Au sujet du livre Severina de Rodrigo Rey Rosa
Dans un récit court mais condensé dans une intrigue qui ne laisse aucun répit à l'obsession amoureuse de son narrateur, tout commence comme dans un film noir américain des années 1940 avec une femme fatale capable d'emmener le héros jusque-là répondant à l'ordre et à la loi traditionnelle, dans des zones floues et bientôt dans l'effraction elle-même. Dès le début, la couleur est annoncée : la femme dont le libraire est séduit est soit une voleuse professionnelle soit une cleptomane ou bien les deux réunis. Sans même la connaître, il tombe sous son charme comme s'il était attiré par ce qu'elle représente, notamment sa rébellion intrinsèque face à un ordre établi.
Pour un homme enfermé dans un cadre plutôt confortable dans le sous-sol de sa librairie oublieux du reste du monde comme notamment les massacres perpétrés à l'égard de la population indigène au Guatemala, cette rencontre mise en scène dans ce récit se présente comme une opportunité de la dernière chance pour que le protagoniste sorte de sa léthargie. Pour cette raison, l'intrigue savamment conçue par Rodrigo Rey Rosa ne se contente pas de suivre une histoire d'amour, quand bien même l'attrait d'un homme pour une femme est réel, sans pour autant que la réciproque ne soit attesté. L'auteur paraît ainsi questionné le positionnement politique de certains intellectuels de son pays, avide certes d'intrigues, mais qui tournent le dos à la violence institutionnalisée qui court sur des décennies notamment autour de la population originaire maya.
Ainsi, la lecture de ce récit aux multiples rebondissements autour d'un personnage résolument sédentaire ne manque pas d'entrain dans un road movie dont les étapes sont les découvertes des livres lus et subtilisés pour lesquels la mystérieuse Severina tombe dans une profonde passion.
Agrandissement : Illustration 1
Severina
de Rodrigo Rey Rosa
Nombre de pages : 120
Dimensions : 12,6 x 0,8 x 18,6 cm
Date de sortie (France) : 9 février 2019
Éditeur : l'atinoir
Collection : Fiction non fiction