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Cédric Lépine : La famille est au centre du film, dans son sujet comme dans sa réalisation : aviez-vous décidé dès l’origine que ce film serait à ce point porté par la famille ?
Patrick Grandperret : Oui dans la mesure ou ça fait déjà beaucoup de films que je fais de cette façon avec Émilie, Leo qui a signé la musique sur mes quatre derniers films et leur maman Dominique Gallieni qui travaille avec moi depuis 1976.
Émilie Grandperret : On a toujours travaillé en famille, la famille de sang et élargie, en fait c’est naturel chez nous, on y a pas vraiment pensé.
C. L. : Le film est un bel hommage à l’importance de l’imaginaire de l’enfance : c’est par celui-ci que le personnage principal retrouve ses origines aussi bien que le sens de sa vie dans un monde tristement pragmatique où tout se vend, à commencer par Cuba.
P. G. : C'est un film que j'ai tourné en réaction à la disparition de mon père. Je me suis souvenu du moment où Émilie, mon premier enfant, est née. Du premier jour ou j'étais papa, et puis des histoires que mon père me racontait... Et là ce qui était troublant c'était de justement de faire ce film avec elle... Aujourd'hui je ne sais toujours pas mon vrai nom ! Mon père est né en avril 1918. Il a pris le nom de Grandperret quand il avait 4 ans, quand ma grand-mère s'est mariée.
Mon « vrai » grand-père venait d'Écosse. Il était lieutenant pendant la guerre, et puis son régiment a quitté Morez et on n'a plus eu de nouvelles... J'ai souvent eu envie d'enquêterPour moi c’est un sens de la liberté, quand on est môme on se sent libre, on a pas peur. Et quand on devient adulte on apprend à avoir peur. Moi j’avais envie de dire qu’on a le droit de rester enfant de pas avoir peur et que c’est pas pour ça qu’on est irresponsable. pour retrouver des traces...
É. G. : Pour moi c’est un sens de la liberté, quand on est môme on se sent libre, on n'a pas peur. Et quand on devient adulte on apprend à avoir peur. Moi j’avais envie de dire qu’on a le droit de rester enfant, de ne pas avoir peur et que c’est pas pour ça qu’on est irresponsable.

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C. L. : Filmer à Cuba était pour vous déterminant ? Comment ce pays vous inspire-t-il ?
P. G. : Oui, j'avais un projet d'une série TV qui ne s'est pas faite et un projet de film au Venezuela. Quand j'ai effectué les repérages pour la série, à La Havane, j'y ai retrouvé toute l’équipe avec qui j'avais tourné douze ans auparavant Couleur Havane. C'était très émouvant. La ville n'avait pas changé mais de gros nuages s’amoncelaient et tout allait basculer.
É. G. : Moi, c’est le rythme qu’il y a à Cuba qui me fascine. Quand on arrive à La Havane les choses se ralentissent, mais il n'y a pas d’ennui, on est quasi obligé de savourer les choses. On prend le temps et c’est pas pour ça qu’on ne fait rien, mais on ne s’agite plus. Et ça, ça m’inspire.
C. L. : Vous choisissez Cuba à une époque décisive de son histoire : y avait-il l’intention de saisir dans l’urgence et sans plus attendre l’atmosphère de ce moment à travers votre film ?
P. G. : Exactement, il y avait urgence. Ceci dit, pour le moment ce n'est pas encore très visible, mais je pense que ça va s’accélérer, que ça va être sanglant.

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C. L. : Pierre Richard interprète avec vitalité un personnage entièrement dévoué à l’invitation débridée au goût de l’aventure : à quel moment est arrivée dans la conception du film, l’idée de faire tourner Pierre Richard ?
P. G. : Très vite, dès le début avec Émilie nous avons pensé a lui. Il nous semblait vraiment être le personnage. Et son rapport particulier avec Cuba a aussi beaucoup joué.
É. G. : Dès le début, j’avais envie de Pierre Richard pour le personnage du père, j’avais envie de quelqu’un qui puisse en une fraction de seconde faire passer une émotion, et je trouvais que Pierre avait ça. Il nous permettait ainsi de ne pas faire de longues séquences explicatives.
C. L. : Ce n’est pas la première fois qu’un pays étranger dans votre filmographie vous conduise à y tourner : comment l’appréhendez-vous, quelle place faites-vous à la réalité locale ?
P. G. : J'ai tourné deux genres de films, les films qui sont inspirés et qui s'adaptent à la réalité locale Inca de Oro au Chili en 1996 et Couleur Havane à Cuba en 1997 et même Le Maître des éléphants en 1995. L'Enfant Lion en revanche se déroule dans un temps indéterminé (plutôt fin XIXe), dans une Afrique imaginaire.
C. L. : Carmen Castillo apparaît dans le film et au générique : quel a été son apport au film ?
P. G. : Vital ! Carmen avec qui je collabore depuis Mona et moi, c'est-à-dire 1989, a été un rouage essentiel avec la production cubaine. Elle a aidé pour tout : des décors au casting et nous a permis de tourner comme si on avait de l'argent et même plus comme si on était invités.
É. G. : Elle a été notre bonne fée marraine.