Rosita Fornés, Isabel Santos, Mario Balmaseda, Ramoncito Veloz, Silvia Planas, Manuel Porto, Maritza Rodríguez, José Manuel «Litico» Rodríguez, Rini Cruz, Mirta Ibarra
Scénario : Juan Carlos Tabio et Jesus Gregorio avec la collaboration de Raúl García, d'après une idée originale de Tomás Gutiérrez Alea
Images : Julio Valdés
Montage : Roberto Bravo
Musique : Juan Márquez Sacasa
Son : Raúl García
1er assistant réalisateur : Mario Crespo
Costumes : Diana Fernández
Direction artistique : Nieves Laferté
Société de production : Instituto Cubano del Arte e Industrias Cinematográficos (ICAIC)
Production : Sergio San Pedro

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