Billet de blog 30 mars 2016

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Cédric Lépine

Critique de cinéma, essais littéraires, littérature jeunesse, sujets de société et environnementaux

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"El Viento sabe que vuelvo a casa" de José Luis Torres Leiva

En mars 2016, "El Viento sabe que vuelvo a casa" de José Luis Torres Leiva faisait partie de la compétition internationale des documentaires du 38e Festival du Cinéma du Réel à Paris.

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"El Viento sabe que vuelvo a casa" de José Luis Torres Leiva © DR

Le documentariste Ignacio Agüero se rend sur l’île Meulín de l’archipel de Chiloé au sud du Chili afin de préparer une fiction sur un couple de jeunes amants qui aurait subitement disparu dans les années 1980. Au fil de ses rencontres avec les insulaires et les séances de casting où il filme des jeunes, les journées défilent et le portrait anthropologique de la vie sur l’île se fait jour, distinguant deux populations : les descendants des Natifs au centre de l’île et les descendants des colons habitant El Transito. Le spectateur est invité à partager le processus de recherche et de découverte d’Ignacio Agüero, épousant son point de vue lors des essais de casting ou encore le suivant parmi les extérieurs baignés de lumière des routes de l’île. Ce documentaire est d’autant plus déroutant que le réalisateur joue continuellement avec l’art de la mise en abyme : un cinéaste qui en filme un autre, un film qui naît de la recherche d’un homme en quête de son film, des points de vues qui épousent parfois le point de vue du protagoniste puis se place du côté des personnes rencontrées (la caméra de José Luis Torres Leiva se trouve étrangement du côté de la personne que rencontre Ignacio Agüero, dès lors séparé de la caméra par une clôture : le documentariste est autant interrogé par la caméra que les personnes qu’il interroge lui-même) et il n’y aura pas de regards caméras explicites qui rappelleraient qu’il y a quelqu’un derrière la caméra en train de filmer. Et si le film était une fiction ? Tout porterait à le croire, tant José Luis Torres Leiva maîtrise de bout en bout sa mise en scène, soigne ses images extérieures comme lui seul a le génie de rendre compte de l’âme bucolique d’un lieu à travers tous ses films. Tous les titres de ses films, qu’il s’agisse de fiction ou de documentaires, invitent à la rêverie par la seule puissance évocatrice d’idées pourtant fortement ancrées dans le réel : Ningún lugar en ninguna parte (2005), El Cielo, la tierra, y la lluvia (2008), Verano (2011) et El Viento sabe que vuelvo a casa. Ce sont les événements météorologiques qui sont invités à développer la partie fictionnelle d’une prise de vue de prime abord documentaire. Il y a la sensibilité d’un Michelangelo Antonioni chez José Luis Torres Leiva et il est d’ailleurs aisé d’identifier le scénario de L’Avventura dans cette histoire de disparition inexpliquée d’amants sur une île. Mais il faut ajouter à cela le contexte historique chilien où une histoire de disparition dans les années 1980 au Chili n’est nullement anodin, surtout lorsque dans l’île il est question de populations qui ne se rencontrent pas pour des raisons de préjugés racistes. Tout ce sous-texte politique, le réalisateur le laisse apparaître par lui-même, très bien secondé par cette grande figure du cinéma documentaire chilien : Ignacio Agüero.

Illustration 2
"El Viento sabe que vuelvo a casa" de José Luis Torres Leiva © DR

El Viento sabe que vuelvo a casa

de José Luis Torres Leiva

Documentaire

103 minutes. Chili, 2016.

Couleur

Langue originale : espagnol

avec : Ignacio Agüero

images : Cristián Soto

son : Claudio Vargas, Roberto Espinoza

assistante à la réalisation : Tiziana Panizza

montage : José Luis Torres Leiva, Andrea Chignoli

productrice : Catalina Vergara

production : Globo Rojo Producciones

contact : catalina@globorojofilms.com

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